Adieux

(à lire en écoutant ça : http://www.youtuberepeat.com/watch/?v=hpl_KMVw_pM&feature=related)

Harthan Blake venait rarement dans les bas quartiers de la ville. Il rencontrait toujours son employeur dans les jardins du cimetière où, en tant qu'ex-chevalier de la mort, il se sentait étrangement plus à sa place... M'enfin. Maintenant il ne rencontrerait plus jamais son employeur. Plus celui-là du moins...

L'avocat regarde à droite, à gauche, sort un stylet de ses horribles vêtements bariolés et accroche la lettre remise quelques mois plutôt par Le Juste...

"Si je dois mourir, je veux que tu ailles chez maman et que tu accroche cette lettre, lui avait-il dit. Je veux que tous les moqueurs puissent lire mes adieux et y répondre comme bon leur semblera. Je veux que ces... mes... chers enfants des rues puissent me dire au revoir à leur convenance, et sachent que je continue à penser à eux et à les soutenir, où que je sois."

Le chargé d'affaire des moqueurs n'avait pas osé lire la lettre dans un premier temps, puis l'avait finalement fait. Hors contexte il l'avait trouvé trop sentimentale. Ridicule en somme. Aller crapahuter dans cette ruine pour accrocher ces niaiseries à un mur au risque d'y voir accrocher ses tripes aussi... quelle blague...

Et pourtant il était là, risquant sa vie au milieux des gravats mal fréquentés pour satisfaire la dernière volonté d'un mourant. Bah. Après tout... remise dans son contexte, cette lettre n'était peut être pas si stupide...

"Mes chers amis,
Si vous lisez cette lettre, c'est que j'ai été un imbécile, et que je mérite ce qu'il m'arrive.
Si vous lisez cette lettre, c'est que j'ai fait une erreur de trop, mon oeil-de-lynx m'aura trompé... ma pauvre vieille maman heureusement ne le saura jamais, et c'est tant mieux, je n'aurais pas aimé lui donner tort juste avant de mourir.

Je ne tiens pas à ce que d'autre meurent en même temps que moi, ce serait un sacrifice bien inutile.
Sauvez vos fichues peaux pleines de puces : elles vous seront encore utiles, si vous croyez toujours en notre cause après ma disparition.

Et j'espère que vous y croirez.
J'espère que vous n'avez pas suivit un homme, l'homme stupide que j'ai été, mais bien un crédo. Le crédo noble et juste des moqueurs que je m'efforçais de vous rappeler il n'y a pas si longtemps.

N'oubliez jamais d'être libres.
N'oubliez jamais d'être justes.
N'oubliez jamais que vous êtes une famille.

N'oubliez jamais que vous êtes et serez toujours des moqueurs.

Toutes mes amitiés,
Votre bien mauvais père de famille,
Le Juste."

L'homme relit une dernière fois la lettre, hoche la tête, prononce un adieu silencieux à son patron et s'en va comme il est venu. Il reste tant à faire... tant à faire avant et après la pendaison du Juste... le temps passe si vite quand on a tant à faire...