La biche et le bouc
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La biche et le bouc
Elle s'observe dans le reflet cristallin et cramoisi. Les reliefs déforment ses traits. Sa jeunesse qui semble éternelle est tordue, torturée. Elle est ailleurs.
La grotte est immense. Quelques torches ponctuent les murs de tâches orangées, mais elles ne suffisent pas à éclairer les hautes et inquiétantes voûtes inégales. Sous leurs pieds, la respiration de ce qui ressemble à une bête immonde et gigantesque fait trembler le sol. L'air est lourd et humide, et d'étranges relents remontent, doucereux et désagréables. Les températures sont déjà basses. A la surface, bien plus haut, les premières neiges sont déjà tombées.
Aubenorth entame son éternel hiver.
« Il est temps pour vous d'honorer le marché conclu. »
La voix est cassante, et fait monter des frissons comme une craie sur un tableau. C'est celle d'un homme.
Elle se retourne. Il se tient face à une autre : une prêtresse. Comme elle, autrefois. Cette dernière, les yeux à demi-clos, ne semble même pas inquiétée de leur présence en ce sanctuaire tenu secret. A quelques mètres, un gouffre s'étend sur toute la longueur de la caverne, surplombé par un viaduc menant aux étages supérieurs.
L'homme, lui, fixe son interlocutrice d'un regard mauvais. Il est dans la quarantaine, en robes de bataille. Il a des manies gestuelles, notamment lorsqu'il s'impatiente : elle ne les connaît que trop bien, pour avoir vécu à ses côtés pendant la dernière décennie.
« C'est un sortilège puissant qui vous unit. J'y parviendrai, mais cela prendra plusieurs heures. Installez-vous face à face, sur le sol. »
La pierre est glaciale. Satine va s'asseoir : elle est très proche de cet étrange cristal écarlate, qui pulse d'une légère teinte à chaque seconde. Elle sent une énergie s'en dégager, sans pour autant parvenir à deviner sa fonction.
Puis Vahron est là, à planter son regard dans le sien. Il est étrangement neutre. Peut-être est-ce la promesse d'être bientôt libre qui le rend plus malléable : autrement, elle se sait l'objet d'un dégoût profond en le lisant dans ses yeux.
La femme, richement vêtue de soieries et d'atours religieux, s'approche d'eux. Elle sourit, à présent.
« Ce soir, nous boirons à une collaboration fructueuse... Puis vos chemins pourront se séparer. »
Caliel
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