Sur un trône d'ossements.

Sur un trône d'ossements de démons siégeait Fëarielle-Aenothos. Tapotant du bout de l'index le crâne de Diablotin qui ornait le bout de son accoudoir, elle parcourait d'un air las les divers démons et cultistes présents dans la salle. En fait ils ne l'intéressaient pas. Non, c'est son cerveau qui travaille à l'heure actuelle. Enfin les deux cerveaux.

"D'abord, passer en revue ce qu'on a..."
"Une belle brochette de Protecteurs Hospitaliers..."
"Un bon début..."
"Les Gardiens de l'Etoile..."
"Risqué de les sortir..."
"Le Temple? ..."
"Non, Azryen n'est pas encore assez bien établie..."

Un soupire.

"T'as jamais assez de pions en fait?"
"Non, jamais. Que veux-tu? On est ce que l'on est ni plus, ni moins."

Elle lâcha un grognement... Et porta ses yeux sur sa dernière pièce. Le Voleur. Pas comme elle l'aurait voulu, mais finalement elle avait atteint son objectif. Un être sans âme, qui vole les âmes... Mais qui ne lui servait à rien pour le moment... Trop tôt, toujours trop tôt! Idrid au nord se battait encore contre les Réprouvés, le Temple au sud, peinait à s'ériger correctement sans rencontrer à chaque fois un ennemi de taille. La Guerre ne l'attendait pas elle! Elle crispa la main sur le crâne. Il fallait quelque chose de fort dans son jeu. Quelque chose comme elle. Quelque chose qu'elle ne pourrait pas contrôler, mais dont elle pourrait, peux-être, contrôler les conséquences. Quelque chose... D'insidieux... Malsain... Un sourire fleurit sur ses lèvres.

"Amenez-moi l'Archiviste."

Celui-ci se présenta quelques minutes plus tard sous l'aspect d'un jeune homme aux cheveux bruns et courts. Pas très grand le gaillard, mais pas une trace de graisse. Que du muscle. Enfin, pas beaucoup. Il s'agenouilla.

"Madame."
"Archiviste, nous avons un nouveau travail pour toi. Tu te rendras à Hurlevent, tu fouillera toutes les Archives que tu peux, notamment celles de la Garde. Je te transmettrais une liste de noms quand tu seras chez eux."
"Bien madame."

Il se redressa, se détourna, s'éloigna et disparu dans les Ombres, vétu d'une robe sobre, portant un bouclier et une épée, là où il y a quelques secondes se tenait un jeune homme quasi-nu.

"Il est trop Humain.... Il va se faire tuer."
"Aenothos chéri... Bien sur que non... C'est parce qu'il est si humain, qu'il survivra envers et contre tout."
"Pour une fois, je ne te suis pas."
"Ma foi, pour tout le monde, il ne sera qu'un simple gratte-papier, qui patrouillera à ses heures perdues. Sauf accident, je doute qu'on se méfie de lui."
"Sauf accident?"
"J'ai toujours dit que les Chasseurs avaient un instinct de clébard. S'il se met à flairer les documents, ca va être drôle."

Un rire gras, superposé à un rire clair emplit la salle.

"Espérons. Son aura est bien masquée en tout cas."
"J'y ai pourvu. Seul un démon pourrait le reconnaitre. Et encore, à condition qu'il l'ait sous le nez."

A Hurlevent à la nuit tombée, une Ombre sortit d'un cul-de-sac. Elle fumait. Et été accompagnée d'une vieille odeur de souffre. Elle portait une robe grise, un bouclier et une épée. Et elle s'avançait résolument vers la Caserne. Non sans réciter une longue série de noms, célèbres visiblements, dans un ordre chronologique parfait, et en humant l'air de temps en temps. Oui. Cette ville sentait la mort et la corruption. Oui. Il adorait cette ville. La garde qui lirait son dossier saurait-elle lire entre les lignes? Probablement pas. Hurlevent une belle ville. Il ricana. La seule beauté d'Hurlevent c'était sa décrépitude. Sourire aux lèvres il déposa le dossier dans la case. L'Archiviste se détourna ensuite, et retourna dormir. Parmis les Ombres. Là où se cachait la Vérité.

"Madame. Quelques nouvelles de l'Archiviste."

Le cultiste, agenouillé devant sa maîtresse, qui elle, siégeait de manière régalienne sur son trône d'Os, tendit une missive, les bras levé au dessus de la tête. D'un petit geste de la main, le parchemin s'éleva, et flotta vers la main gantée de noir et or. Des doigts graciles défirent le lacet cacheté à la cire, et déroulèrent le parchemin. Des yeux gris aux reflets pourpres lurent le message.

"Pas grand chose à signaler... Il fait son trou, mais il se le fait. Au moins il arrive à se faire à peu près apprécier."

Même bouche, mais une voix grave répondit.

"Il avait plutôt intérêt...."
"Faites transmettre. Qu'il prenne son temps, rien ne presse. Et qu'il n'utilise plus ses dons à l'avenir. Je ne veux pas que les gardes ou les Rêveurs se doutent de quoi que ce soit."

Le Cultiste se releva, s'inclina.

"Bien Madame."

Ses yeux se fermèrent et sa conscience dériva ailleurs. Dans un océan de ténèbres, elle voyagea, de cultiste en cultiste, de pion en pion, puis se libéra de leur lien pour n'être plus qu'une présence rampante. Une sensation passagère de peur et de froid pour les animaux, les plantes, et les vivants.

Atreval apparu à ses 'yeux'.

Le ciel était couvert de nuages, entre eux, des reflets verts, des éclairs de la même couleur. Un sourire se dessina sur son corps, à des milliers de lieues de là. Le bombardement continuait, inlassablement. Mais c'était la peur, et non la destruction qui tombait. Un coup de tonnerre se fit entendre, comme si l'on déchirait le monde. Un rocher de la taille d'un cheval jaillit des nuages laissant derrière lui une trainée de feu vert, de fumée et une vague odeur de corruption et de souffre. Il percuta les arbres, arracha leurs cimes et parti s'écraser dans un pré, un peu plus loin, ajoutant un cratère à ceux déjà présents. Elle 'observa' le terrain.

Les fortifications n'avaient subis aucun dommage, pas plus que les mortels qui les habitaient. Tant mieux, ce n'était pas son but. Elle se nourrissait de la peur, et la sourde angoisse qui montait de ces lieux était comme une mise en bouche pour elle. L'ombre se rétracta, revint en arrière, repris son voyage. Elle rejoignit le corps froid qui l'attendait droit et immobile sur son trône d'ossements.

Le sourire était toujours sur ses lèvres.
Un véritable plaisir oui...
Les évènements devenaient amusants, enfin.

"Mais qu'est ce qu'il leur faut bordel!"

La voie claire et fortement énervée de Fëarielle retentit dans les entrailles du caveau. Certains hommes cessèrent leur va et viens, d'autre se cachèrent dans les ombres au cas ou. Elle tapa rageusement du poing sur le crâne de diablotin déjà lissé par l'usure des caresses qu'elle y apposait d'habitude continuellement. Ses yeux étaient deux puits noirs, qui luisaient légèrement de pourpre. Tous savaient, que dans ce moment là, le seul qui pouvait la déranger, c'était Lui.

"Je t'avais bien dit que ton plan était bancal..." Lâcha Aenothos d'une voie rauque et monocorde, presque.... blasée.
"C'est pas faute de t'avoir prévenu. Attaquer des gardes, te faire voire comme un démon incontrôlé et te faire jeter un geôle ne les attirerait pas forcément! Cependant, nous avons désormais une piste, comme quoi certaines alliances sont utiles. Cette campagne au Nord aura double utilité désormais."
"Oui mais ils sont toujours là! A attendre, dans un coin sombre pour me, NOUS, sauter dessus. Et j'ai horreur de l'ignorance. Nous n'avons que des soupçons, aucune certitude!"
"Nous verrons bien dans le nord ma douce.... En attendant je te rappelle que le dernier message de l'Archiviste traine toujours sur la tablette...."

Les doigts de fée de la Dame défirent le parchemin scellé à la cire, le déroulèrent hâtivement, et ses yeux s'agitèrent suivant les lignes.

"Il a écrit dans le Code cette fois. Il se croit surveillé. Des axes de recherche? Quels axes! Je veux tout! Tout! Le Sbire, la Famille et les Rêveurs, même ce Mauvais Présage. Il n'a donc pas compris?!"
"Je pense que si ma douce, mais c'est là un travail long et usant... Laisse lui le temps d'établir les liens, de trouver les réponses... Il préfère demander des précisions vu la quantité de travail..."

Elle esquissa un sourire. Un sourire pervers. Elle coula son regard sur un trépied qui supportait un globe jaune-orangé, un peu...laiteux.

"Il m'apporte au moins une chose de plus. Les Dieux Très Anciens mon beau, finiront un jour ou l'autre par vouloir récupérer ce que je leur ai volé. Et certains rapport indiquent un possible lien avec notre vieil ami C'thun..."

Elle caressa l'oeil mort, devenu dur comme du verre, du bout des doigts.

"Eh bien... S'ils ne me laissent pas venir à eux... J'ai peux être de quoi faire qu'eux viennent à nous."

Serrant le poing, elle fit jaillir une flamme de poing qui consuma le parchemin.

"Qu'il continue ses examens. Même si pour l'instant il n'y a rien de probant, je suis sure qu'il fera son travail à merveille."

L'image est pour le moins sordide. C'est un Œil, unique, vitreux, qui flotte au dessus d'un petit piédestal d'obsidienne veiné de rouge, au centre d'un cercle vert de runes qui brillent légèrement, dégagent une fumée ombreuse, âcre, qui viennent se réunir en un point focal, comme une étoile malsaine, quelques centimètres au dessus de l'oeil.
Le tout est dessiné sur un rocher plat, aux dimensions non naturelles. Un octogone finement taillé dans du basalte.
Autour? Du sable, des dunes, encore du sable, à perte de vue. Le piédestal est son rocher sont apparus à l'aube, dans un éclat de lumière verte, accompagnée d'un coup de tonnerre qui a légèrement fait trembler le sol alentours, en témoigne les cactus couchés, haut vers l'extérieur d'un cercle dont le centre est l'Oeil. Elle contemple l'image, dans la paume de sa main.

"A combien est-il des Portes?"
"200 mètres, Maitresse. Qu'on y entre ou qu'on en sorte, on ne peux pas le rater, il est au sommet d'une petite dune, droit au Nord des Portes."
"Le Sortilège fonctionne?"
"J'ai agis selon vos directives et il fonctionne. C'est par son biais que je suis revenu à vous."
"Parfait."
"Maitresse? Je peux me permettre une question?"
"Oui."
"Je n'ai jamais vu un Œil de Kilrogg de cette nature."
"Il n'est pas démoniaque. C'est l'œil d'une créature bien plus grosse. D'une créature immonde. C'est un Œil de C'thun."

L'Humain hausse un sourcil, surpris.

"Le Dieu Très Ancien?"
"Lui-même, je l'ai depuis la bataille de Quiraj. Maintenant laisse-nous. Je dois me préparer à accueillir tous les imprudents qui voudraient s'en saisir...."

La caverne était plus illuminée qu'a l'accoutumé. Et pour cause, la maitresse des lieux étaient concentrée sur un fatras de parchemins sur lequel elle écrivait, dessinait, rayait.... Bref tout un tas de choses faisables avec une plume. Au dessus des feuilles, une petite sphère pourpre reproduisait pour elle les évènements de la veille qu'elle couchait par écrit. Cela faisait maintenant trois bonnes heures qu'elle repassait certains moments précis, en sautaient d'autres, revenait en arrière, pour dénouer l'enchevêtrement de souvenirs de son âme. Un sourire fugace effleura ses lèvres. Elle en venait à s'utiliser elle-même... Ironie du sort? Au fond n'était-ce pas ce qu'elle avait fait depuis qu'elle avait quitté le Kirin Tor? Elle prit trois nouveaux parchemins vierges, commença à rédiger dessus de brèves phrases et y apposa sa marque. Le F pourpre en forme d'épée, entouré de huit étoiles. Sur le premier :

"Archiviste,
Suivront sous peu les résultats d'hier soir.
Reprendre avec soins les dossiers sur la Famille, Mauvais Présage.
Noter tout ce qui a trait aux personnes suivantes : "

S'ensuit une longue liste de noms, ou de groupes. Sur le second :

"Mon Amour,
J'attends de Djé, un Rédempteur, qu'il me fournisse des réponses.
Trouve le, analyse ses habitudes. Tiens toi près à me l'amener.
Sur place, profites-en pour découvrir ce que tu peux sur les secrets des Sénéchaux."

Sur le troisième :

"Mon Champion,
Je vais avoir besoin de toi à Hurlevent,
Rend toi sur places, restes-y et attend les Instructions ultérieures.
Une vent de mort s'annonce."

Elle se redressa, roula les parchemins et les plaça dans de petits tubes qu'elle marqua chacun d'un symbole pourpre : Une plume, un cœur et une lame. Elle émit un bruit de gorge rauque. Un croassement aigu lui répondit suivi d'un battement d'ailes. Le dragonnet Noir, se posa sur le trône, ses serres enlaçant les ossements. Elle attacha deux tubes à ses pattes, le troisième à son cou.

"Va, mon tout petit, et que la nuit soit propice à ton vol."

Le dragonnet pris son envol, après avoir hululer son assentiment, et s'éloigna, vers les Ténèbres. La main gantée de noir de la démoniste s'éleva, aussitôt la lumière devint plus diffuse. Elle s'installa plus confortablement et s'autorisa à fermer les yeux, Jhuutom à ses côtés... Quelques heures de répit. Elle n'en aurait plus ensuite.

Un murmure, une rumeur, parcourait les couloirs et les salles du caveau du Conclave cette nuit là. Celà faisait plusieurs jours que le trône était vide de tout occupant. Les Gardiens étaient coupés de leur lien. L'inquiétude était grande. Certes, dans les Ombres, la lutte continuait. Pas de répit pour la Légion et le Fléau, c'était Ses Ordres, et elle avait été très claire. Même en son absence, même à sa mort, il devait en être ainsi. Les Gardiens assuraient l'inter-règne, une sorte de Conseil qui se chargeait de définir les priorités, les combats, les recherches, de centraliser le renseignement surtout, car c'avait toujours été là la force du Conclave. Son savoir.

Déjà plusieurs groupes de Chasseurs avaient été envoyés un peu partout en Azeroth pour la trouver. Sans succès. Sa trace Arcanique était morte, éteinte. Pire. Un Gardien manquait à l'appel. L'Archiviste était absent, en même temps que la Maitresse.

Mais ce soir, il y avait à nouveau un occupant sur le Trône d'Ossement.

Une réunion des occupants du Conclave avait été déclarée dans l'urgence. Au pied du trône, les Septs Gardiens formaient un demi-cercle, tourné vers l'extérieur et la petite foule des Suivants. A son maximum, le Conclave ne réunissait qu'une cinquantaine de personne. Mais tous étaient experts dans les Ombres. Tous pouvaient déchainer une tempête de feu et d'ombre sur un champ de bataille.

Les Ombres enserraient le Trône. La silhouette indistincte qui y trônait, s'en enveloppait, ménageait son effet.
Le Protecteur s'avança.

"Aenothos est revenu à nous. Notre Maîtresse est indisposée, mais vivante."

Soupir de soulagement dans la foule.

"Elle a donné des Ordres, et désigné son successeur pendant son absence. Nous devons retrouver l'épée d'Arkhai Sombrecoeur, celle-là même qu'elle nous a décrit dans son dernier rapport, avant son silence. C'est notre priorité avant toute autre chose."

La voix grave d'Aenothos résonna dans la salle.

"J'aurais pu l'annoncer moi-même Anwhenia. Reprend ta place."

Anwhenia s'inclina face aux Ombres en grognant et reprit sa place.
Le Désir s'avanca, se retourna, s'agenouilla.

"Tous, inclinez vous devant le nouvel hôte de notre Maître."

La foule s'agenouilla. D'un seul mouvement, d'un seul bruissement de robes, imitant Cathlinia.
Les ombres se délitèrent. Un visage souriant apparu. Un sourire froid, rageur, devant l'affront qui leur avait été fait. Fëarielle déchue de son pouvoir.
Un sourire qui appelait à la vengeance.
Un humain, le visage carré, le corps agrandi, les yeux noirs striés de pourpres, une paire d'ailes sombres dans le dos.
Des cheveux coupés à la brosse, blanchis par le Pouvoir.

Màrk siégeait là.
L'Archiviste serait leur Maître.

Outreterre, l'ex-Front de la Légion. Un champ de ruines et de cadavres. Maintenant les ossements des démons recouvraient ceux des Draeneïs déposés là des centaines d'années plus tôt. Certains subsistaient encore, tentaient de passer la Porte en douce. Le Donjon de la Bravoure veillait à ce que cela ne soit pas. Mais d'autres qu'eux participaient au sport local : la chasse au démon.

Une main gantée de noir et or effleura le torse du Gangregarde agonisant. Dans un dernier râle, il rendit son âme pervertie aux services de la Dame. L'effluve pourpre et verte sortit par chaque pore de sa peau, vint se nicher dans la paume de la main caressante, formant une sphère parfaite. De cette même main, un peu d'arcane jaillit, formant une gangue protectrice autour de l'âme du monstre. Elle rangea la sphère pas plus grosse qu'un poing de nourrisson dans une bourse noire aux contours flous, comme si elle n'était pas matérielle. Trois autres ornaient sa ceinture. Toutes étaient maintenant bien rebondies.

Elle se redressa de toute sa hauteur, droite, les vents du Néant balayaient ses cheveux blancs luisants encore des reflets verts de l'énergie corrompue. Ses yeux gris aciers sondèrent un instant le Néant, au delà de l'abime. Elle inspira, offrant son visage aux souffles du vide.

Elle se retourna d'un mouvement vif, s'avança vers les deux Suivants qui se tenaient à quelques mètres derrière, encapuchonnés, vêtus du noir liseré de pourpre des Animamanciens.

"Rentrons."

L'ordre est doux, calme. Les Suivants s'inclinent, se font face, tendent leurs bras pour se plaquer les mains l'une contre l'autre. S'avancent en incantant, et lèvent les bras. Sous l'arche ainsi formée, le Néant se tord, se déchire, s'ouvre. Un portail. Elle se baisse, pour le passer. Puis les Suivants s'écartent et se jettent à l'intérieur avant qu'il ne se referme avec un claquement sec, provoquant une petite onde de choc.

La salle de transfert. Une grotte soigneusement taillée en sphère, tapissée d'un sort trompe-l'œil. Tout ceux qui arrivent ici ont le sentiment de jaillir au beau milieu des étoiles. Elle s'avance sur l'étroit pont qui enjambe les quelques mètres de vide, suit un enchevêtrement de galeries avant d'arriver devant une porte. Elle y pose la main, ouvre ses quartiers. Les deux Suivants restent à l'extérieur, de part et d'autre de la porte. Elle le ferme d'un geste fatigué. La Dame se laisse aller sur le lit taillé à même la roche, couvert d'un épais matelas et de riches draperies en velours pourpre.

"Penses-tu que je doive le faire?"
"Elle choisit en connaissance de cause non?"
"Ae'... C'est une enfant, je ne sais pas si elle choisis en connaissance de cause...."
"Les risques sont minimes. C'est pour la protéger.... Tu es toi-même aller en chercher une autre pour t'assurer qu'il s'acquitterait bien de sa tâche."
"Hors ca... La Corruption, la Voix, la Magie. Tu penses qu'elle y est prête? Nos filles l'étaient, mais elle?"
"Nos filles ne sont pas comparable. Tu leur à offert quelque chose de bien différent. Le sien, tu.. Nous, pourrons le dominer sans aucun soucis. Et le processus est réversible."

Glissant la main dans une bourse elle en sortit l'âme pourpre sombre aux reflets verdâtres. Un soupir, léger. Ses yeux se ferment.

"Pourquoi les gens prennent-ils cela à la légère à chaque fois.... Soit.... Elle sera des nôtres..."

S'il y a bien une salle dans les cavernes du Conclave qui est protégée, c'est l'Archive des âmes-mémoires personelles de Fëarielle. Au plus profond des cavernes, dans un quatrième niveau connu d'elle seule se trouve cette unique, mais vaste salle. A l'entrée, l'Index trône sur un piedestal. L'Index est une âme, et sa fonction première est... d'indexer justement. Ce matin là, Fëarielle lui apporte deux âmes. Les âmes 1330115, 1330116 et 1330117. Toutes avaient leur numéro, contenant l'âge de Fëarielle, le mois et le jour. L'Index répertoriait ces numéros et les principaux sujets que l'âme contenaient pour permettre une recherche rapide à la Démoniste. Il y avait là des milliers d'âmes qui tournoyaient dans les airs, calmement, évoluant dans un ballet cosmique dont le rythme était connu d'elles seules. L'Index ne parlait pas. Il se contentait de protéger les âmes-mémoires, et d'amener à Fëarielle celles qui l'intéressaient. L'Index commenca l'examen des trois âmes du jour, alors que Fëarielle quittait la pièce.

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Séquence âme-mémoire n° 1330115
Principaux sujets : Ecarlates, Âtreval, Guerre.
Début de séquence :

Dans la Salle du Trône d'Ossements, Fëarielle était entourée de deux de ses gardiens. Le Champion et le Protecteur. Ils s'affairaient autour d'elle, ajustant sa robe de bataille. C'était une robe tissée à même l'âme de Fëarielle. Étrangement vaporeuse, elle était ornée de plaque d'arcanes sensées dévier la plupart des coups humainement portables. Anwhenia, l'ex-démoniste Eredar vêtue de son armure de Chevalier de la mort, resserrait les sangles qui maintenant la robe serrée au plus près du corps de sa Maitresse. Aëlwinë, Chevalier de Sang, usait de ses petits doigts pour placer le cerclet de métal qui accueillerait la coiffe de Ténèbres. Tout devait aller à la perfection. Pas un pli, pas une sangle de travers ou vrillée.

Fëarielle se raidit soudainement. Aëlwinë viens de finir de mettre la coiffe. Les deux gardiens s'écartent, surpris.

"-Màrk.... Je part sur le champ! Rendez vous à la salle de transfert et accueillez l'Archiviste! Il est gravement blessé, je veux qu'il soit placé en cuve dès que possible."

Elle se détourne et se dirige vers le cercle du trône se place dedans. La voix clair de la Sin'dorei retentit. Fidèle protecteur qui déjà la défendait quand elle n'était qu'une mage du Kirin Tor...

"Fëa!" La démoniste se retourne et attrape la large lame que lui lance le Chevalier de Sang.
"Oublie pas ca, ca pourrait t'être utile!"

Un dernier sourire, et Fëarielle disparait dans le cercle de pouvoir.

[A cet instant la vision de l'âme mémoire devient flou, tout est gris, défile à grande vitesse, un vaste paysage brumeux sans relief. Puis....]

La guerre. Le chaos.... Le chemin qui monte vers Atreval est ravagé. Fëarielle se dirige vers Leizen Alrun, en charge des mages.... Elles conversent calmement puis reprennent la route vers la tour.... On sent la frustration de l'âme, celle de ne pouvoir agir librement...
Cette tour doit être prise...

Il pleut des flèches des sorts, mais Fëarielle ne sait que faire... Elle lance des petits sorts ici ou là.... On lui demande de suivre des Ordres.... Mais des ordres il n'y en a pas. Si... Lever des boucliers. Mais ca, c'est pas son rayon....

En bas, au corps a corps, c'est la cohue.... Oh qu'elle aimerait être là-bas, jouer de la lame, se baigner dans le sang en suspension dans les airs, arracher l'âme de ces chiens fous qui osent résister encore à l'ordre du monde. Et pire encore.... Il faut venger l'Archiviste...
Toujours cette frustration... Soudainement la tour explose! Les chiens l'ont faites s'effondrer, jetant aux orties les beaux plans de l'État-Major!
La colère grimpe... Tout ca pour ca. Toute cette attente, tout ce gâchis d'énergie pour en arriver à... Cet échec? Oui c'est son point de vue...

Et elle le fait savoir au Major Alrun en mot bien sentis... Donner son avis lors de la Réunion d'État-Major? On écoute déjà à peine son avis en temps normal... Alors une réunion d'État-Major? Elle voulait y être pour préparer ses directives. Mais ces Lumineux n'auraient jamais écouté son avis. Non... Ils sont trop bêtes pour ca. Trop peureux.

Pas le temps de souffler... La montagne explose derrière eux.... Elle s'écroule sur la route, leur coupant la retraite. Devant, la tour leur bloque la montée. Pour ce soir, c'est fini....
Elle se dirige vers un coin dégagée, alors qu'on commence à rassembler les blessés. Elle incante, invoque son fidèle Archiviste. Quand il apparait, il chute immédiatement sur le flanc, une plaie béante dans le ventre... Celle laissée par la fosse piégée dans laquelle il a chuté.
Elle se fige, son regard se brouille. Elle se penche, le saisit, se dirige vers un buisson derrière un arbre. Là, elle cache le démon. Là, désemparée, une larme coule de ses yeux, puis une autre...

Fëarielle Claircoeur, la dame d'Ombre et de Pierre a pleuré.

Elle plaque ses mains contre la plaie, pour endiguer le flot de sang. Ils sont seuls, personne ne les a encore vus.... Elle sanglote, désemparée. Elle ne sait plus que faire. Affolée.
Alrun viens l'aider en apportant des bandages.... Fëarielle peu à peine réagir, s'en saisit, les plaques machinalement sur la plaie. De sa main libre elle saisit sa dague...

[Vision brouillée, suite à une intense douleur sans doute.]

La démoniste plaque à la place du bandage un cercle de peau blanche laiteuse. Céralynde débarque à son tour. Elle lui demande de préparer le fil et l'aiguille dans sa boite. Elle tremble trop pour ca... La mage s'exécute et lui tend son œuvre. Fëarielle la remercie d'un sourire. Elle coud le cercle de peau à même la plaie, insufflant un peu d'énergie dedans. Puis elle s'allonge au pied de son fidèle serviteur.... Elle se blottit contre lui. L'étreignant une dernière fois, elle le renvoie à Jaedanar. Elle même s'endort comme une masse à même le sol, trop épuisée par le chagrin pour rester éveillée.

Au pied du Trône d'ossement, un cadavre. Jeune. Peux être vingt ans. Fëarielle, installée de manière nonchalante, jambes croisées, accoudées à son trône, le menton dans la paume de sa main, le regarde avec un air.... Désabusé.... Encore un échec.

Le Cadavre est brulé et éventré. Elle connait bien ces marques. Celles de l'Echec lors de la première épreuve. Trop empressés, trop surs de la maîtrise de l'Ombre qu'on leur a enseigné dans les grandes villes. Mais ici, ce n'est pas les grandes villes. Ici on ne protège pas le Novice. Ici il choisit le moment où il se sent prêt. C'est ainsi que l'on apprend à connaitre son Pouvoir et ses Limites. Pas en suivant les barrières des autres...

Certes le test est difficile. Certes, affronter un Porte-Effroi et de Lieutenants Gangregardes, c'est une épreuve. Mais cette épreuve est une épreuve de patience. Seul celui qui prendra le temps de saisir dans son entier les prémices de leur enseignement pourra la passer. Et la seconde est bien pire. Quand à la troisième.... aucun ne l'a réussie à ce jour. Aucun n'a encore mérité le Pourpre de l'Animamancie.

"Brulez le corps et ses possessions, dispersez ses cendres. Qu'il ne reste rien."

Darsin réussira lui.... Le jeune Soltern passera cette étape, et la seconde aussi, haut la main. Quand à la troisième... Elle avait des doutes, mais faibles. Darsin serait digne du Pourpre. Darsin, le fils qu'elle n'avait jamais eu. Le troisième héritier en lice de la Lignée Claircoeur. A moins qu'un autre ne prenne sa place. Elle sourit. Il y avait le temps, bien des années.

"Maitresse?"

Tirée de sa rêverie, elle ouvrit les yeux. les yeux pourpres et noirs qu'elle affichait sur son Trône. Symbole de ce qu'elle était.

"Un message du Champion."

Elle déroula la missive frappée du Sceau des Gardiens. La lu, frémit. Une catastrophe. Sans nom. Rien ne pouvait désigner une horreur pareille.... Lordaeron qui prenait les Armes contre cette nouvelle cité non-vivante. Elle frémit. Elle avait donné à Anwhenia son autorisation de servir Ronae, en plus d'elle. Elle ne pouvait la contraindre à partir... Elle ne se faisait guère de soucis pour elle. Mais Ronae.... Une source de Savoir inépuisable, de son point de vue. Il devait demeurer.... Cet idiot refusait un soutien extérieur? Soit...

"Allez dans les Cryptes. Que l'on m'amène Brise-Lumière."

Il était temps, sans doute, qu'Anwhenia récupère ce bien. Bien qu'elle lui avait confisqué, dans cette guerre contre l'Ombre. Mais si l'Ennemi devenait à nouveau la Lumière.... Pour le salut de son Gardien, elle devait récupérer cette lame.

Assise sur le Trône d'Ossement, au coeur des cavernes qui avaient plus ou moins miraculeusement survécu au Cataclysme déclenché par Neltharion le Destructeur, Fêarielle tapottait distraitement la tête de l'accoudoir de droite. Le Marteau se retranchait lentement dans ses places-fortes. Si jusque là quelques escarmouches suffisaient à le repousser, s'attaquer à ces véritables forteresses allait demander un effort certain. Et beaucoup de monde. Les cours battaient leurs pleins. Il y avait peu de candidats. Et beaucoup d'échecs. Fort heureusement ses deux plus belles réussites subissaient suffisamment les affres de la vie pour se passer de ce genre d'épreuve ridicules, pour elles. De toutes façons ils auraient réussis haut la main. Après tout, elle s'était chargée personnellement de leur formation.

Darsin avait plongé sans rechigner dans l'étude des Ombres et de l'Âme. Malgré son air enfantin et puéril, le jeune mage, comme bien d'autre, voulait plus de puissance, et pour une bonne cause en plus. protéger les êtres qui lui étaient cher. La Dame avait vu là la promesse d'une belle réussite et elle ne s'était guère trompé. Gardant le contrôle avec Brio, le jeune Soltern faisait des miracles. Oui, elle le comptait au rang des prétendants au savoir des Claircoeurs. Et il demeurait pour l'instant, le plus digne de l'obtenir. Malgré ses gamineries, Darsin restait quelqu'un de sage et de réfléchi. Quelqu'un qui saurait contourner les séduisants murmures des Ténèbres.

Céralynde, c'est elle qui l'avait voulu. Elle convoitait ce trophée depuis deux bonnes années au moins, et enfin elle avait dans son cercle, une démoniste avec des capacités hors du commun. La petite ne s'en rendait peux être pas encore bien compte mais ses progrès avaient un air de petit miracle. Là où il avait fallu du temps à Soltern, Elanande avait franchit les paliers à vive allure. La guerre n'y était pas pour rien, et elle avait du un peu accélérer les choses. Demeuraient quelques problèmes de contrôles de soi, sans gravité jusqu’à maintenant. Mais il fallait la garder à l'oeil de prêt. Son potentiel bienfaisant n'avait d'égal que son potentiel de Destruction, et c'est cela qui la reléguait en seconde place. Céralynde était encore instable. Elle avait fait de gros progrès, était devenu plus mature.

Mais l'Archiviste avait fait son rapport.

La fatigue, la lassitude de la jeune femme pouvait miner ce contrôle qu'elle avait. Si elle s’effaçait trop de ce monde, elle risquerait de ne plus tenir compte de certains facteurs importants, et de lâcher la bride sans se préoccuper des conséquences... ou pire de s'en foutre totalement.

Elle avait demander à Mark de veiller sur sa protégée. Tâche dont il s'acquittait de bon coeur, vu qu'il adorait cette gamines aux talents multiples, et au coeur d'or sous la croûte de hargne qu'elle revêtait. Elle ne s'en rendait peux être pas compte, mais sur pas mal de points elle était semblable à elle. Quand elle était plus jeune bien sur. L'âge avait ses avantages, et la Sagesse n'était pas des moindres. Si son évolution se poursuivait sur ce même chemin, elle pourrait un jour égaler la Dame. Pour ça, elle aurait besoin de Mark.
Hors si Mark s'y comprenait sur tout un tas de choses, les relations humaines demeuraient un vaste flou et il tombait rapidement dans la déconnade et le cliché.

Grattouillant du bout des ongles la tête de Diablotin elle analysa ses options. Céralynde était une bonne amie, très bonne même. Mais si elle s'en chargeait personnellement, elle penserait sans doute à une manœuvre quelconque de sa part. Si altérait Màrk, ce serait trop flagrant. Restait d'enseigner à Màrk ce qu'il avait besoin de savoir. Son esprit purement analytique n'avait rien de réconfortant, même s'il visait juste, il visait trop juste.

Elle lâcha un soupir.

"Amenez moi un parchemin."

La Grande Salle était habitée par une atmosphère fébrile pour le moins inhabituelle. D'abord, Le Champion ne cessait de faire des aller-retours entre la salle de Transfert et le Trône, où elle est la Dame échangeait des paroles à voix basses. Des fois le ton montait, des fois, Le Champion se taisait et s'asseyait au pied du Trône, tête basse, caressant Brise-Lumière du revers du gantelet, répandant un sinistre crissement dans l'air.

Et hier dans la soirée, on avait pu observer Fëarielle, bien droite, l'air absente, installée sur le Trône telle une statue. Nimbée d'énergie, le regard vague. Presque tous les gardiens étaient présents non-loin d'elle, dans une situation comparable. L'Energie déployée par cette union était presque palpable, elle laissait un halo pourpre dans l'air. Un halo qui pulsait lentement. Le Coeur et le Choeur des Gardiens.... Leur union pour supporter l'un des leurs.

Peu après, alors que toute tension était redescendue, Fëarielle fit mander Anwhenia.

"L'Archiviste c'est entretenu avec Elanande. La Garde a été manipulée par d'autres personnes. Lui et Céralynde sont tombés d'accord sur un point. Si tu venge sa mort en te jetant contre la Garde, tu ne détruiras que l'épée, pas le bras qui a porté le coup.
Des soupçons pèsent sur plusieurs personnes. Trois Draeneïs et un certain Mr Hornebolt. Je te le offre. Tu vérifiera qu'ils y sont bien mêlés. Ensuite, tu pourras dispenser la Mort comme tu l'entends. Je me chargerai de couvrir tes traces."

La lueur qui filtrait sous le capuchon du Champion redoubla d'intensité. Celle-ci éclaira un sourire narquois, pleins de crocs d'une blancheur immaculée, qui contrastaient avec la peau sombre. Elle s'inclina, et repartit vers la salle de transfert, les plaques d'armures de sa queue raclant sur le sol comme un sinistre avertissement.

"Je te rejoindrais dans cette guerre là, ma soeur... Mais par un autre chemin." murmura la Dame.

Un sourire mauvais étira ses lèvres, une lueur tout aussi mauvaise s'anima dans ses yeux.

"Qu'Hurlevent tremble. Il est temps de la nettoyer."

Le Lien était brisé. Rompu. Inexistant. Et la Dame était seule. Seule Anwhenia avait pu retrouver le chemin de la Scholia à temps. Tous les autres avaient disparus. Introuvables. Et même chaque Oeil de Kilrogg, même les plus puissants rituels de recherches, n'avait donné que des réponses floues et vide de sens.

Quelle bêtise crasse.Si elle avait plus tôt réglé le cas de ce démon, elle n'en serait pas là. Privée du Lien, la Corruption la ronge inexorablement, noircit un peu plus son âme chaque jour. Elle n'a pas pu rétablir le Lien avec le Champion. Pourquoi? Elle ne sait pas. Et s'il y a bien une chose que la Dame hait, c'est rester dans l'ignorance. Le Grand Livre des Claircoeurs, trône fièrement sur son pupitre, relié à une lourde chaîne en Gangrefer qui le lie à tout jamais à son support. Elle l'a lu, relu, en tout sens, à la recherche du moindre détail, du moindre oubli. Rien n'y a fait.

Elle contemple le fin habit de soie noire qui recouvre maintenant sa peau. Masquer sa déchéance, ses imperfections. Seul son visage est à découvert, mais elle est en l'enceinte de la Scholia. La prochaine fois qu'elle ira à Hurlevent, ce sera caché comme, une Ombre parmi les autres. Elle ouvre les yeux, ses yeux désormais injectés de sang, la magie la ronge, la dévore. Elle regarde Anwhënia.

"Pourquoi demeures-tu à mes côtés, toi qui devrait être la première à me tuer puis t'enfuir?"

Le Champion se redresse, abaisse sa capuche et rive ses yeux de runique sur la Dame.

"Parce que comme je croyais en Semelys, je crois en ta cause. Parce que tu m'as asservi, mais que l'asservissement est devenu ma liberté. Que tu es forte, et que dans cet état, te tuer ne m'apporterait aucun honneur. Tu es lasse, faible, dévorée par tes doutes et ton pouvoir. Tu as besoin de moi."
Le Champion tire alors Brise-Lumière de son fourreau, et l'éleve pour que les quelques torches pourpres l'illuminent.
"Parce que sans toi je serais morte. Disons que je te dois bien ça."

Fëarielle réussit à sourire. Brièvement. Elle avait besoin d'eux. Elle avait toujours eu besoin d'eux. Et maintenant ils avaient besoin d'elle.
Et elle s'acquitterait de sa tâche. Elle devait récupérer Mark en priorité. Puis le Voleur d'Âme. Où qu'ils puissent être. Elle aurait besoin de gens. La Garde? Pourquoi ne pas essayer.
Elle trouverait bien des volontaires sinon. La Scholia regorgeait de trésors matériels et immatériels que de jeunes gens en manque de frissons ne manqueraient pas d'accepter en compensation de leurs services.

Les Gardiens avaient vécu les Ans Gris, séparés d'elle. Le Chaos avait régné dans leurs rangs. Elle n'avait jamais vraiment compris.
Maintenant elle savait.

Fëarille Claircoeur prenait enfin la mesure du fardeau qu'elle avait posé sur leurs épaules. Une larme roula sur sa joue avant de s'évaporer sous la brusque montée de chaleur.
L'aura de haine qu'elle matérialisa autour d'elle faisait onduler l'air.

Qui que soit celui qui avait porté atteinte au Choeur des Gardiens, il allait le payer. De son âme.