L'enfant du canal
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L'enfant du canal
L’agitation était à son comble. On allait et venait aussi rapidement que possible, puisant l’eau à même le canal. Le bâtiment léché de flammes menaçait de contaminer tous ceux adjacents. Les plus pessimistes envisageaient déjà l’incendie du siècle ravageant la vieille ville dans son ensemble.
Le brasier infernal grandissait, se prélassait dans son berceau de bois, de pierre et d’étoffes. Les flammes découpaient la nuit, étirant leurs mains vermeilles vers les étoiles pour en cacher l’éclat. De sa langue avide, l’incendie dardait le perron de la maison voisine, y laissant quelques feux épars comme preuve de son passage. La fumée grise masquait peu à peu le ciel de nuit. Acre, elle prenait à la gorge et faisait monter des larmes aux yeux des plus résistants.
Sur le toit ravagé par l’appétit vorace des flammes adolescentes, une silhouette se profila. Dans le chaos des incessants va-et-vient des citoyens tentant de maitriser le feu, personne n’y prêta attention. Elle jetait dans le canal un colis de couvertures blanches. Lentement, le colis virevoltait comme la neige qui commençait à tomber sur la ville. Le vacarme de cris couvrit les pleurs et le hurlement sinistre de la silhouette qui s’embrasait. Quelques pas et dans un regain de vivacité l’appétit du monstre de flamme engouffra les restes de son berceau. La de¬meure s’effondra sur elle-même, tuant au passage deux citoyens le combattant.
Loin de cette agitation, le colis de couvertures blanches voguait sur les flots des canaux. L’eau sombre et rance le ballotait à gauche à droite, doucement, comme une berceuse apaisante. Parmi les draps, une petite main jaillit, gazouillant après les flammes, saisissant les flocons de neige.
Le feu fut peu à peu maitrisé. Le pire fut évité. Après plusieurs heures de lutte acharnée, il rendit son dernier soupir face à ses assaillants.
La population éreintée regagna son logis et les quelques malheureux ayant perdu leur toit furent gracieusement logés à l’auberge du quartier. La nuit devint paisible, la neige tombant lentement en lourd manteau sur les épaules de Hurlevent, recouvrant lentement la maison cal¬cinée achevant les éventuels derniers foyers de feu couvant sous les décombres. Seuls quelques gardes fouillaient encore les débris à la recherche de survivants. Ils n’avaient que peu d’espoir, mais c’était leur devoir. Les corps des deux combattants du feu furent allongés, recouvert d’un drap blanc, trois autres victimes furent découvertes. Un couple de personnes âgés surpris dans leur sommeil et un autre tellement calciné que les gardes conclurent qu’il était là où le feu a pris. Pas grand choses à retirer de la carcasse noircie, à part une bague en or surmontée d’une émeraude. L’objet était insolite dans une maison comme celle-ci. Sa valeur aurait suffit à acheter les deux maisons adjacentes et à les rénover pour en faire une maison digne d’un petit bourgeois de la cité. La garde en conclut rapidement au corps au résultat d’un vol.
Au petit matin, la neige avait recouvert la suie et les pavés. L’eau au bord des canaux gelait lentement et quelques stalactites de givre s’étaient formées sous les ponts. Dans le froid, les trois gardes de la première patrouille du jour se soufflaient dans les mains, tentant de grappiller un peu de chaleur. Pour l’instant, seuls leurs pas marquaient la couche blanche. La ville avait le calme et la sérénité d’un après tempête. Les gardes se chamaillaient entre eux à propos d’une demoiselle au giron confortable, pariant sur le premier qui arriverait à s’attirer ses faveurs. Tous s’accordaient à dire que cela serait leur capitaine, un homme de la quarantaine qui les accompagnait en silence. Le capitaine souriait doucement à leurs enfantillages, la nuit avait été dure et les voir aussi vifs dès le matin lui mettait du baume au cœur, même si pour le sérieux, il se devait de les rappeler à l’ordre de temps en temps.
Le Capitaine Lann Smith fermait la marche d’un pas lent, son regard bleu posé sur les décombres de l’incendie de la veille. Quel gâchi. Tant de mort pour une chandelle oubliée par un petit voleur. Soudain, un petit bruit attira son attention. Il fit signe à ses collègues de se taire tentant de localiser et identifier le bruit. Les pleurs d'un bébé voguant sur le canal.
Le brasier infernal grandissait, se prélassait dans son berceau de bois, de pierre et d’étoffes. Les flammes découpaient la nuit, étirant leurs mains vermeilles vers les étoiles pour en cacher l’éclat. De sa langue avide, l’incendie dardait le perron de la maison voisine, y laissant quelques feux épars comme preuve de son passage. La fumée grise masquait peu à peu le ciel de nuit. Acre, elle prenait à la gorge et faisait monter des larmes aux yeux des plus résistants.
Sur le toit ravagé par l’appétit vorace des flammes adolescentes, une silhouette se profila. Dans le chaos des incessants va-et-vient des citoyens tentant de maitriser le feu, personne n’y prêta attention. Elle jetait dans le canal un colis de couvertures blanches. Lentement, le colis virevoltait comme la neige qui commençait à tomber sur la ville. Le vacarme de cris couvrit les pleurs et le hurlement sinistre de la silhouette qui s’embrasait. Quelques pas et dans un regain de vivacité l’appétit du monstre de flamme engouffra les restes de son berceau. La de¬meure s’effondra sur elle-même, tuant au passage deux citoyens le combattant.
Loin de cette agitation, le colis de couvertures blanches voguait sur les flots des canaux. L’eau sombre et rance le ballotait à gauche à droite, doucement, comme une berceuse apaisante. Parmi les draps, une petite main jaillit, gazouillant après les flammes, saisissant les flocons de neige.
Le feu fut peu à peu maitrisé. Le pire fut évité. Après plusieurs heures de lutte acharnée, il rendit son dernier soupir face à ses assaillants.
La population éreintée regagna son logis et les quelques malheureux ayant perdu leur toit furent gracieusement logés à l’auberge du quartier. La nuit devint paisible, la neige tombant lentement en lourd manteau sur les épaules de Hurlevent, recouvrant lentement la maison cal¬cinée achevant les éventuels derniers foyers de feu couvant sous les décombres. Seuls quelques gardes fouillaient encore les débris à la recherche de survivants. Ils n’avaient que peu d’espoir, mais c’était leur devoir. Les corps des deux combattants du feu furent allongés, recouvert d’un drap blanc, trois autres victimes furent découvertes. Un couple de personnes âgés surpris dans leur sommeil et un autre tellement calciné que les gardes conclurent qu’il était là où le feu a pris. Pas grand choses à retirer de la carcasse noircie, à part une bague en or surmontée d’une émeraude. L’objet était insolite dans une maison comme celle-ci. Sa valeur aurait suffit à acheter les deux maisons adjacentes et à les rénover pour en faire une maison digne d’un petit bourgeois de la cité. La garde en conclut rapidement au corps au résultat d’un vol.
Au petit matin, la neige avait recouvert la suie et les pavés. L’eau au bord des canaux gelait lentement et quelques stalactites de givre s’étaient formées sous les ponts. Dans le froid, les trois gardes de la première patrouille du jour se soufflaient dans les mains, tentant de grappiller un peu de chaleur. Pour l’instant, seuls leurs pas marquaient la couche blanche. La ville avait le calme et la sérénité d’un après tempête. Les gardes se chamaillaient entre eux à propos d’une demoiselle au giron confortable, pariant sur le premier qui arriverait à s’attirer ses faveurs. Tous s’accordaient à dire que cela serait leur capitaine, un homme de la quarantaine qui les accompagnait en silence. Le capitaine souriait doucement à leurs enfantillages, la nuit avait été dure et les voir aussi vifs dès le matin lui mettait du baume au cœur, même si pour le sérieux, il se devait de les rappeler à l’ordre de temps en temps.
Le Capitaine Lann Smith fermait la marche d’un pas lent, son regard bleu posé sur les décombres de l’incendie de la veille. Quel gâchi. Tant de mort pour une chandelle oubliée par un petit voleur. Soudain, un petit bruit attira son attention. Il fit signe à ses collègues de se taire tentant de localiser et identifier le bruit. Les pleurs d'un bébé voguant sur le canal.
Lanniey
Re: L'enfant du canal
Rapport de patrouille du Guet de Hurlevent - 21 décembre XX
Lors de notre patrouille de la 7ème heure, nous avons pu être témoin d’un événement peu banal.
Sur les flots des canaux, un nouveau-né flottant au gré du courant emmailloté avec soin et profitant d’un sortilège de lévitation. Lorsque nous l’avons repêché, il souriait en parfaite santé. Cependant, nous avons pu constater que la couverture le protégeant était couverte d’une fine couche de suie.
Nous avons alors fait le rapprochement avec l’incendie survenue dans la nuit du 20 au 21 cou¬rant au 7 rue du Canal de la Vieille Ville. Vous référez aux dossiers concernant l’affaire pour plus de détails. Malgré un nouvel interrogatoire, les voisins n’ont souvenance d’aucune femme enceinte ou avec enfant en bas-âge résident dans la demeure.
L’enfant a été confié à l’orphelinat. Afin de procéder à l’inscription dans le registre, le petit a été nommé Lanniey Ducanal.
Capitaine Lann Smith
Lanniey
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