[Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
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[Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Noir. Mais aveuglant.
Je suis enlacée par le sommeil. Opaque et enivrant. Apaisant. Ici tout devient indolore, insignifiant, lointain. Je ne peux plus voir ce que c'était, c'est devenu minuscule à l'horizon. C'est resté là bas sur la rive. Je ne sais plus pourquoi je m’en éloigne. Dans le ressac. Pourquoi on m’en éloigne.
Noir. Et envahissant.
On me conseille de rester ici d'une voix grave, on me chante une berceuse. Mais une voix claire tente de percer. Soubresaut de conscience ou de subconscient. Elle vient me pincer dans mon sommeil, se débattre dans les vagues sombres, m’apporter une bouffée d’air non-vicié. Elle crie après moi. A contre-courant. Elle me dit que tout est faux. Que seule la douleur est vraie. Que je dois m’y accrocher.
Elle me dit que cette paix est un leurre. Que ce bien-être est vide. Elle me dit de me battre. Mais je me suis battue. Jusqu'à arriver là, au milieu des lames de fond qui promettent de me garder en vie.
Elle dit que c'est un mensonge. Que je dois me réveiller. Ou ce sera trop tard. Elle remue et éveille ce qui reste en moi de volonté, mais tout n’est qu’un flot insaisissable qui se perd dans les lames sombres. Les lames noires.
Noires et conquérantes.
Rien n'est grave. Je crois qu'elle a perdu. Puis j'entends sa voix faible mais triomphante. Elle jubile. Elle dit qu’elle a posé la première pierre. Amarrée, je ne pourrai plus sombrer tout à fait. Cela m'ennuie et me réjouit à la fois, mais je ne sais plus pourquoi. Puis elle me demande, encore une fois, de me réveiller.
***
Je suis enlacée par le sommeil. Opaque et enivrant. Apaisant. Ici tout devient indolore, insignifiant, lointain. Je ne peux plus voir ce que c'était, c'est devenu minuscule à l'horizon. C'est resté là bas sur la rive. Je ne sais plus pourquoi je m’en éloigne. Dans le ressac. Pourquoi on m’en éloigne.
Noir. Et envahissant.
On me conseille de rester ici d'une voix grave, on me chante une berceuse. Mais une voix claire tente de percer. Soubresaut de conscience ou de subconscient. Elle vient me pincer dans mon sommeil, se débattre dans les vagues sombres, m’apporter une bouffée d’air non-vicié. Elle crie après moi. A contre-courant. Elle me dit que tout est faux. Que seule la douleur est vraie. Que je dois m’y accrocher.
Elle me dit que cette paix est un leurre. Que ce bien-être est vide. Elle me dit de me battre. Mais je me suis battue. Jusqu'à arriver là, au milieu des lames de fond qui promettent de me garder en vie.
Elle dit que c'est un mensonge. Que je dois me réveiller. Ou ce sera trop tard. Elle remue et éveille ce qui reste en moi de volonté, mais tout n’est qu’un flot insaisissable qui se perd dans les lames sombres. Les lames noires.
Noires et conquérantes.
Rien n'est grave. Je crois qu'elle a perdu. Puis j'entends sa voix faible mais triomphante. Elle jubile. Elle dit qu’elle a posé la première pierre. Amarrée, je ne pourrai plus sombrer tout à fait. Cela m'ennuie et me réjouit à la fois, mais je ne sais plus pourquoi. Puis elle me demande, encore une fois, de me réveiller.
***
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Premier Jour
Il y a un instant je dormais, il y a un instant je luttais. A présent je suis réveillée. Je garde les yeux fermés, dans l'espoir qu'en ne les ouvrant pas tout de suite, je me souviendrai plus facilement de mon rêve. Mais c'est déjà trop tard. Dès que j'ai conscience que je ne dors plus, tout a disparu. Je sais qu'il est là, vivace, juste derrière. Mais pas moyen de refermer mes doigts dessus. Et je sais aussi que c'est le même. Le même qu'hier, le même que toute à l'heure.
Comment je le sais alors que je ne me souviens pas de ce qu'il raconte ? Il ne faut pas trop m’en demander. L'instinct je suppose. Je crois pouvoir sentir de quoi il est fait, sans pouvoir retrouver les images. Plus je cherche, plus il s'échappe alors je finis par laisser tomber. Je soupire et j'ouvre enfin les yeux. Trois ou quatre fois que j'ai cette sensation bizarre au réveil, celle d'être absente quelques instants avant de savoir où je suis, ce que je fais, et ce qui s'est passé juste avant que je m'endorme.
J'espère que ça va passer. J'ai ça depuis mon retour de voyage. J'ai peut-être chopé une saleté, mais je ne crois pas. Je suis fatiguée, je dors beaucoup, c'est peut-être juste ça. Je n'ai pas l'impression d'aller mal. Au contraire. Je n'arrive pourtant pas à m'ôter l'idée qu'il y a un problème. Reste à trouver lequel...
Il y a un instant je dormais, il y a un instant je luttais. A présent je suis réveillée. Je garde les yeux fermés, dans l'espoir qu'en ne les ouvrant pas tout de suite, je me souviendrai plus facilement de mon rêve. Mais c'est déjà trop tard. Dès que j'ai conscience que je ne dors plus, tout a disparu. Je sais qu'il est là, vivace, juste derrière. Mais pas moyen de refermer mes doigts dessus. Et je sais aussi que c'est le même. Le même qu'hier, le même que toute à l'heure.
Comment je le sais alors que je ne me souviens pas de ce qu'il raconte ? Il ne faut pas trop m’en demander. L'instinct je suppose. Je crois pouvoir sentir de quoi il est fait, sans pouvoir retrouver les images. Plus je cherche, plus il s'échappe alors je finis par laisser tomber. Je soupire et j'ouvre enfin les yeux. Trois ou quatre fois que j'ai cette sensation bizarre au réveil, celle d'être absente quelques instants avant de savoir où je suis, ce que je fais, et ce qui s'est passé juste avant que je m'endorme.
J'espère que ça va passer. J'ai ça depuis mon retour de voyage. J'ai peut-être chopé une saleté, mais je ne crois pas. Je suis fatiguée, je dors beaucoup, c'est peut-être juste ça. Je n'ai pas l'impression d'aller mal. Au contraire. Je n'arrive pourtant pas à m'ôter l'idée qu'il y a un problème. Reste à trouver lequel...
Dernière édition par Naëlthrin le Mer 10 Fév 2010, 00:48, édité 1 fois
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
... seulement la fatigue du voyage ? Etrangement je me souviens de où je suis allée, de qui j'ai abordé, de ce que j'ai vu... mais la moitié des conversations a l’air d’avoir sauté. Et je ne saisis pas pourquoi je suis partie, ni ce que je cherchais. Tout d'un coup, mon périple me paraît vain. Pourtant j'en ai fait des voyages au hasard, uniquement pour découvrir, respirer. Etrange oui. Bon, ce n'est pas comme si on pouvait se souvenir de tout, mais quand même… j’ai l’intime conviction d’être partie dans un but précis, et il m’échappe.
J’aurais du faire comme tout le monde et tenir un journal. « Cher journal… ». Hum, non. Je sais bien que je n’aurais jamais tenu, ni moi ni le journal.
Je devrais être rassurée pourtant. Je vais étonnamment bien. Etonnamment bien… mais d’où je sors ça moi ? J’ai l’impression qu’on me souffle mon texte et ça m’agace. Etonnamment bien… je dis ça comme si ça avait été le désespoir total juste avant, mais je ne m’en souviens pas. Avant quoi ? Alors ? Aucune idée.
J’ai comme un mauvais pressentiment, qui stagne là, au fond. Il est muet, il fait des ricochets dans ma tête. Il pointe des pensées, des souvenirs, qui, lorsque je les approche, disparaissent aussitôt. Mais me laissent un arrière-goût d’inconfort.
Je veux bien croire que je ne me souviens pas de tout mais ce dont je suis sûre c’est que cet état, je ne l’avais jamais vécu avant. Avant quoi ? Toujours cette même question. Je sais juste que je suis dans « l’après ». Dans « l’après », j’ai ces moments de doute, de pensées qui s’échappent, ces pertes de conscience et retours à la réalité. Cette inconfortable impression que ce que j’apprécie, je ne le goûte pas pleinement, qu’il manque quelque chose.
Tu parles comme je vais « étonnamment bien » …
...
J’aurais du faire comme tout le monde et tenir un journal. « Cher journal… ». Hum, non. Je sais bien que je n’aurais jamais tenu, ni moi ni le journal.
Je devrais être rassurée pourtant. Je vais étonnamment bien. Etonnamment bien… mais d’où je sors ça moi ? J’ai l’impression qu’on me souffle mon texte et ça m’agace. Etonnamment bien… je dis ça comme si ça avait été le désespoir total juste avant, mais je ne m’en souviens pas. Avant quoi ? Alors ? Aucune idée.
J’ai comme un mauvais pressentiment, qui stagne là, au fond. Il est muet, il fait des ricochets dans ma tête. Il pointe des pensées, des souvenirs, qui, lorsque je les approche, disparaissent aussitôt. Mais me laissent un arrière-goût d’inconfort.
Je veux bien croire que je ne me souviens pas de tout mais ce dont je suis sûre c’est que cet état, je ne l’avais jamais vécu avant. Avant quoi ? Toujours cette même question. Je sais juste que je suis dans « l’après ». Dans « l’après », j’ai ces moments de doute, de pensées qui s’échappent, ces pertes de conscience et retours à la réalité. Cette inconfortable impression que ce que j’apprécie, je ne le goûte pas pleinement, qu’il manque quelque chose.
Tu parles comme je vais « étonnamment bien » …
...
Dernière édition par Naëlthrin le Mer 10 Fév 2010, 11:59, édité 1 fois
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
... j'essaye de comprendre. Je suis partie, ça d'accord, puis je suis revenue à Lune. J'ai commencé à parler à Ash. Puis je me suis endormie, sans doute trop crevée, et c'est après que j'ai eu mon premier réveil étrange. Et trois nouvelles surprises. Trois objets sortis de nulle part. D’abord les deux bijoux. Depuis quand je porte des bijoux ?
Pourtant là, autour du cou, j'avais un collier. Un médaillon, patiné par les âges. Un peu ringard. Mais que j’aime bien tout de même. Depuis quand ? Je suppose que je l’ai trouvé sur le chemin. Comment ? Aucune idée. Ensuite j’avais cette bague. Sombre, glacée. L'anneau typique qu'un joaillier de conte lugubre aurait rêvé forger. D’aucuns chipoteraient et prétexteraient qu'elle est trop glauque pour être belle, un peu sinistre. Je répliquerais qu'ils ont du fumier de kodo dans les yeux.
Je l'aime assez comme elle est. Ça doit être pour ça que je l'ai gardée quand je l'ai trouvée. Où ça ? Encore le trou noir.
Un tauren l'a qualifiée de malsaine. Il m’a conseillé de m’en débarrasser. Elle n’a aucune valeur à mes yeux je suppose, puisque je ne me souviens même pas d’où elle sort. Pourtant, j’ai eu un pincement au cœur quand j’ai voulu la retirer. Depuis quand ai-je des pincements au cœur ? Je croyais que j’allais «étonnamment bien » ? Je défie le vide et personne ne me répond. Je l'ai finalement gardée. Le même tauren m’a donné un bracelet porte-bonheur, en lin tressé, muni d’une petite plaque ronde en argent.
Je n’ai pas vraiment envie de me transformer en arbre de la Fête du Voile de l’Hiver mais j’ai accepté pour ne pas le vexer. Un porte-bonheur… je ne comprends pas bien pourquoi. Mais ce bracelet je sais d’où il sort, lui, au moins.
Et enfin il y a ce feuillet griffonné. On dirait que j’ai écrit par à-coups, dans la précipitation. C’est lisible mais incompréhensible. Je ne me souviens pas d’avoir écrit quoi que ce soit du genre. Mais c’est bien mon écriture, ça a l'air récent. Il y a une courte mise en garde, ce papier n’est que pour moi. Et je dois le conserver. Il y a une sorte de X majuscule qui revient, écrit de travers. Une histoire de mise en boîte ou d’urnes, de cendres quelque chose.
Je ne sais pas bien ce qui m’est passé par la tête, il faudra que je relise ça à tête reposée. Si j’en ai vraiment envie. Parce que d’un autre côté, ça fait du bien, de me sentir bien. Et je n'ai pas confiance en ce bout de papier. Il m'inquiète curieusement. Alors est-ce que je me sens vraiment bien ? Toute la journée je me suis sentie légère. Juste quelques fois j'avais du mal à retrouver mes mots, j'étais un peu confuse, surtout avec cette satanée mémoire. Mais rien d'alarmant, si j'avais oublié quelque chose de vraiment important je m'en serais souvenue. Non ?
Bon, encore un peu de repos, de sommeil. Je verrai bien demain...
Fin du premier jour
Pourtant là, autour du cou, j'avais un collier. Un médaillon, patiné par les âges. Un peu ringard. Mais que j’aime bien tout de même. Depuis quand ? Je suppose que je l’ai trouvé sur le chemin. Comment ? Aucune idée. Ensuite j’avais cette bague. Sombre, glacée. L'anneau typique qu'un joaillier de conte lugubre aurait rêvé forger. D’aucuns chipoteraient et prétexteraient qu'elle est trop glauque pour être belle, un peu sinistre. Je répliquerais qu'ils ont du fumier de kodo dans les yeux.
Je l'aime assez comme elle est. Ça doit être pour ça que je l'ai gardée quand je l'ai trouvée. Où ça ? Encore le trou noir.
Un tauren l'a qualifiée de malsaine. Il m’a conseillé de m’en débarrasser. Elle n’a aucune valeur à mes yeux je suppose, puisque je ne me souviens même pas d’où elle sort. Pourtant, j’ai eu un pincement au cœur quand j’ai voulu la retirer. Depuis quand ai-je des pincements au cœur ? Je croyais que j’allais «étonnamment bien » ? Je défie le vide et personne ne me répond. Je l'ai finalement gardée. Le même tauren m’a donné un bracelet porte-bonheur, en lin tressé, muni d’une petite plaque ronde en argent.
Je n’ai pas vraiment envie de me transformer en arbre de la Fête du Voile de l’Hiver mais j’ai accepté pour ne pas le vexer. Un porte-bonheur… je ne comprends pas bien pourquoi. Mais ce bracelet je sais d’où il sort, lui, au moins.
Et enfin il y a ce feuillet griffonné. On dirait que j’ai écrit par à-coups, dans la précipitation. C’est lisible mais incompréhensible. Je ne me souviens pas d’avoir écrit quoi que ce soit du genre. Mais c’est bien mon écriture, ça a l'air récent. Il y a une courte mise en garde, ce papier n’est que pour moi. Et je dois le conserver. Il y a une sorte de X majuscule qui revient, écrit de travers. Une histoire de mise en boîte ou d’urnes, de cendres quelque chose.
Je ne sais pas bien ce qui m’est passé par la tête, il faudra que je relise ça à tête reposée. Si j’en ai vraiment envie. Parce que d’un autre côté, ça fait du bien, de me sentir bien. Et je n'ai pas confiance en ce bout de papier. Il m'inquiète curieusement. Alors est-ce que je me sens vraiment bien ? Toute la journée je me suis sentie légère. Juste quelques fois j'avais du mal à retrouver mes mots, j'étais un peu confuse, surtout avec cette satanée mémoire. Mais rien d'alarmant, si j'avais oublié quelque chose de vraiment important je m'en serais souvenue. Non ?
Bon, encore un peu de repos, de sommeil. Je verrai bien demain...
Fin du premier jour
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Deuxième jour
Toujours les mêmes foutus troubles. Et le même cauchemar.
Du côté de la fatigue en revanche, ça passe un peu. Mais comme hier, je m'endors encore malgré moi, je me réveille en pleine forme jusqu'à la prochaine migraine, avant de sombrer de nouveau. Etce qui m'agace le plus ce sont ces... comment appeler ça ? Ces "absences" ? Pendant un instant j'ai l'impression de traverser un trou noir, de ne plus être là, ici et maintenant. Sans savoir exactement où je me trouve pour autant. Comme si je butais dans un mur invisible, étais sonnée, puis devais rebrousser chemin.
Il n'y a aucune logique à ces troubles. Ils peuvent aussi bien arriver lorsqu'on me fait une réflexion, je ne sais laquelle, que lorsque j'essaye de puiser dans certains souvenirs. Je ne vois pas de lien. Ash' me parle comme à son habitude. Il se moque gentiment, raconte ses projets. Je suis égale à moi-même, je lui renvoie des piques quand il le mérite ou je tente de donner un conseil si j'en vois un. Je me sens bien. J'ai enfilé une robe vite-fait le matin, sans éprouver quoi que ce soit de particulier par rapport à ce bout de tissu. Il va me parler de la robe brièvement et je vais me figer. Trou noir. Impossible de savoir pourquoi, ni quel est le problème.
Vranesh passe faire le beau. Apparemment il n'a que ça à faire vu le nombre de fois où je le croise en ville. Il peut se vanter d'être monsieur-je-suis-quelqu'un, n'empêche que son cul bouge rarement loin de Lune la tranquille. Quand il nous croise avec son regard condescendant, j'ai toujours envie de sourire à moitié et de hausser un sourcil. Je sais que ça a toujours été comme ça, pas de raison que ça change. Hier, il m'a jeté son regard froid et dur, supérieur, méprisant, narquois... et je me suis figée. Encore. Je n'ai pas été blessée ou vexée. En réalité, je ne sais pas ce que j'ai été, je n'étais plus là. De nouveau comme si j'avais chuté je ne sais où. Puis étais ramenée à la surface aussi vite, pas le temps de voir où je suis tombée.
La journée est encore longue, je n'ai pas envie de la gâcher à me prendre la tête avec moi-même. Puisque ça va mieux qu'hier, ça ne peut aller qu'en s'arrangeant. Encore une fois : je verrai bien.
Toujours les mêmes foutus troubles. Et le même cauchemar.
Du côté de la fatigue en revanche, ça passe un peu. Mais comme hier, je m'endors encore malgré moi, je me réveille en pleine forme jusqu'à la prochaine migraine, avant de sombrer de nouveau. Etce qui m'agace le plus ce sont ces... comment appeler ça ? Ces "absences" ? Pendant un instant j'ai l'impression de traverser un trou noir, de ne plus être là, ici et maintenant. Sans savoir exactement où je me trouve pour autant. Comme si je butais dans un mur invisible, étais sonnée, puis devais rebrousser chemin.
Il n'y a aucune logique à ces troubles. Ils peuvent aussi bien arriver lorsqu'on me fait une réflexion, je ne sais laquelle, que lorsque j'essaye de puiser dans certains souvenirs. Je ne vois pas de lien. Ash' me parle comme à son habitude. Il se moque gentiment, raconte ses projets. Je suis égale à moi-même, je lui renvoie des piques quand il le mérite ou je tente de donner un conseil si j'en vois un. Je me sens bien. J'ai enfilé une robe vite-fait le matin, sans éprouver quoi que ce soit de particulier par rapport à ce bout de tissu. Il va me parler de la robe brièvement et je vais me figer. Trou noir. Impossible de savoir pourquoi, ni quel est le problème.
Vranesh passe faire le beau. Apparemment il n'a que ça à faire vu le nombre de fois où je le croise en ville. Il peut se vanter d'être monsieur-je-suis-quelqu'un, n'empêche que son cul bouge rarement loin de Lune la tranquille. Quand il nous croise avec son regard condescendant, j'ai toujours envie de sourire à moitié et de hausser un sourcil. Je sais que ça a toujours été comme ça, pas de raison que ça change. Hier, il m'a jeté son regard froid et dur, supérieur, méprisant, narquois... et je me suis figée. Encore. Je n'ai pas été blessée ou vexée. En réalité, je ne sais pas ce que j'ai été, je n'étais plus là. De nouveau comme si j'avais chuté je ne sais où. Puis étais ramenée à la surface aussi vite, pas le temps de voir où je suis tombée.
La journée est encore longue, je n'ai pas envie de la gâcher à me prendre la tête avec moi-même. Puisque ça va mieux qu'hier, ça ne peut aller qu'en s'arrangeant. Encore une fois : je verrai bien.
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Troisième et quatrième jour
Bon. D'abord, voyons le bon côté des choses : plus de fatigues depuis deux jours. Plus de sieste impromptue n'importe où, plus de vertige idiot en pleine rue, de tête qui tombe la première sur un banc ou qui écrase un lapin dans sa chute. Je me suis levée et... j'ai été consciente toute la journée, bravo Naël. Tu gagnes un petit four.
En revanche, toujours les mêmes troubles. Ma mémoire a du retard. Je mettais ça sur la fatigue ou l’étourderie, mais on ne dirait pas. Je mets un temps anormal à me rappeler certaines choses récentes alors que d’autres, bien plus anciennes, sont parfaitement claires.
Enfin, depuis hier soir ça aussi ça commence à s’arranger. J’ai moins de pertes de mémoire donc, croisons les doigts. Reste juste le petit point désagréable. L’hallucination. Oui, je sais, c’est un peu gros. Je suis à ça près de trouver ça drôle. Ça le serait si ça ne m’arrivait pas vraiment je crois. Ash dit que ce sont des hallucinations que je construirais d’après des objets, je n’ai pas retenu le terme exact.
J’ai vraiment des doutes là-dessus, c’était tellement réel. Mais si je commence à ne plus faire confiance à Ash... c'est qu'il y a vraiment un problème.
Mais c’est pas comme si j’avais vu des petites lumières ou des sangliers volants qui dansaient sur les toits de la ville. J’ai vu un gars, avec qui j’ai parlé. Et c’est tout. Rien d’autre que j’ai imaginé depuis. Alors… j’ai peut-être juste croisé un fou, c’était la première hypothèse. Reste qu’il avait exactement la même bague que moi. Oui, je sais. Ash me dit qu’on l’a achetée à la foire de Sombrelune. Je ne m’en souviens absolument pas. Le gars « bizarre » l’a peut-être achetée là-bas aussi, sauf qu’il prétend en être le créateur, et que ce sont des modèles uniques.
...
Bon. D'abord, voyons le bon côté des choses : plus de fatigues depuis deux jours. Plus de sieste impromptue n'importe où, plus de vertige idiot en pleine rue, de tête qui tombe la première sur un banc ou qui écrase un lapin dans sa chute. Je me suis levée et... j'ai été consciente toute la journée, bravo Naël. Tu gagnes un petit four.
En revanche, toujours les mêmes troubles. Ma mémoire a du retard. Je mettais ça sur la fatigue ou l’étourderie, mais on ne dirait pas. Je mets un temps anormal à me rappeler certaines choses récentes alors que d’autres, bien plus anciennes, sont parfaitement claires.
Enfin, depuis hier soir ça aussi ça commence à s’arranger. J’ai moins de pertes de mémoire donc, croisons les doigts. Reste juste le petit point désagréable. L’hallucination. Oui, je sais, c’est un peu gros. Je suis à ça près de trouver ça drôle. Ça le serait si ça ne m’arrivait pas vraiment je crois. Ash dit que ce sont des hallucinations que je construirais d’après des objets, je n’ai pas retenu le terme exact.
J’ai vraiment des doutes là-dessus, c’était tellement réel. Mais si je commence à ne plus faire confiance à Ash... c'est qu'il y a vraiment un problème.
Mais c’est pas comme si j’avais vu des petites lumières ou des sangliers volants qui dansaient sur les toits de la ville. J’ai vu un gars, avec qui j’ai parlé. Et c’est tout. Rien d’autre que j’ai imaginé depuis. Alors… j’ai peut-être juste croisé un fou, c’était la première hypothèse. Reste qu’il avait exactement la même bague que moi. Oui, je sais. Ash me dit qu’on l’a achetée à la foire de Sombrelune. Je ne m’en souviens absolument pas. Le gars « bizarre » l’a peut-être achetée là-bas aussi, sauf qu’il prétend en être le créateur, et que ce sont des modèles uniques.
...
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Je n’en ai pas croisées d’autres, nulle part. Pour du toc vendu à la foire, c’est curieux mais bon, pourquoi pas ? J'ai peut-être des goûts de chiottes.
Non le plus curieux c’est que ce « fou » savait bien trop de choses sur moi pour un allumé qui passerait là par hasard. Alors, hop-là ! Ash me dit que c’est une hallucination, problème réglé ! Bizarre que ça ne l’inquiète pas plus que ça. Lui qui est plutôt protecteur en général, me balancer « Oh tu as du imaginé, ça arrive » et hop, avec un terme technique pour rendre ça crédible… pom pom pom, c’est rien haha ! « Bonjour, je vois des trucs qui n’existent pas ! » « Hoho, prends donc un chocolat, ça va passer ! »… genre. Je ne sais pas, je n’ai pas de raison de me monter la tête comme ça mais… je trouve ça… curieux.
Alors c’est vrai. Personne ne peut me confirmer que ce type existe : il est venu avant-hier, quand j’étais seule, personne dans les parages, pas même un garde. Mauvais point pour moi. Ensuite il m’a sorti des trucs tellement énormes… comment le croire ? Me dire que tout est sorti de ma tête est bien plus crédible. Surtout qu’il avait l’air d’être dans ma tête pour être au courant de certaines choses, et ce n’est pas comme si je collectionnais les amis ou les confidents. Et comme par hasard il surgit quand je suis en train de rêvasser à moitié.
Oui. Soyons francs : il disparaît aussi vite qu’il est venu. Il me connaît trop bien pour être un inconnu, j’ai l’impression d’être proche de lui (ça n’a pas de sens pour quelqu’un que je vois pour la première fois)… et il était… bon. Si je veux clarifier ça, mieux vaut être honnête avec moi-même, quitte à être ridicule : oui, il était plutôt mignon. Oui bon... disons sexy aussi. Bon, un peu mort, d’accord, on peut pas tout avoir, il faut toujours qu’il y ait un petit machin avec moi pour que ça soit pas trop beau, mais il restait quand même… globalement attirant. Pfff... j'en reviens pas de devoir m'avouer ça. Mais bon, si quelque chose devait vraiment me convaincre que TOUT s’est passé dans ma tête, c’est ce dernier point.
...
Non le plus curieux c’est que ce « fou » savait bien trop de choses sur moi pour un allumé qui passerait là par hasard. Alors, hop-là ! Ash me dit que c’est une hallucination, problème réglé ! Bizarre que ça ne l’inquiète pas plus que ça. Lui qui est plutôt protecteur en général, me balancer « Oh tu as du imaginé, ça arrive » et hop, avec un terme technique pour rendre ça crédible… pom pom pom, c’est rien haha ! « Bonjour, je vois des trucs qui n’existent pas ! » « Hoho, prends donc un chocolat, ça va passer ! »… genre. Je ne sais pas, je n’ai pas de raison de me monter la tête comme ça mais… je trouve ça… curieux.
Alors c’est vrai. Personne ne peut me confirmer que ce type existe : il est venu avant-hier, quand j’étais seule, personne dans les parages, pas même un garde. Mauvais point pour moi. Ensuite il m’a sorti des trucs tellement énormes… comment le croire ? Me dire que tout est sorti de ma tête est bien plus crédible. Surtout qu’il avait l’air d’être dans ma tête pour être au courant de certaines choses, et ce n’est pas comme si je collectionnais les amis ou les confidents. Et comme par hasard il surgit quand je suis en train de rêvasser à moitié.
Oui. Soyons francs : il disparaît aussi vite qu’il est venu. Il me connaît trop bien pour être un inconnu, j’ai l’impression d’être proche de lui (ça n’a pas de sens pour quelqu’un que je vois pour la première fois)… et il était… bon. Si je veux clarifier ça, mieux vaut être honnête avec moi-même, quitte à être ridicule : oui, il était plutôt mignon. Oui bon... disons sexy aussi. Bon, un peu mort, d’accord, on peut pas tout avoir, il faut toujours qu’il y ait un petit machin avec moi pour que ça soit pas trop beau, mais il restait quand même… globalement attirant. Pfff... j'en reviens pas de devoir m'avouer ça. Mais bon, si quelque chose devait vraiment me convaincre que TOUT s’est passé dans ma tête, c’est ce dernier point.
...
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
D’un autre côté, quitte à faire du fantasme, j’aurais pu faire mieux tout de même. Faut savoir, si je suis capable d’imaginer quelque chose d’aussi réel et palpable, pourquoi faut-il que je sois une sous douée au point de rater la fin ? Ça sert à rien d’imaginer un gars pareil si c’est pour se taper la causette cinq minutes. Hum, en même temps, c’est souvent comme ça les rêves… Toujours est-il que je ne l’ai pas revu depuis. Hier rien à signaler de bizarre, pas d’autre « hallucination ».
Alors je l’ai imaginé ? Et ce n’est pas grave ? C’est normal, ça va passer ? J’oublie tout ça ? Je veux bien me dire que je serais en manque, on sait pas trop pourquoi, et que je m’imaginerais des trucs mais… enfin j’imaginerais sûrement autre chose si c’était vraiment ça.
Bon de toute façon, ça ne m'a pas empêchée de profiter quand même de ma journée. J'ai l'impression de savoir mieux apprécier les petites choses du quotidien, d'oser aller droit au but pour certaines choses, comme si rien n'avait vraiment de conséquences, comme si je redécouvrais une liberté nouvelle et testais, mais aussi si comme si j'avais un manque nouveau à combler. C'est curieux ça aussi, mais bien moins ennuyeux que tout le reste. Laissons filer le temps, j'irai de mieux en mieux, et j'oublierai sans doute cette curieuse rencontre.
Alors je l’ai imaginé ? Et ce n’est pas grave ? C’est normal, ça va passer ? J’oublie tout ça ? Je veux bien me dire que je serais en manque, on sait pas trop pourquoi, et que je m’imaginerais des trucs mais… enfin j’imaginerais sûrement autre chose si c’était vraiment ça.
Bon de toute façon, ça ne m'a pas empêchée de profiter quand même de ma journée. J'ai l'impression de savoir mieux apprécier les petites choses du quotidien, d'oser aller droit au but pour certaines choses, comme si rien n'avait vraiment de conséquences, comme si je redécouvrais une liberté nouvelle et testais, mais aussi si comme si j'avais un manque nouveau à combler. C'est curieux ça aussi, mais bien moins ennuyeux que tout le reste. Laissons filer le temps, j'irai de mieux en mieux, et j'oublierai sans doute cette curieuse rencontre.
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Cinquième jour
Pas de changement notable. Je suis retournée là où j'avais eu ma fameuse "hallucination", pour tenter de la confondre. Mais rien. Je n'ai ni su la recréer, ni n'ai croisé un semblant de preuve. Rien.
Alors j'ai tenté de faire ce qu'on m'a conseillé. M'intéresser aux autres, à ce qui est bien réel. Je n'ai jamais été douée pour ça, j'ai fait de mon mieux en allant vers ceux qui m'avaient l'air d'avoir besoin d'un peu de compagnie. De nouvelles et brèves rencontres. Je n'avais, comme d'habitude, rien à dire, mais j'ai fait de mon mieux.
Et il y a eu ce mort-vivant étrange, donc le faciès m'est familier mais je ne sais plus pourquoi ni dans quelles circonstances. Parce que oui, du côté de la mémoire ce n'est toujours pas ça. Je suppose qu'il doit traîner souvent en ville. Il m'a crié dessus comme à du poisson pourri, sans aucune raison. A part peut-être son mauvais caractère. Et ma main est partie toute seule. Comme un réflexe bien ancré. C'est mal. Très mal. J'ai bien sûr grondé ma main.
Ash a l'air de s'inquiéter un peu plus, mais il demeure confiant, même s'il n'aime pas mes réponses faites d'à peu près, à toutes ses questions. Je n'aime pas plus les siennes, toutes aussi hypothétiques. J'ai l'impression d'être tombée sur un mur et de le longer en espérant, non pas trouver un autre chemin, mais arriver un jour à passer au-travers. Je me laisse entraîner par ce défi insurmontable, fiévreuse et amusée, sans perdre espoir. Je deviens amoureuse de ma solitude, cavalier seul de mon chemin.
Cette poursuite en avant vers du nulle part me grise, est-ce bien raisonnable ? Est-ce que j'ai déjà été, raisonnable... ?
Pas de changement notable. Je suis retournée là où j'avais eu ma fameuse "hallucination", pour tenter de la confondre. Mais rien. Je n'ai ni su la recréer, ni n'ai croisé un semblant de preuve. Rien.
Alors j'ai tenté de faire ce qu'on m'a conseillé. M'intéresser aux autres, à ce qui est bien réel. Je n'ai jamais été douée pour ça, j'ai fait de mon mieux en allant vers ceux qui m'avaient l'air d'avoir besoin d'un peu de compagnie. De nouvelles et brèves rencontres. Je n'avais, comme d'habitude, rien à dire, mais j'ai fait de mon mieux.
Et il y a eu ce mort-vivant étrange, donc le faciès m'est familier mais je ne sais plus pourquoi ni dans quelles circonstances. Parce que oui, du côté de la mémoire ce n'est toujours pas ça. Je suppose qu'il doit traîner souvent en ville. Il m'a crié dessus comme à du poisson pourri, sans aucune raison. A part peut-être son mauvais caractère. Et ma main est partie toute seule. Comme un réflexe bien ancré. C'est mal. Très mal. J'ai bien sûr grondé ma main.
Ash a l'air de s'inquiéter un peu plus, mais il demeure confiant, même s'il n'aime pas mes réponses faites d'à peu près, à toutes ses questions. Je n'aime pas plus les siennes, toutes aussi hypothétiques. J'ai l'impression d'être tombée sur un mur et de le longer en espérant, non pas trouver un autre chemin, mais arriver un jour à passer au-travers. Je me laisse entraîner par ce défi insurmontable, fiévreuse et amusée, sans perdre espoir. Je deviens amoureuse de ma solitude, cavalier seul de mon chemin.
Cette poursuite en avant vers du nulle part me grise, est-ce bien raisonnable ? Est-ce que j'ai déjà été, raisonnable... ?
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Sixième jour
J’ai suivi les conseils. Me faire des "amis". Comme si ça marchait comme ça. Peu importe, j'ai vite abandonné. L’homme étrange est revenu me parler. Menacer, disparaître. Et Ash’ a fini par accepter de m’expliquer. Enfin. Maintenant je sais. Je devrais être apaisée. Mais les trous sont toujours là. Il n'a fait que me raconter, aucun souvenir, aucune image n'est revenue.
Je ne suis pas sûre que dans le fond, quelque chose ait changé. J'ai plutôt l'impression que c'est pire. Il a été court « l' étonnamment bien », sans doute parce qu'il était faux, il ne pouvait pas durer.
Ma mémoire donc… j’ai voulu qu’Ash me l’enlève par petits morceaux, mes souvenirs me faisaient souffrir. M'a-ti-il dit. Je suis donc bien douillette. Je trouve ça étrange, d'avoir eu aussi mal, de m'être autant laissée avoir, surtout quand on sait le reste. Encore du mal à comprendre. Le « fou congelé » comme l'appelle Ash, comme moi-même je l'ai appelé, n'est pas si fou que ça. Il a dit vrai. Je suis sa femme. Voilà, par exemple ça, c'est tellement... énorme, je ne comprends pas.
Selon Ash c’est à nuancer, abus de langage... Il me dit que le fou est menteur, mauvais et dangereux. Rien que ça. Pas de sentiments, il ne m'aimait pas, je ne l'aimais pas. De la dépendance, de la manipulation, de l'orgueil... Comment ai-je pu vivre une histoire pareille ? Un petit accès de sado-masochisme ? J’ai du mal à trouver une autre explication en entendant la somme d’horreurs qu’il m’a donnée.
Difficile à croire, mais jamais Ash ne m'a menti. Et il a raison sur un point : cet homme ne s’est absolument pas inquiété de moi tout ce temps. Alors, femme ou chose ? Je ne devais pas compter énormément. Je n'en sais rien, je ne me souviens pas.
Voilà, je connais la vérité. Mais elle ne résout rien. Tout au plus explique-t-elle le comportement étrange de mes proches, mes troubles, la venue de l'homme. Autant dire ce qui me pose le moins de problème actuellement. Avec cette histoire, on a comblé les trous de mémoire. Comment expliquer que les plaies béantes de souffrance restent ouvertes, elles ? Et à quoi se raccrochent-elles alors ? Et pourquoi se rouvrent-elles maintenant ?
J’ai suivi les conseils. Me faire des "amis". Comme si ça marchait comme ça. Peu importe, j'ai vite abandonné. L’homme étrange est revenu me parler. Menacer, disparaître. Et Ash’ a fini par accepter de m’expliquer. Enfin. Maintenant je sais. Je devrais être apaisée. Mais les trous sont toujours là. Il n'a fait que me raconter, aucun souvenir, aucune image n'est revenue.
Je ne suis pas sûre que dans le fond, quelque chose ait changé. J'ai plutôt l'impression que c'est pire. Il a été court « l' étonnamment bien », sans doute parce qu'il était faux, il ne pouvait pas durer.
Ma mémoire donc… j’ai voulu qu’Ash me l’enlève par petits morceaux, mes souvenirs me faisaient souffrir. M'a-ti-il dit. Je suis donc bien douillette. Je trouve ça étrange, d'avoir eu aussi mal, de m'être autant laissée avoir, surtout quand on sait le reste. Encore du mal à comprendre. Le « fou congelé » comme l'appelle Ash, comme moi-même je l'ai appelé, n'est pas si fou que ça. Il a dit vrai. Je suis sa femme. Voilà, par exemple ça, c'est tellement... énorme, je ne comprends pas.
Selon Ash c’est à nuancer, abus de langage... Il me dit que le fou est menteur, mauvais et dangereux. Rien que ça. Pas de sentiments, il ne m'aimait pas, je ne l'aimais pas. De la dépendance, de la manipulation, de l'orgueil... Comment ai-je pu vivre une histoire pareille ? Un petit accès de sado-masochisme ? J’ai du mal à trouver une autre explication en entendant la somme d’horreurs qu’il m’a donnée.
Difficile à croire, mais jamais Ash ne m'a menti. Et il a raison sur un point : cet homme ne s’est absolument pas inquiété de moi tout ce temps. Alors, femme ou chose ? Je ne devais pas compter énormément. Je n'en sais rien, je ne me souviens pas.
Voilà, je connais la vérité. Mais elle ne résout rien. Tout au plus explique-t-elle le comportement étrange de mes proches, mes troubles, la venue de l'homme. Autant dire ce qui me pose le moins de problème actuellement. Avec cette histoire, on a comblé les trous de mémoire. Comment expliquer que les plaies béantes de souffrance restent ouvertes, elles ? Et à quoi se raccrochent-elles alors ? Et pourquoi se rouvrent-elles maintenant ?
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Septième jour
En gros, ce n'était un sale épisode de ma vie à oublier ? Et donc je dois aller mieux ? Je croyais aller mieux. Alors l’autre jour, je me suis laissée aller. J’avais envie, de quelque chose, de profiter, d’aller bien, combler ce vide… en vain. Et je suis repartie, insouciante, bien et pourtant insatisfaite. C'est après-coup que je commence à comprendre. De loin. Maintenant je sais. J'ai mal, j'ai toujours eu mal, juste que je ne le savais pas encore.
Blessure qui cicatrise autour d'un bris de lame, jusqu'à ce qu'on l'oublie. Et qu'un évènement, je ne sais encore lequel, appuie dessus, rouvre la plaie. C'est ce qui s'est passé, quand ma bague a été brisée.
De jour en jour, la plaie s'agrandit. C'est trop tard. La sourde douleur. D’où vient-elle si les souvenirs sont partis ? Comment peut-elle exister maintenant que je sais la vérité ? Signe de quoi ? Il y a encore autre chose ? Ou alors on m'a menti ? Je sens qu'on me tire, de l'intérieur. Je sens une corde solide, vibrante, enfouie, qui crie mais je ne comprends pas ce qu’elle dit. Je ne sais pas où elle veut me mener.
Tout me paraît pâle. J'ai l'impression que tout manque de lumière ou de couleur. Ma poitrine est toujours béante, amputée, comme ma mémoire. Je ne sais pas pourquoi, je ne comprends pas pourquoi. J'en ai plus que marre des « pourquoi ». Je suis repartie, mais je ne sais plus vers où aller. Alors je reviens. Je tourne en rond. Je ne peux pas dire pourquoi ça ne va pas, je n’en sais rien. C’est viscéral, je ne cherche même plus à aller mieux, ça ne m’importe pas vraiment.
Il manque toujours quelque chose. Je ne sais pas où chercher. Pleurer, oublier, crier... on ne sait pas sur quoi. Brisée. On ne sait pas par quoi.
L’homme est encore revenu, le dangereux, le manipulateur, le fou… est-ce que tout ça est bien vrai ? Comment savoir ? Il est reparti en souffrance au moment où quelque chose s’éveillait en moi. Il a juste détruit ma bague, éclatée en mille morceaux. Je ne sais pas ce qui m’a poussée à la ramasser, je ne pouvais pas m’en séparer. J’ai réuni ce qu’il en restait, même la petite pierre rouge, quitte à m’en être écorché les doigts.
Le sang sur la pierre est de la même couleur. Les débris dans un sachet de lin, le tout accroché à ma main. Comme une gamine. Et depuis, c'est ce cycle descendant, c'est l'obscurité envahissante. Plus rien n’a aucun goût, tout se vide de son essence et de son sens. Dans un grand cliché dont je me moquais avant. Je ne me moque plus. J’erre, jusqu’à comprendre. Le froid m’attire, la glace m’enivre. Le vent me permet de ne plus entendre ce qui hurle à l’intérieur de mes entrailles.
Vidée. Amputée. Brisée. Si seulement je pouvais comprendre. Est-ce qu’après seulement je pourrai souffler ?
En gros, ce n'était un sale épisode de ma vie à oublier ? Et donc je dois aller mieux ? Je croyais aller mieux. Alors l’autre jour, je me suis laissée aller. J’avais envie, de quelque chose, de profiter, d’aller bien, combler ce vide… en vain. Et je suis repartie, insouciante, bien et pourtant insatisfaite. C'est après-coup que je commence à comprendre. De loin. Maintenant je sais. J'ai mal, j'ai toujours eu mal, juste que je ne le savais pas encore.
Blessure qui cicatrise autour d'un bris de lame, jusqu'à ce qu'on l'oublie. Et qu'un évènement, je ne sais encore lequel, appuie dessus, rouvre la plaie. C'est ce qui s'est passé, quand ma bague a été brisée.
De jour en jour, la plaie s'agrandit. C'est trop tard. La sourde douleur. D’où vient-elle si les souvenirs sont partis ? Comment peut-elle exister maintenant que je sais la vérité ? Signe de quoi ? Il y a encore autre chose ? Ou alors on m'a menti ? Je sens qu'on me tire, de l'intérieur. Je sens une corde solide, vibrante, enfouie, qui crie mais je ne comprends pas ce qu’elle dit. Je ne sais pas où elle veut me mener.
Tout me paraît pâle. J'ai l'impression que tout manque de lumière ou de couleur. Ma poitrine est toujours béante, amputée, comme ma mémoire. Je ne sais pas pourquoi, je ne comprends pas pourquoi. J'en ai plus que marre des « pourquoi ». Je suis repartie, mais je ne sais plus vers où aller. Alors je reviens. Je tourne en rond. Je ne peux pas dire pourquoi ça ne va pas, je n’en sais rien. C’est viscéral, je ne cherche même plus à aller mieux, ça ne m’importe pas vraiment.
Il manque toujours quelque chose. Je ne sais pas où chercher. Pleurer, oublier, crier... on ne sait pas sur quoi. Brisée. On ne sait pas par quoi.
L’homme est encore revenu, le dangereux, le manipulateur, le fou… est-ce que tout ça est bien vrai ? Comment savoir ? Il est reparti en souffrance au moment où quelque chose s’éveillait en moi. Il a juste détruit ma bague, éclatée en mille morceaux. Je ne sais pas ce qui m’a poussée à la ramasser, je ne pouvais pas m’en séparer. J’ai réuni ce qu’il en restait, même la petite pierre rouge, quitte à m’en être écorché les doigts.
Le sang sur la pierre est de la même couleur. Les débris dans un sachet de lin, le tout accroché à ma main. Comme une gamine. Et depuis, c'est ce cycle descendant, c'est l'obscurité envahissante. Plus rien n’a aucun goût, tout se vide de son essence et de son sens. Dans un grand cliché dont je me moquais avant. Je ne me moque plus. J’erre, jusqu’à comprendre. Le froid m’attire, la glace m’enivre. Le vent me permet de ne plus entendre ce qui hurle à l’intérieur de mes entrailles.
Vidée. Amputée. Brisée. Si seulement je pouvais comprendre. Est-ce qu’après seulement je pourrai souffler ?
Naëlthrin
Re: [Brèves de vie] Naëlthrin, retour de voyage
Onzième jour
Je vais arrêter là. Je ne vois pas l’intérêt de ressasser. Je croyais que poser à plat permettait d’avoir du recul, de comprendre. Que c’était pour ça que les gens notaient autant. Pour que ça s’arrête de tourner à l’intérieur, que tout devienne limpide. Ça n’a pas marché. Je ne suis pas plus avancée. Pour ne pas sentir la douleur, je m’éloigne. Et ça marche, on peut dire. Je ne sens plus rien. Je ne sais pas si c’est bien, puisque... je ne sens rien.
De ce que je me souviens, ça n'a jamais été la grande joie, certes. Trop chiante, trop dans son coin, trop compliquée sûrement. Je l’ai bien cherché. Mais j'avais des petits bonheurs de tous les jours. Il m’est devenu impossible de les cerner maintenant. Tout est devenu sans importance. Ma vie, ma mort... peu importe. Ce n'est même pas triste.
Tout le monde s’apitoie... Eh, pourquoi ? C’est si grave une vie en plus, une vie en moins ? C’est le cycle, c’est comme ça. Une vie heureuse fauchée, je comprends qu’on s’apitoie, mais du rien en plus, ou du rien en moins...?
Jamais on n’est autant venu me parler que depuis que ça ne m’importe plus. Et de s’attrister. Ça me gêne : moi, je ne suis pas triste. Pas depuis que je suis devenue ça. Et de vouloir m’aider. M’aider en quoi ? On ne sait même pas ce que c’est. Et si c’était juste... comme ça ? Si j’étais faite pour être comme ça ? Pourquoi devrait-on forcément être heureux? Pourquoi ne pourrait-on pas juste être un rien, qui passe ? Si moi... ça me va ? Je ne fais de mal à personne, je ne dérange personne.
Après, c’est gentil, évidemment. Je remercie. Mais ça m’ennuie. Pas pour être méchante, mais tout simplement parce que je suis devenue un bout de lichen, apathique. J’en suis désolée pour ceux que ça blesserait, je ne leur veux aucun mal. Je suis juste devenue cette masse amorphe. Et leurs mots, leur sollicitude, je sais que c’est gentil, mais ça s'arrête là. Peut m’importe, vraiment.
Ah oui on veut m’aider, ah oui. Ah bon on veut pas, ah bon. Même chose. Un éternellement haussement d’épaules. Je suis loin, loin. Je leur conseille de prendre bien soin de leur vie, de profiter de ce qui leur plaît, de ce qui les anime.
Le retour est fini, il n’a rien donné. Je ferais peut-être bien de repartir. Aucune idée. Au gré des choses, du silence, de la marche. Sans volonté, à un endroit ou à un autre. Je n'aurais sans doute jamais du rentrer.
Fin de "Retour de voyage"
Je vais arrêter là. Je ne vois pas l’intérêt de ressasser. Je croyais que poser à plat permettait d’avoir du recul, de comprendre. Que c’était pour ça que les gens notaient autant. Pour que ça s’arrête de tourner à l’intérieur, que tout devienne limpide. Ça n’a pas marché. Je ne suis pas plus avancée. Pour ne pas sentir la douleur, je m’éloigne. Et ça marche, on peut dire. Je ne sens plus rien. Je ne sais pas si c’est bien, puisque... je ne sens rien.
De ce que je me souviens, ça n'a jamais été la grande joie, certes. Trop chiante, trop dans son coin, trop compliquée sûrement. Je l’ai bien cherché. Mais j'avais des petits bonheurs de tous les jours. Il m’est devenu impossible de les cerner maintenant. Tout est devenu sans importance. Ma vie, ma mort... peu importe. Ce n'est même pas triste.
Tout le monde s’apitoie... Eh, pourquoi ? C’est si grave une vie en plus, une vie en moins ? C’est le cycle, c’est comme ça. Une vie heureuse fauchée, je comprends qu’on s’apitoie, mais du rien en plus, ou du rien en moins...?
Jamais on n’est autant venu me parler que depuis que ça ne m’importe plus. Et de s’attrister. Ça me gêne : moi, je ne suis pas triste. Pas depuis que je suis devenue ça. Et de vouloir m’aider. M’aider en quoi ? On ne sait même pas ce que c’est. Et si c’était juste... comme ça ? Si j’étais faite pour être comme ça ? Pourquoi devrait-on forcément être heureux? Pourquoi ne pourrait-on pas juste être un rien, qui passe ? Si moi... ça me va ? Je ne fais de mal à personne, je ne dérange personne.
Après, c’est gentil, évidemment. Je remercie. Mais ça m’ennuie. Pas pour être méchante, mais tout simplement parce que je suis devenue un bout de lichen, apathique. J’en suis désolée pour ceux que ça blesserait, je ne leur veux aucun mal. Je suis juste devenue cette masse amorphe. Et leurs mots, leur sollicitude, je sais que c’est gentil, mais ça s'arrête là. Peut m’importe, vraiment.
Ah oui on veut m’aider, ah oui. Ah bon on veut pas, ah bon. Même chose. Un éternellement haussement d’épaules. Je suis loin, loin. Je leur conseille de prendre bien soin de leur vie, de profiter de ce qui leur plaît, de ce qui les anime.
Le retour est fini, il n’a rien donné. Je ferais peut-être bien de repartir. Aucune idée. Au gré des choses, du silence, de la marche. Sans volonté, à un endroit ou à un autre. Je n'aurais sans doute jamais du rentrer.
Fin de "Retour de voyage"
Naëlthrin
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