Déraison.
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Déraison.
Il s’écroula au sol. Son estramaçon s’arracha à sa main durant la chute pour glisser sur le sol à hauteur de quelques mètres. Il libéra un râle de frustration, étalé contre le pavé, puis se redressa légèrement, s’appuyant sur ses coudes meurtris pour observer le dénommé vainqueur, un sourire dont coulait un fin filet de sang aux lèvres. On vint lui tendre une main amicale, presque fraternelle, il ne se fit prier et accepta l’aide si aimablement proposée. Il se releva dans un soubresaut et les deux s’observèrent dans le fond des yeux une dizaine de secondes, faisant fi du temps. Le gagnant tapota son épaule simplement vêtue d’une côte de maille en empruntant un ton paternel.
« Tu t’es bien débrouillé, mais veille à ne pas ouvrir ta défense inconsidérément. On se revoit demain à l’aube.
- Entendu. »
L’un était âgé, portant une barbe centenaire. Les traits durs et pourtant avenants, son armure laissait paraître sa dévotion auprès de la Très Sainte. La figure typique du vétéran qui n’a plus rien à apprendre mais tout à transmettre. Chose qu’il faisait avec plaisir auprès de ce cher Vadrelan, au minois fugace voire teigneux. Ce dernier récupéra sa magnifique arme puis repartit en direction de la Flèche, située à cinq minutes de marche du terrain d’entraînement. Il bouillait intérieurement, mais le respect venait altérer cette hargne caractéristique. Jeune, nul n’était pourtant capable de le battre, si bien qu’il songea fut une époque à se proposer comme Champion de la Matriarche. Et pourtant, l’adversaire qu’il affrontait ces derniers jours l’envoyait inlassablement au tapis pour goûter les saveurs de la pierre. Légèrement frustrant et pourtant si exaltant, se mesurer à un tel héros était pour lui un excellent moyen de s’améliorer. Un jour, peut-être sera-t-il comme lui. Un jour peut-être, car il n’avait rien du Paladin. Vie dévouée à la danse des armes, il dépassait presque quiconque dans le domaine ; mais n’était pas des plus performants dans les autres.
Continuant sa marche, il arriva dans le hall principal. Il leva le regard vers l’orbe scintillante présente au sommet des escaliers, puis s’y dirigea lentement, reprenant encore son souffle. Toujours pensif, il s’imaginait un jour le battre. Lightbanner vaincu, ça avait le mérite de l’exciter en attendant ce jour promis, sans nul doute la plus belle revanche de son existence qui se concrétiserait. Puis il vint poser sa main sur l’orbe trônant fièrement au cœur de la gigantesque pièce. Il fut forcé d’abandonner ses rêveries pour revenir à des images plus terre-à-terre. Il ferma les yeux et vit en son esprit les quartiers de Nathel, auxquels sa visite était courante pour méditer avec son amie durant une courte demi-heure afin de purger l’esprit des maux aussi divers soient-ils. L’orbe se mit à luir puis il sentit une agréable sensation, pour rouvrir les yeux puis ôter sa main de l’artefact. Il se retourna et constata le couloir garni de ses six chambres latérales puis de la dernière pièce au bout de celui-ci. Les lieux lui semblèrent bien sombres. Certes la nuit était tombée depuis quelques temps maintenant, mais cela ne lui empêcha de jauger l’ensemble bien lugubre. Avançant lentement jusqu’à la première porte ouverte, il observa la fenêtre au loin. Le ciel était noir, il en retint que les lunes devaient être masquées par les nuages. Il haussa les épaules puis poursuivit son chemin.
La dernière porte qui se trouvait à une quinzaine de mètres de lui était entre-ouverte, et une infime lueur s’initiait dans la fine ouverture. Puis il entendit un hurlement courroucé, provenant de la pièce concernée. Il haussa un sourcil puis posa une main contre le mur, interloqué. S’en suivit un éclair aveuglant qui se devinait une fois encore grâce à l’ouverture. Malgré la maigre réflexion contre les murs et plafond du corridor, il fut forcé de plisser les yeux. Un nouveau cri de frustration se fit ouïr, alors hâta-t-il le pas, écarquillant les yeux ; pour se retrouver face à la porte qu’il poussa simplement, s’initiant dans la grande salle habituellement réservée aux fidèles de la Lumière afin de se recueillir entre eux et partager leurs idées. Il vit premièrement Unethien, à gauche. Elle se tenait légèrement recroquevillée, jambes courbées, de profil par rapport à lui. Il la jaugea un très bref instant, et constata qu’elle n’avait rien d’amical. Larmes abondantes dont la plupart s’écoulaient sur ses joues, son visage ne laissait paraître rien qui vaille. Haineuse et rancunière, elle semblait foudroyer quelqu’un du regard. Ses cheveux quant à eux flottaient légèrement dans les airs, preuve d’un arcane abondant si ce n’est instable. Après une brève réflexion, il constata que plusieurs objets présents dans la pièce étaient eux aussi suspendus dans les airs, passablement immobiles. Dans ses mains se tenaient deux vives lueurs bleutées, dont émanaient de temps à autres quelques éclairs blanchâtres. Une magie maîtrisée à la perfection, indubitablement ; mais qui semblait cette fois-ci avoir pris le dessus sur la raison. Ne comprenant sur l’instant ce qu’il se passait, perplexe, il poussa davantage la porte pour pouvoir constater la partie droite de la pièce.
Il tomba sur Nathel. Celle-ci se tenait droite, bras le long du corps ; presque de marbre. Elle l’aperçut et tourna lentement la tête vers lui, le regardant. Elle avait beau se montrer impassible, Vadrelan la connaissait depuis trop longtemps pour se faire berner par ce minois terne. D’imperceptibles traits rarement présents sur son visage lui montrèrent qu’elle était en proie à des sentiments qu’elle s’évertuait habituellement à chasser d’autrui au profit de joie et de sérénité. Elle semblait presque désemparée, anéantie. Il écarquilla à nouveau les yeux en devinant ces sentiments si exceptionnels venant d’elle, avant que la mage de guerre ne dresse ses bras en avant pour relâcher sa colère. Les deux orbes filèrent droit sur la Prêtresse qui dressa un bouclier divin, l’arcane dévorant se dispersant lors de l’impact assourdissant sur ses bords, à la façon de poussières. Unethien hurla à nouveau, mélange d’une frustration sans limite et d’une colère toujours croissante, la hargne parsemée de larmes toujours nombreuses.
« Arrête, s’il te plaît.
- Je te déteste !
- Je sais. Mais je t’en prie, cesse cette folie.
- Tu es un monstre ! »
Elle manifesta deux javelots violacés entre ses mains avant que ces derniers ne quittent ses paumes pour foncer droit sur Nathel, qui une fois de plus se défendit avec brio, le bouclier scintillant arrêtant net les projectiles dans leur course pour qu’ils se dissipent au contact. Folle de rage, la mage fit imploser tous les objets suspendus dans les airs, comprenant quelques vases, deux-trois verres, des tiroirs, et ainsi de suite. Vadrelan grimaça lors de ces fracas stridents, tandis qu’Unethien continuait de hurler, se détestant de ne pouvoir toucher la Prêtresse.
« Pourquoi moi ! Pourquoi ?! Il n’était pas assez bien à tes yeux, c’est ça ?!
- Je suis désolée.
- Non tu ne l’es pas ! Qu’Il t’emporte ! »
Elle déversa cette fois-ci un rayon d’arcane mauve. À nouveau, le bouclier fit rempart entre l’incantatrice et sa cible, les flux incontrôlables se dispersant autour. Nathel fronçait les sourcils, n’étant tout de même pas en posture favorable. Elle continuait de psalmodier à voix basse pour tenter de lui chuchoter à l’esprit de quoi la calmer. Mais rien n’y faisait, elle était imperméable et bien trop enragée pour se laisser approcher.
« Calme toi, apaise ton esprit.
- C’est toi qui me fait souffrir ! Toi et toi seule ! Je te hais, je vous hais tous !
- Unethien... »
Celle-ci coupa court à l’échange, chargeant à nouveau ses mains d’arcane. Des dizaines de petits cristaux ondulant autour de ses doigts écartés. Nathel soupira silencieusement, posant son regard vers Vadrelan avec impuissance pour en revenir à Unethien, celle-ci chargée comme jamais de sa précieuse magie. Cette dernière fut une fois encore libérée, les cristaux quittant les mains de leur hôte pour croître à la taille de plumes, fonçant droit sur leur proie. Nathel ferma les yeux un instant, puis révoqua son bouclier et toutes ses défenses. Le fantassin en eut le souffle coupé, voyant les cristaux frapper de plein fouet le corps de sa protégée. Nulle partie de celui-ci ne fut épargnée, la plupart des projectiles entaillant ses vêtements et sa chair tandis que d’autres se logèrent presque intégralement aussi bien dans son buste, que ses bras ou ses jambes. La Prêtresse gémit une demi seconde, avant de sombrer dans l’inconscience suite à la douleur, et s’écroula au sol un mètre plus en arrière, inerte ; son halo divin s’évanouissant au même instant.
La mage sourit premièrement comme une démente, étant parvenue à dérouter celle qu’elle s’essayait à malmener. Puis elle observa le corps immobile en songeant à ce qu’elle venait de faire. Dépitée, elle tomba sur les genoux, tête vers le sol, murmurant quelques mots inaudibles. Les quelques débris flottant retombèrent aussitôt au sol. Vadrelan de son côté se rua sur la Prêtresse et posa la nuque de celle-ci sur sa cuissarde après s’être agenouillé, inquiet. Le pouls était présent mais faible, tandis qu’elle ne répondait pas. Il la souleva lentement pour la porter entre ses bras, se retournant vers l’arcaniste.
« Tu es fière de toi ? Tu te dresses face à celle qui t’a épargné un misérable avenir ?
- Je... je suis navrée.
- C’est un peu tard pour l’être, maintenant. »
Il prit un pas relativement rapide vers la porte, la franchissant pour tourner derechef à gauche, se retrouvant dans la chambre de la blessée pour l’y allonger. Il la déposa lentement sur le lit puis l’observa un très court moment, inquiet mais aussi navré de n’être qu’un piètre médecin. Il prit sa main dans la sienne pour fournir une étreinte réconfortante, espérant que celle-ci, même évanouie, puisse la ressentir. Il acquiesça pour lui-même avant de repartir dans le couloir, se dirigeant vers l’orbe. Se retrouvant l’étage au dessus, il se précipita dans le bureau où se trouvaient naturellement Lightbanner et Faeronor, tous deux occupés à alléger le harassant travail de la Matriarche en traitant diverses paperasses. Il s’exclama aussitôt, leur demandant de l’aide sans prendre le temps d’expliquer le pourquoi du comment. Tous trois se hâtèrent vers l’orbe pour l’utiliser, retrouvant le couloir pour vite le franchir, et constater le lamentable état de Nathel d’une part et Unethien penchée sur celle-ci d’autre part, lui susurrant mille mots doux à l’oreille, larmoyante. Aussitôt Lightbanner s’approcha du corps meurtri en faisant signe à Arcanebreath de se reculer, inquisiteur. Vadrelan se mit de l’autre côté, et le Paladin releva les yeux sur lui.
« Que s’est-il passé ?
- Ce n’est pas le plus important, soignez-la. »
Il opina tout en grognant pour se pencher vers elle, déchirant légèrement à plusieurs endroits la robe de l’elfe blessée pour faciliter l’extraction des cristaux logés dans la chair. Ôtant ses gantelets, il s’attaqua à la délicate tâche en se voulant précautionneux mais rapide. À peine l’un d’entre-eux était arraché qu’il posait sa main sur la plaie béante, de douces effluves de Lumière naissant de sa main pour s’infiltrer dans les blessures et les cicatriser, la chair se revigorant pour se lier à son homologue. Au bout de quinze minutes, elle était finalement soignée mais toujours inconsciente. Il se releva, auparavant penché vers elle, pour tourner la tête vers les trois.
« Elle a besoin de repos et vous aussi. Magistrat Siana, soyez aimable de lui tenir compagnie. J’ai cru comprendre qu’elle vous appréciait, votre présence lors de son réveil la réconfortera. De mon côté, je ferai en sorte de rattraper votre travail pendant ce temps. »
Il salua respectueusement le trio, tous quittant lentement la pièce à l’exception de Faeronor, la porte se refermant doucement derrière lui, laissant en guise de soutien moral la bougie, comme à l'accoutumée présente à la fenêtre, luisant doucement.
« Tu t’es bien débrouillé, mais veille à ne pas ouvrir ta défense inconsidérément. On se revoit demain à l’aube.
- Entendu. »
L’un était âgé, portant une barbe centenaire. Les traits durs et pourtant avenants, son armure laissait paraître sa dévotion auprès de la Très Sainte. La figure typique du vétéran qui n’a plus rien à apprendre mais tout à transmettre. Chose qu’il faisait avec plaisir auprès de ce cher Vadrelan, au minois fugace voire teigneux. Ce dernier récupéra sa magnifique arme puis repartit en direction de la Flèche, située à cinq minutes de marche du terrain d’entraînement. Il bouillait intérieurement, mais le respect venait altérer cette hargne caractéristique. Jeune, nul n’était pourtant capable de le battre, si bien qu’il songea fut une époque à se proposer comme Champion de la Matriarche. Et pourtant, l’adversaire qu’il affrontait ces derniers jours l’envoyait inlassablement au tapis pour goûter les saveurs de la pierre. Légèrement frustrant et pourtant si exaltant, se mesurer à un tel héros était pour lui un excellent moyen de s’améliorer. Un jour, peut-être sera-t-il comme lui. Un jour peut-être, car il n’avait rien du Paladin. Vie dévouée à la danse des armes, il dépassait presque quiconque dans le domaine ; mais n’était pas des plus performants dans les autres.
Continuant sa marche, il arriva dans le hall principal. Il leva le regard vers l’orbe scintillante présente au sommet des escaliers, puis s’y dirigea lentement, reprenant encore son souffle. Toujours pensif, il s’imaginait un jour le battre. Lightbanner vaincu, ça avait le mérite de l’exciter en attendant ce jour promis, sans nul doute la plus belle revanche de son existence qui se concrétiserait. Puis il vint poser sa main sur l’orbe trônant fièrement au cœur de la gigantesque pièce. Il fut forcé d’abandonner ses rêveries pour revenir à des images plus terre-à-terre. Il ferma les yeux et vit en son esprit les quartiers de Nathel, auxquels sa visite était courante pour méditer avec son amie durant une courte demi-heure afin de purger l’esprit des maux aussi divers soient-ils. L’orbe se mit à luir puis il sentit une agréable sensation, pour rouvrir les yeux puis ôter sa main de l’artefact. Il se retourna et constata le couloir garni de ses six chambres latérales puis de la dernière pièce au bout de celui-ci. Les lieux lui semblèrent bien sombres. Certes la nuit était tombée depuis quelques temps maintenant, mais cela ne lui empêcha de jauger l’ensemble bien lugubre. Avançant lentement jusqu’à la première porte ouverte, il observa la fenêtre au loin. Le ciel était noir, il en retint que les lunes devaient être masquées par les nuages. Il haussa les épaules puis poursuivit son chemin.
La dernière porte qui se trouvait à une quinzaine de mètres de lui était entre-ouverte, et une infime lueur s’initiait dans la fine ouverture. Puis il entendit un hurlement courroucé, provenant de la pièce concernée. Il haussa un sourcil puis posa une main contre le mur, interloqué. S’en suivit un éclair aveuglant qui se devinait une fois encore grâce à l’ouverture. Malgré la maigre réflexion contre les murs et plafond du corridor, il fut forcé de plisser les yeux. Un nouveau cri de frustration se fit ouïr, alors hâta-t-il le pas, écarquillant les yeux ; pour se retrouver face à la porte qu’il poussa simplement, s’initiant dans la grande salle habituellement réservée aux fidèles de la Lumière afin de se recueillir entre eux et partager leurs idées. Il vit premièrement Unethien, à gauche. Elle se tenait légèrement recroquevillée, jambes courbées, de profil par rapport à lui. Il la jaugea un très bref instant, et constata qu’elle n’avait rien d’amical. Larmes abondantes dont la plupart s’écoulaient sur ses joues, son visage ne laissait paraître rien qui vaille. Haineuse et rancunière, elle semblait foudroyer quelqu’un du regard. Ses cheveux quant à eux flottaient légèrement dans les airs, preuve d’un arcane abondant si ce n’est instable. Après une brève réflexion, il constata que plusieurs objets présents dans la pièce étaient eux aussi suspendus dans les airs, passablement immobiles. Dans ses mains se tenaient deux vives lueurs bleutées, dont émanaient de temps à autres quelques éclairs blanchâtres. Une magie maîtrisée à la perfection, indubitablement ; mais qui semblait cette fois-ci avoir pris le dessus sur la raison. Ne comprenant sur l’instant ce qu’il se passait, perplexe, il poussa davantage la porte pour pouvoir constater la partie droite de la pièce.
Il tomba sur Nathel. Celle-ci se tenait droite, bras le long du corps ; presque de marbre. Elle l’aperçut et tourna lentement la tête vers lui, le regardant. Elle avait beau se montrer impassible, Vadrelan la connaissait depuis trop longtemps pour se faire berner par ce minois terne. D’imperceptibles traits rarement présents sur son visage lui montrèrent qu’elle était en proie à des sentiments qu’elle s’évertuait habituellement à chasser d’autrui au profit de joie et de sérénité. Elle semblait presque désemparée, anéantie. Il écarquilla à nouveau les yeux en devinant ces sentiments si exceptionnels venant d’elle, avant que la mage de guerre ne dresse ses bras en avant pour relâcher sa colère. Les deux orbes filèrent droit sur la Prêtresse qui dressa un bouclier divin, l’arcane dévorant se dispersant lors de l’impact assourdissant sur ses bords, à la façon de poussières. Unethien hurla à nouveau, mélange d’une frustration sans limite et d’une colère toujours croissante, la hargne parsemée de larmes toujours nombreuses.
« Arrête, s’il te plaît.
- Je te déteste !
- Je sais. Mais je t’en prie, cesse cette folie.
- Tu es un monstre ! »
Elle manifesta deux javelots violacés entre ses mains avant que ces derniers ne quittent ses paumes pour foncer droit sur Nathel, qui une fois de plus se défendit avec brio, le bouclier scintillant arrêtant net les projectiles dans leur course pour qu’ils se dissipent au contact. Folle de rage, la mage fit imploser tous les objets suspendus dans les airs, comprenant quelques vases, deux-trois verres, des tiroirs, et ainsi de suite. Vadrelan grimaça lors de ces fracas stridents, tandis qu’Unethien continuait de hurler, se détestant de ne pouvoir toucher la Prêtresse.
« Pourquoi moi ! Pourquoi ?! Il n’était pas assez bien à tes yeux, c’est ça ?!
- Je suis désolée.
- Non tu ne l’es pas ! Qu’Il t’emporte ! »
Elle déversa cette fois-ci un rayon d’arcane mauve. À nouveau, le bouclier fit rempart entre l’incantatrice et sa cible, les flux incontrôlables se dispersant autour. Nathel fronçait les sourcils, n’étant tout de même pas en posture favorable. Elle continuait de psalmodier à voix basse pour tenter de lui chuchoter à l’esprit de quoi la calmer. Mais rien n’y faisait, elle était imperméable et bien trop enragée pour se laisser approcher.
« Calme toi, apaise ton esprit.
- C’est toi qui me fait souffrir ! Toi et toi seule ! Je te hais, je vous hais tous !
- Unethien... »
Celle-ci coupa court à l’échange, chargeant à nouveau ses mains d’arcane. Des dizaines de petits cristaux ondulant autour de ses doigts écartés. Nathel soupira silencieusement, posant son regard vers Vadrelan avec impuissance pour en revenir à Unethien, celle-ci chargée comme jamais de sa précieuse magie. Cette dernière fut une fois encore libérée, les cristaux quittant les mains de leur hôte pour croître à la taille de plumes, fonçant droit sur leur proie. Nathel ferma les yeux un instant, puis révoqua son bouclier et toutes ses défenses. Le fantassin en eut le souffle coupé, voyant les cristaux frapper de plein fouet le corps de sa protégée. Nulle partie de celui-ci ne fut épargnée, la plupart des projectiles entaillant ses vêtements et sa chair tandis que d’autres se logèrent presque intégralement aussi bien dans son buste, que ses bras ou ses jambes. La Prêtresse gémit une demi seconde, avant de sombrer dans l’inconscience suite à la douleur, et s’écroula au sol un mètre plus en arrière, inerte ; son halo divin s’évanouissant au même instant.
La mage sourit premièrement comme une démente, étant parvenue à dérouter celle qu’elle s’essayait à malmener. Puis elle observa le corps immobile en songeant à ce qu’elle venait de faire. Dépitée, elle tomba sur les genoux, tête vers le sol, murmurant quelques mots inaudibles. Les quelques débris flottant retombèrent aussitôt au sol. Vadrelan de son côté se rua sur la Prêtresse et posa la nuque de celle-ci sur sa cuissarde après s’être agenouillé, inquiet. Le pouls était présent mais faible, tandis qu’elle ne répondait pas. Il la souleva lentement pour la porter entre ses bras, se retournant vers l’arcaniste.
« Tu es fière de toi ? Tu te dresses face à celle qui t’a épargné un misérable avenir ?
- Je... je suis navrée.
- C’est un peu tard pour l’être, maintenant. »
Il prit un pas relativement rapide vers la porte, la franchissant pour tourner derechef à gauche, se retrouvant dans la chambre de la blessée pour l’y allonger. Il la déposa lentement sur le lit puis l’observa un très court moment, inquiet mais aussi navré de n’être qu’un piètre médecin. Il prit sa main dans la sienne pour fournir une étreinte réconfortante, espérant que celle-ci, même évanouie, puisse la ressentir. Il acquiesça pour lui-même avant de repartir dans le couloir, se dirigeant vers l’orbe. Se retrouvant l’étage au dessus, il se précipita dans le bureau où se trouvaient naturellement Lightbanner et Faeronor, tous deux occupés à alléger le harassant travail de la Matriarche en traitant diverses paperasses. Il s’exclama aussitôt, leur demandant de l’aide sans prendre le temps d’expliquer le pourquoi du comment. Tous trois se hâtèrent vers l’orbe pour l’utiliser, retrouvant le couloir pour vite le franchir, et constater le lamentable état de Nathel d’une part et Unethien penchée sur celle-ci d’autre part, lui susurrant mille mots doux à l’oreille, larmoyante. Aussitôt Lightbanner s’approcha du corps meurtri en faisant signe à Arcanebreath de se reculer, inquisiteur. Vadrelan se mit de l’autre côté, et le Paladin releva les yeux sur lui.
« Que s’est-il passé ?
- Ce n’est pas le plus important, soignez-la. »
Il opina tout en grognant pour se pencher vers elle, déchirant légèrement à plusieurs endroits la robe de l’elfe blessée pour faciliter l’extraction des cristaux logés dans la chair. Ôtant ses gantelets, il s’attaqua à la délicate tâche en se voulant précautionneux mais rapide. À peine l’un d’entre-eux était arraché qu’il posait sa main sur la plaie béante, de douces effluves de Lumière naissant de sa main pour s’infiltrer dans les blessures et les cicatriser, la chair se revigorant pour se lier à son homologue. Au bout de quinze minutes, elle était finalement soignée mais toujours inconsciente. Il se releva, auparavant penché vers elle, pour tourner la tête vers les trois.
« Elle a besoin de repos et vous aussi. Magistrat Siana, soyez aimable de lui tenir compagnie. J’ai cru comprendre qu’elle vous appréciait, votre présence lors de son réveil la réconfortera. De mon côté, je ferai en sorte de rattraper votre travail pendant ce temps. »
Il salua respectueusement le trio, tous quittant lentement la pièce à l’exception de Faeronor, la porte se refermant doucement derrière lui, laissant en guise de soutien moral la bougie, comme à l'accoutumée présente à la fenêtre, luisant doucement.
Srem
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