Nuits Clandestines

Le manoir tombait lentement dans le silence de la nuit. Les rires et les murmures s'estompaient. Dehors, le givre recouvrait chaque brindille, chaque pierre. Le vent d'est était piquant et accentuait encore cette sensation glacée.
Le feu crépitait dans la lourde cheminée, les valets avaient ramené assez de bois pour l'alimenter toute la nuit. La table regorgait de mets delicats.. fraises, framboises, fruits confis et de délicieux abricots juteux à souhait, sucreries au miel ou pâte d'amandes, le tout accompagné d'un vin capiteux.

La prêtresse, napée dans une voluptueuse nuisette, brossait ses cheveux en de longs gestes réguliers. Le miroir lui rendait un reflet où se lisait fatigue et plénitude. Un sourire éclairait son visage. Elle savait qu'un petit être grandissait en elle. Un enfant de l'amour, cet amour si intense pour cette homme qui avait croisé sa route.

Il ne ressemblait à nul autre, il était différent. Elle sentait en lui puissance et sagesse. Pourtant aucun signe extérieur, rien ne pouvait le décrire de la sorte. Parfois, un mot, un geste le trahissait quelques secondes. Il était de la lignée des chefs ; un jour il se devoilerait. Elle était consciente de la méfiance de la plupart des membres de l'ordre, mais il saurait se faire respecter.

Les années passaient et la solitude lui pesait. Elle était enfin parvenue à tourner la page sur son mariage trop bref, trop superficiel. L'âge avançant, elle ne cherchait que sécurité et repos.

Sécurité et repos.. deux mots qui chantonnaient dans son coeur. D'ici quelques semaines, les malaises auront disparu et elle pourra savourer pleinement. Et puis quand les mois seront plus avancés, qu'elle ne pourra plus suivre ses compagnons au combat sans risques, alors elle prendrait un peu de repos.

Le feu mourait, la nuit devait être avancée. Elle remit quelques bûches et se glissa sous les draps satinés. Un léger bruit derrière la porte... un craquement...

elle s'ouvrit. Il était là, à quelques pas d'elle. Leurs regards s'accrochèrent, invite silencieuse, désir omniprésent, son burnous tomba à ses pieds.

Les muscles saillaient sur son torse, démentant si besoin était qu'il n'était pas un simple homme de lettres. Il maniait les mots comme nul autre, mais il n'était que force tranquille. Un sourire illuminait son visage, alors que le drap de satin s'entrouvait. La passion se dechaîna en un long baiser langoureux...