La courte vie d'Edyan Bodwell.
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La courte vie d'Edyan Bodwell.
Jour, un pas, deux pas, trois pas.
Elle courrait, cheveux sombres plaqués sur le visage en poignées humides, bondissant sur les talus en poussant des cris d’oiseaux sauvages. Ses bras fouettaient l’air, maigres et blancs, au dehors des manches pourpres.
Aaaaahhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Aaaaaaahhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Les pieds bondissaient dans les flaques d’eaux croupies, bottines submergées et sales, les bas glissants.
Aaaaahhhhhhhhhhhhhaaaaaaaaaa
Aaaaaaaahhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
L’oiseau-humain courrait dans le vent violent de la plaine grise, comme un bateau ivre, tombant, pour se relever aussitôt, la figure sale ou seul brillaient encore des yeux sauvages.
Edyyyyyyyyyyyyyyaaaaa-aaaaa-aaaannn !
Elle pirouettait sur elle-même, riant à gorge déployée, sans se soucier du sang qui perlait à sa lèvre, glissant sur son cou humide et froid.
Je m’appelle Edyan Bodwell !
Son cri retentit dans l’air glacé, tandis qu’elle ralentissait à un rythme plus acceptable, ses jupes traînant dans l’eau et couvertes d’herbes brunes et noires.
Et je ne dois plus rien à personne !
Aaaaaaaaaahhhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaa
Elle pliait en deux, mains sur les genoux écartés, se relevant et tanguant comme une ivrogne.
Quatre chevaliers…
Elle marchait, marchait…
Quatre chevaliers…la gorge tranchée...dans la poussière, les têtes ont roulées !
Toux sèche, bredouillements.
Le feu partout en Lordaeron, morts ! Sang ! Aaaahaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Elle pirouetta en éclatant de rire, la voix rauque comme celle d’une vieille femme.
On m’a oubliée ? A qui dois-je services ?
La question s’éleva, stridente. Puis les mots plus bas, doux, presque sensuels…
Brisé, brisé, brisé
Il n’y a plus personne vers qui revenir…
Elle essuya ses mains l’une contre l’autre, dans l’espoir d’en voir partir la crasse et la boue. Les doigts glissèrent vers le sol dégagé, dessinant des sillons dans la terre meuble, arabesques gracieuses, esquisses de visages, mais la pluie recommença à tomber, noyant son art dans le néant. La femme pleura, réessayant en vain ses lignes, une note lugubre et continue sortant de sa bouche. Elle se releva, courant à perdre haleine, tandis que le galop de plusieurs cavaliers se faisait entendre, se rapprochant de plus en plus. Elle courait à toute allure, vive et svelte, jusqu’à ce que le piaffement des bêtes ne la fasse se retourner vers l’innommable. Le bruit de fer d’une épée que l’on tire de son fourreau…puis le silence. Obscurité.
Elle écarquillait les yeux dans l’eau vague, ou le rouge se répandait peu à peu au fond de la rivière, jusqu’à ne plus rien voir, ne plus rien entendre…
Les doigts fins disparurent dans l’eau.
***
Crépuscule, le testament des morts.
Je suis celle qui dort...mon berceau est sombre et brumeux. Aucune lumière n'y tombe, pas plus que le son n'y pénètre. Je suis là depuis des lunes…froide et seule, étendue dans un cocon végétal. Rien ne trouble ma prison, si ce n’est l’éveil de ma conscience. Je suis. Mais qu’est-ce que je suis ?...Peut-on vivre dans les ténèbres ?
Petit à petit, des images ont commencées à me revenir. Je vois les chevaux, la course et l’eau. Je vois du papier blanc, les fuseaux, je sens l’odeur du bois. Des odeurs…il n’y a pas d’odeur ici. Comment peut-on ne rien sentir ? Je suis morte ? La question a commencé à me travailler depuis quelques temps, le temps qui paraît si long ici. Je suis peut-être devenu simple esprit, et je m’attarde…Dans l’eau, rien ne se passe, je comprends que je dors au fond d’un grand nid. Ici je suis à l’abri. Je ne sens rien, et je peux penser.
Aujourd’hui, puisque je persiste à penser de façon humaine ; aujourd’hui quelque chose est arrivé. J’ai senti un courant, comme si quelque chose troublait mon repaire. J’ai éprouvé de l’inquiétude. Les morts peuvent-ils avoir peur ?
Je commence à réfléchir au moyen de sortir…enfin sortir…je suis déjà sortie de tout, en quelque sorte. Il reste peut-être quelque chose de moi qui puisse se voir.
Un bout de métal est tombé dans l’eau. Dans l’eau ! Là où je reposais… Sa présence m’a fait prendre conscience de ma personne, l’objet s’est planté à côté de mon bras. Il est encore là, je sens son contact contre ma peau. J’ai donc encore une peau…
Aujourd’hui, ce sera le jour de la résurrection. Je vais ressortir, ressortir du berceau.
***
Nuit, celle qui n'est pas morte.
Aguaërta.
La Mort-Vivante contempla son reflet dans la glace poussiéreuse, soufflant doucement dessus pour mieux voir son visage. Les yeux ont disparus, à la place, fossé insondable, le néant. Les contours du visage sont restés beaux, la peau fine et pâle. Son attitude elle-même a changée, avant vacillante silhouette, aujourd’hui femme froide et dure, déniant la fragilité de son apparence par la présence qui émane d’elle.
J’étais une idiote. J’étais une artiste. A présent, je serais Aguaërta. Un nouveau nom pour une vie nouvelle. Faire naître la beauté…son regard s’égara…faire naître la beauté d’un trait au pinceau…Elle regarda le reste de miroir. Puis levant le poing, elle le brisa en souriant. Je serais plus forte qu’autrefois. La femme s’éloigna lentement, sa robe sombre balayant le parquet brisé, elle quitta la bâtisse en ruine pour retourner là-bas, là d’où elle avait fuit. La cité de Lordaeron…
Elle courrait, cheveux sombres plaqués sur le visage en poignées humides, bondissant sur les talus en poussant des cris d’oiseaux sauvages. Ses bras fouettaient l’air, maigres et blancs, au dehors des manches pourpres.
Aaaaahhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Aaaaaaahhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Les pieds bondissaient dans les flaques d’eaux croupies, bottines submergées et sales, les bas glissants.
Aaaaahhhhhhhhhhhhhaaaaaaaaaa
Aaaaaaaahhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
L’oiseau-humain courrait dans le vent violent de la plaine grise, comme un bateau ivre, tombant, pour se relever aussitôt, la figure sale ou seul brillaient encore des yeux sauvages.
Edyyyyyyyyyyyyyyaaaaa-aaaaa-aaaannn !
Elle pirouettait sur elle-même, riant à gorge déployée, sans se soucier du sang qui perlait à sa lèvre, glissant sur son cou humide et froid.
Je m’appelle Edyan Bodwell !
Son cri retentit dans l’air glacé, tandis qu’elle ralentissait à un rythme plus acceptable, ses jupes traînant dans l’eau et couvertes d’herbes brunes et noires.
Et je ne dois plus rien à personne !
Aaaaaaaaaahhhhhhhhhhhaaaaaaaaaaaaaaaa
Elle pliait en deux, mains sur les genoux écartés, se relevant et tanguant comme une ivrogne.
Quatre chevaliers…
Elle marchait, marchait…
Quatre chevaliers…la gorge tranchée...dans la poussière, les têtes ont roulées !
Toux sèche, bredouillements.
Le feu partout en Lordaeron, morts ! Sang ! Aaaahaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Elle pirouetta en éclatant de rire, la voix rauque comme celle d’une vieille femme.
On m’a oubliée ? A qui dois-je services ?
La question s’éleva, stridente. Puis les mots plus bas, doux, presque sensuels…
Brisé, brisé, brisé
Il n’y a plus personne vers qui revenir…
Elle essuya ses mains l’une contre l’autre, dans l’espoir d’en voir partir la crasse et la boue. Les doigts glissèrent vers le sol dégagé, dessinant des sillons dans la terre meuble, arabesques gracieuses, esquisses de visages, mais la pluie recommença à tomber, noyant son art dans le néant. La femme pleura, réessayant en vain ses lignes, une note lugubre et continue sortant de sa bouche. Elle se releva, courant à perdre haleine, tandis que le galop de plusieurs cavaliers se faisait entendre, se rapprochant de plus en plus. Elle courait à toute allure, vive et svelte, jusqu’à ce que le piaffement des bêtes ne la fasse se retourner vers l’innommable. Le bruit de fer d’une épée que l’on tire de son fourreau…puis le silence. Obscurité.
Elle écarquillait les yeux dans l’eau vague, ou le rouge se répandait peu à peu au fond de la rivière, jusqu’à ne plus rien voir, ne plus rien entendre…
Les doigts fins disparurent dans l’eau.
***
Crépuscule, le testament des morts.
Je suis celle qui dort...mon berceau est sombre et brumeux. Aucune lumière n'y tombe, pas plus que le son n'y pénètre. Je suis là depuis des lunes…froide et seule, étendue dans un cocon végétal. Rien ne trouble ma prison, si ce n’est l’éveil de ma conscience. Je suis. Mais qu’est-ce que je suis ?...Peut-on vivre dans les ténèbres ?
Petit à petit, des images ont commencées à me revenir. Je vois les chevaux, la course et l’eau. Je vois du papier blanc, les fuseaux, je sens l’odeur du bois. Des odeurs…il n’y a pas d’odeur ici. Comment peut-on ne rien sentir ? Je suis morte ? La question a commencé à me travailler depuis quelques temps, le temps qui paraît si long ici. Je suis peut-être devenu simple esprit, et je m’attarde…Dans l’eau, rien ne se passe, je comprends que je dors au fond d’un grand nid. Ici je suis à l’abri. Je ne sens rien, et je peux penser.
Aujourd’hui, puisque je persiste à penser de façon humaine ; aujourd’hui quelque chose est arrivé. J’ai senti un courant, comme si quelque chose troublait mon repaire. J’ai éprouvé de l’inquiétude. Les morts peuvent-ils avoir peur ?
Je commence à réfléchir au moyen de sortir…enfin sortir…je suis déjà sortie de tout, en quelque sorte. Il reste peut-être quelque chose de moi qui puisse se voir.
Un bout de métal est tombé dans l’eau. Dans l’eau ! Là où je reposais… Sa présence m’a fait prendre conscience de ma personne, l’objet s’est planté à côté de mon bras. Il est encore là, je sens son contact contre ma peau. J’ai donc encore une peau…
Aujourd’hui, ce sera le jour de la résurrection. Je vais ressortir, ressortir du berceau.
***
Nuit, celle qui n'est pas morte.
Aguaërta.
La Mort-Vivante contempla son reflet dans la glace poussiéreuse, soufflant doucement dessus pour mieux voir son visage. Les yeux ont disparus, à la place, fossé insondable, le néant. Les contours du visage sont restés beaux, la peau fine et pâle. Son attitude elle-même a changée, avant vacillante silhouette, aujourd’hui femme froide et dure, déniant la fragilité de son apparence par la présence qui émane d’elle.
J’étais une idiote. J’étais une artiste. A présent, je serais Aguaërta. Un nouveau nom pour une vie nouvelle. Faire naître la beauté…son regard s’égara…faire naître la beauté d’un trait au pinceau…Elle regarda le reste de miroir. Puis levant le poing, elle le brisa en souriant. Je serais plus forte qu’autrefois. La femme s’éloigna lentement, sa robe sombre balayant le parquet brisé, elle quitta la bâtisse en ruine pour retourner là-bas, là d’où elle avait fuit. La cité de Lordaeron…
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