La sorcière, le jeune garçon, et la chipie
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La sorcière, le jeune garçon, et la chipie
La peau lisse de mes mains brûle, je sens la chair se cloquer, les os fumer, rongé par un feu pervers, qui remonte sur mes avant bras. Poussant un hurlement de colère, je me dégage de peu, roulant sur le flanc.
Le souffle d’ombre passe au dessus de mon épaule, roussissant ma tempe gauche alors que la pierre du mur éclate dans une volée de débris.
Son visage a perdu de sa beauté maladive, démoniaque. Ses traits sublimes remplacés par ceux d’une harpie, mégère centenaire. La bouche grande ouverte – trop, distendue, elle va te dévorer- laisse échapper un hurlement strident. Je ne parviens pas à réprimer un vomissement, les tympans mis à mal par le feulement de la ténébreuse, et mon regard se trouble, la vision noyée par les larmes de douleur.
L’atmosphère lourde, chargée de scories et de cendres, faisait peser sur la grande forge de la montagne une chaleur étouffante. D’épaisse volute de fumée s’élevaient le long des parois rocheuses, jusqu'à s’engouffrer dans la cheminée creusée à même la pierre. Le vacarme des souffleuses et des marteaux sur l’acier couvraient les bruits de l’affrontement. Semblable au paysage chaotique surgissant de l’esprit d’un fou, le magma bouillonnant tombait en cascades incandescente. L’air vicié, presque irrespirable, clôturait ce tableau de l’excès, agressant chaque sens des deux combattants, a la limite du supportable.
Le rugissement de la Bête résonna, se refusant à abandonner. Il n’y avait plus d’homme, ici, plus d’homme se dressant face à l’odieuse parée de noir, linceul de ténèbres dont les formes s’agitaient sans cesse.
Un bond sur le coté, et l’instant d’après, le sol se fissure sous l’impact d’un nouveau sortilège. Elle danse, ondule, Serpent furieux, crachant sa sombre magie comme un venin mortel. Ses lèvres autrefois écarlates, pleines de promesse, sont réduites à deux lignes horizontales, d’une pâleur maladive. Sa bouche se tord en grimaces de haine, ses incantations sèches sont immédiatement suivies par des gerbes de flammes violacées. Langues infernales, léchant la pierre, mais la colère la rend imprécise, et j’esquive chaque assaut.
Ma défense effrénée se fait au prix de toute occasion de frapper. Elle laisse entre nous suffisamment de distance, mes haches -Tes crocs, homme, tes crocs- raclent le sol, car j’ai cessé de me tenir droit. J’ai cet avantage, nous sommes plusieurs, elle est seule. Le petit garçon s’en est allé –en es tu sur, homme ? - et la tenebreuse se dresse face à nous. Ses cris, crissements d’ongles sur tableau noir, trouvent réponse dans les rugissements rauques.
La créature qui me fait face n’est pas plus humaine que moi. Sa peau n’est plus qu’un linge sale et crasseux, étirée sur ses os saillants. Ses formes ont disparu, sèche comme une branche cassante. Sa chevelure de jais réduite à quelques fins cheveux sur son crâne jaunis. A chaque seconde, une année s’écoule pour elle, une décennie. Mais lorsque sa beauté s’efface, sa sorcellerie s’exalte, volutes ombreuses qui tombent de plus en plus proche de moi. Ma peau se couvre de sueur, non mais du fait de la chaleur des forges, mais de répulsion à cette incantatrice, et de ses arts maudits.
Je la vois hésiter. Un seul instant, le temps d’un battement de cœur- Hésite t elle vraiment, es tu certain ? - et je m’élance. Mes muscles se détendent, et mes crocs se dressent. J’ai le temps d’apercevoir la peau flasque qui tombe de ses joues, ses yeux pâles, son sourire édenté – Elle sourit, homme, elle sourit - avant qu’elle ne s’évapore, se dissipant dans un nuage de souffre qui frappe de plein fouet mes sens exacerbés.
Mon genou gauche frappe le sol, craquement sourd, mais il est trop tard. Sa main est sur ma joue, la caresse me figeant. Ses phalanges décharnés sont glacées – ILS BRULENT HOMME, ILS BRULENT- mon esprit s’affole, je tente de me rebeller, mais mon corps ne réagit plus. Elle écrase la Bête dans son poing, referme ses ongles sur mon esprit qu’elle déchire, violente. Ma gueule ne s’ouvre pas, et mon hurlement d’agonie est vain. Sa peau – écailles, écailles gelés, faites de haine et d’aigreur- me fend l’âme, le contact fait ressurgir les plus inavouables des souvenirs. Mes forces me quittent, happés par celle-qui-ne-vit-plus, aspirant hors de mon être toute chaleur, un soubresaut qui…
…te tue. Elle nous tue, homme, elle nous tue. Elle saisit à deux mains le lien, et l’écartèle. Elle sent que tu t’y accroche, comme un naufragé. Elle murmure, siffle comme un serpent, voulant te faire lâcher. Mais sa prise glisse sur notre pelage, homme, car nous ne sommes plus l’enfant, nous ne sommes plus l’écuyer, ni le faux-porteur. Nous n’appartenons plus à son monde, homme. Elle s’en rend compte, sa prison de glace ne nous effraye pas. Nous sommes la Bête, homme, nous sommes la chose dans la forêt, nous nous tenons à la table des pères.
Nathan surgit soudainement, non pas au cœur de la forge, mais dans mon esprit. Son bâton d’écorce frappant le poignet onirique qui tentait de m’arracher à mon corps. Son sourire est sauvage, son regard féroce. La sorcière recule, mais derrière elle, Heliven gronde, pelage hérissé. Elle qui voulait m’enchainer, se retrouve prisonnière du Rêve, et elle use de toutes ses forces pour s’arracher de mon esprit, dans un cri de haine.
Je m’écroule, ma joue heurtant douloureusement le sol d’Ironforge. Mes yeux sont clos, mais j’observe, voyant clairement Awena penchée sur moi, furieuse d’avoir ainsi été chassée. Elle incante de nouveau, comme un bélier prenant l’élan devant les murs d’une forteresse. Le temps est pour elle, mais alors qu’elle penche la main vers moi, un cri strident retenti, et un éclair bleu –Le sang frappe le sang, homme, la chair se venge de la chair- frappe la sorcière.
Toujours immobile, je sens, ressens. La fille se dresse face à la mère, répliquant à chaque phrase, chaque pique. Après les mots, vient la magie, Ceralynde tenant tête, feu et ombre.
L’affrontement m’échappe. Les sensations s’imprègnent, et la douleur frappe mon corps. Je convulse, spectateur de mon sort, mais la Bête couve mon esprit, son pelage ne craignant pas les langues violacés qui cherchent à nous entrainer dans leur duel macabre. Lorsque la magie ne suffit plus, elles en viennent aux mains, duel de jeunes filles, le cadavre vivant et la jeune fille. Mais la chipie est un tourbillon de colère – La chair malmène la chair, le sang répond au sang- Ceralynde déversant toute sa rancœur contre l’odieuse, la sœur du serpent.
J’entends les derniers hurlements, puis la chair vicié qui implose, le bruit sourd, et enfin le silence. Lourd, pesant. Après de longues minutes, les mots doux résonnent à mon oreille. Leur sens m’importe peu, seul leur timbre me touche. Ils sont léger, synonyme du printemps, car l’hiver s’en va. Mon raisonnement s’étiole, mes lèvres ne bougent pas. La Bête gronde, protectrice.
« Des os, du sang, de la chair. L’éclat d’un regard, homme, et rien d’autre. Que reste-il de ces brimades, si peu, si peu, homme. Laisse leur ce domaine, qu’ils y siègent, qu’ils règnent sans borne sur les frontières tracées d’une main de fer. Car là ou sont les tiens, là ou grondent les inhumains, les Serpents sont les proies »
Le souffle d’ombre passe au dessus de mon épaule, roussissant ma tempe gauche alors que la pierre du mur éclate dans une volée de débris.
Son visage a perdu de sa beauté maladive, démoniaque. Ses traits sublimes remplacés par ceux d’une harpie, mégère centenaire. La bouche grande ouverte – trop, distendue, elle va te dévorer- laisse échapper un hurlement strident. Je ne parviens pas à réprimer un vomissement, les tympans mis à mal par le feulement de la ténébreuse, et mon regard se trouble, la vision noyée par les larmes de douleur.
L’atmosphère lourde, chargée de scories et de cendres, faisait peser sur la grande forge de la montagne une chaleur étouffante. D’épaisse volute de fumée s’élevaient le long des parois rocheuses, jusqu'à s’engouffrer dans la cheminée creusée à même la pierre. Le vacarme des souffleuses et des marteaux sur l’acier couvraient les bruits de l’affrontement. Semblable au paysage chaotique surgissant de l’esprit d’un fou, le magma bouillonnant tombait en cascades incandescente. L’air vicié, presque irrespirable, clôturait ce tableau de l’excès, agressant chaque sens des deux combattants, a la limite du supportable.
Le rugissement de la Bête résonna, se refusant à abandonner. Il n’y avait plus d’homme, ici, plus d’homme se dressant face à l’odieuse parée de noir, linceul de ténèbres dont les formes s’agitaient sans cesse.
Un bond sur le coté, et l’instant d’après, le sol se fissure sous l’impact d’un nouveau sortilège. Elle danse, ondule, Serpent furieux, crachant sa sombre magie comme un venin mortel. Ses lèvres autrefois écarlates, pleines de promesse, sont réduites à deux lignes horizontales, d’une pâleur maladive. Sa bouche se tord en grimaces de haine, ses incantations sèches sont immédiatement suivies par des gerbes de flammes violacées. Langues infernales, léchant la pierre, mais la colère la rend imprécise, et j’esquive chaque assaut.
Ma défense effrénée se fait au prix de toute occasion de frapper. Elle laisse entre nous suffisamment de distance, mes haches -Tes crocs, homme, tes crocs- raclent le sol, car j’ai cessé de me tenir droit. J’ai cet avantage, nous sommes plusieurs, elle est seule. Le petit garçon s’en est allé –en es tu sur, homme ? - et la tenebreuse se dresse face à nous. Ses cris, crissements d’ongles sur tableau noir, trouvent réponse dans les rugissements rauques.
La créature qui me fait face n’est pas plus humaine que moi. Sa peau n’est plus qu’un linge sale et crasseux, étirée sur ses os saillants. Ses formes ont disparu, sèche comme une branche cassante. Sa chevelure de jais réduite à quelques fins cheveux sur son crâne jaunis. A chaque seconde, une année s’écoule pour elle, une décennie. Mais lorsque sa beauté s’efface, sa sorcellerie s’exalte, volutes ombreuses qui tombent de plus en plus proche de moi. Ma peau se couvre de sueur, non mais du fait de la chaleur des forges, mais de répulsion à cette incantatrice, et de ses arts maudits.
Je la vois hésiter. Un seul instant, le temps d’un battement de cœur- Hésite t elle vraiment, es tu certain ? - et je m’élance. Mes muscles se détendent, et mes crocs se dressent. J’ai le temps d’apercevoir la peau flasque qui tombe de ses joues, ses yeux pâles, son sourire édenté – Elle sourit, homme, elle sourit - avant qu’elle ne s’évapore, se dissipant dans un nuage de souffre qui frappe de plein fouet mes sens exacerbés.
Mon genou gauche frappe le sol, craquement sourd, mais il est trop tard. Sa main est sur ma joue, la caresse me figeant. Ses phalanges décharnés sont glacées – ILS BRULENT HOMME, ILS BRULENT- mon esprit s’affole, je tente de me rebeller, mais mon corps ne réagit plus. Elle écrase la Bête dans son poing, referme ses ongles sur mon esprit qu’elle déchire, violente. Ma gueule ne s’ouvre pas, et mon hurlement d’agonie est vain. Sa peau – écailles, écailles gelés, faites de haine et d’aigreur- me fend l’âme, le contact fait ressurgir les plus inavouables des souvenirs. Mes forces me quittent, happés par celle-qui-ne-vit-plus, aspirant hors de mon être toute chaleur, un soubresaut qui…
…te tue. Elle nous tue, homme, elle nous tue. Elle saisit à deux mains le lien, et l’écartèle. Elle sent que tu t’y accroche, comme un naufragé. Elle murmure, siffle comme un serpent, voulant te faire lâcher. Mais sa prise glisse sur notre pelage, homme, car nous ne sommes plus l’enfant, nous ne sommes plus l’écuyer, ni le faux-porteur. Nous n’appartenons plus à son monde, homme. Elle s’en rend compte, sa prison de glace ne nous effraye pas. Nous sommes la Bête, homme, nous sommes la chose dans la forêt, nous nous tenons à la table des pères.
Nathan surgit soudainement, non pas au cœur de la forge, mais dans mon esprit. Son bâton d’écorce frappant le poignet onirique qui tentait de m’arracher à mon corps. Son sourire est sauvage, son regard féroce. La sorcière recule, mais derrière elle, Heliven gronde, pelage hérissé. Elle qui voulait m’enchainer, se retrouve prisonnière du Rêve, et elle use de toutes ses forces pour s’arracher de mon esprit, dans un cri de haine.
Je m’écroule, ma joue heurtant douloureusement le sol d’Ironforge. Mes yeux sont clos, mais j’observe, voyant clairement Awena penchée sur moi, furieuse d’avoir ainsi été chassée. Elle incante de nouveau, comme un bélier prenant l’élan devant les murs d’une forteresse. Le temps est pour elle, mais alors qu’elle penche la main vers moi, un cri strident retenti, et un éclair bleu –Le sang frappe le sang, homme, la chair se venge de la chair- frappe la sorcière.
Toujours immobile, je sens, ressens. La fille se dresse face à la mère, répliquant à chaque phrase, chaque pique. Après les mots, vient la magie, Ceralynde tenant tête, feu et ombre.
L’affrontement m’échappe. Les sensations s’imprègnent, et la douleur frappe mon corps. Je convulse, spectateur de mon sort, mais la Bête couve mon esprit, son pelage ne craignant pas les langues violacés qui cherchent à nous entrainer dans leur duel macabre. Lorsque la magie ne suffit plus, elles en viennent aux mains, duel de jeunes filles, le cadavre vivant et la jeune fille. Mais la chipie est un tourbillon de colère – La chair malmène la chair, le sang répond au sang- Ceralynde déversant toute sa rancœur contre l’odieuse, la sœur du serpent.
J’entends les derniers hurlements, puis la chair vicié qui implose, le bruit sourd, et enfin le silence. Lourd, pesant. Après de longues minutes, les mots doux résonnent à mon oreille. Leur sens m’importe peu, seul leur timbre me touche. Ils sont léger, synonyme du printemps, car l’hiver s’en va. Mon raisonnement s’étiole, mes lèvres ne bougent pas. La Bête gronde, protectrice.
« Des os, du sang, de la chair. L’éclat d’un regard, homme, et rien d’autre. Que reste-il de ces brimades, si peu, si peu, homme. Laisse leur ce domaine, qu’ils y siègent, qu’ils règnent sans borne sur les frontières tracées d’une main de fer. Car là ou sont les tiens, là ou grondent les inhumains, les Serpents sont les proies »
Angron Manus
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