[Inactive][Alliance - Syndicat] Cartel Llorente

Alterac est un massif montagneux se dressant fièrement au centre du continent de Lordaeron. Jusqu'à récemment, la région était encore reconnue officiellement comme un des royaumes humains. La dynastie des Pérénolde dirigeait ce pays depuis des générations, tentant de compenser l'étroitesse de ce territoire fait de pics et de vallées par des alliances avec les puissants royaumes des alentours, Stromgarde, Lordaeron ou Gilnéas.
Malgré la nature étrangère des orcs, Aliden Pérénolde  fit ce qu'il avait toujours fait avant lors de la deuxième grande guerre : il s'allia avec le parti qui lui semblait le plus avantageux pour les intérêts du royaume.
Comme chacun sait, il fut sévèrement puni pour cette trahison envers l'Alliance. Dépossédé de ses terres et de sa capitale, il devint un roi sans royaume. L'ensemble de l'aristocratie du pays, et même des roturiers, paya très cher le ralliement à la Horde noire. Les nobles furent chassés de leurs baronnies et comtés et ces régions montagneuses furent mises sous contrôle de Lordaeron.
Amers et rancuniers, les gens d'Alterac se constituèrent en bandes pour harceler les occupants étrangers et se livrer au brigandage pendant des années.
Quand le Fléau ravagea Lordaeron et que la Légion Ardente posa le pied en Azeroth, ces bandes, vaguement regroupées en un organisme nommé le Syndicat d'Alterac, se rallièrent au fils d'Aliden, le prince héritier Aiden Pérénolde, et à un jeune noble revanchard de la famille Lépervier. Le Syndicat, profitant du chaos général qui s'était étendu jusque dans le vieux royaume d'Arathi, construit sur les ruines du cœur de l'empire d'Arathor, s'empara de Stromgarde et du camp de Fort de Durn.
Au-delà du fruit des rapines et du pillage, le Syndicat gagnait de l'influence. Pérénolde et Lépervier étaient décidés à faire revivre le royaume d'Alterac.
Les années qui suivirent la mort d'Archimonde furent marqués en Arathi et en Hautebrande par l'ingérence des bandes d'Alterac, menées par des nobles déchus.
Aiden Pérénolde finit par se faire assassiner, probablement sur ordre de la Horde, quelques temps avant le Cataclysme, dont les secousses vidèrent fort de Durn de leurs occupants d'Alterac.
De nos jours, ironie du sort, le Syndicat semble avoir survécu à ceux que ses chefs considèrent comme leurs bourreaux. Lordaeron est tombé depuis longtemps, les gilnéens sont contraints à un long exil et le royaume de Stromgarde est privé d'un roi et du contrôle de sa capitale.
Discrets et malins, les hommes du Syndicat sont devenus malgré eux une des dernières organisations humaines d'importance dans le Nord des royaumes de l'Est.
Hernan Llorente est issu d'une antique famille noble d'Alterac et lui aussi veut profiter de l'absence de stabilité dans la région pour faire retrouver à sa baronnie, et à son pays, sa splendeur d'autrefois, et plus encore peut-être.
Il recrute alterans en exil et mercenaires pour renforcer ses forces et, secondé par son vieil oncle, Esteban Llorente, il compte bien survivre à toutes les épreuves à venir qui concerneront Alterac, Lordaeron, et le monde entier.

Il y a environ un mois, sur les côtes de Durotar.

La pleine Lune illuminait la grève et seul le flux et le reflux des vagues troublait le silence nocturne de Kalimdor. Les deux grunts observaient la barque qui s'approchait lentement de la plage. A son bord, on ne distinguait guère plus que trois silhouettes. Les soldats de Hurlenfer attendaient patiemment en s'appuyant sur leurs armes. L'un d'eux se décida à parler.
-"Ca n'a rien d'habituel ce qu'on fait là. Comment on expliquera d'où viennent les armes ? souffla t-il à son comparse.
-Ce sont des armes typiques de notre peuple, je vais tout simplement les apporter à l'intendant en lui parlant d'un don.
-Mais un don de qui ? Ce n'est pas ce Zabrek qui a fait de son propre chef, et si c'était un orc qui donnait ces armes, il n'y aurait pas à faire autant de mystère et nous ne serions pas là à attendre en pleine nuit", répondit l'autre alors qu'un bruit sourd indiqua que la barque venait d'accoster.

C'était une embarcation d'appoint, mais assez grosse pour emporter à son bord quelques hommes et une petite cargaison. Les trois silhouettes sautèrent sur la grève. La lueur de la torche des grunts révéla la nature des visiteurs. Deux orcs et un pandaren. La présence du pandaren, un individu à longues moustaches, dodu et bien vêtu, provoqua un mouvement de répulsion et de méfiance de la part des soldats.
-"Je suis Zabrek ! N'ayez crainte, cette créature est de notre côté, annonça tranquillement un orc vêtu comme un sage.
-Bondoir, je suis Yu Seng, pour vous servir !" salua le pandaren avec un accent horrible dans un geste de révérence hors de propos, une lueur de sournoiserie dans le regard.
L'autre orc, silencieux, était armuré comme un grand guerrier, et son armure était frappée du symbole de la Horde. Il déchargeait sur la grève quelques caisses et un tonneau.

-"Vous pouvez vérifier vous-même. Haches, arcs, et un tonneau de la meilleure poudre noire. Tout est gratuit... lança Zabrek en ouvrant une des caisses d'une main griffue.
-C'est bien, la vraie Horde a toujours besoin d'armes. Mais allez vous nous dire qui fait ce don ? demanda un des grunts.
Yu Seng s'éclaircit la gorge et répondit avant Zabrek, qui tenta de s'interposer.
-Nous sommes les modestes intermédiaires d'un généreux bienfaiteur qui considère que le grand et puiiiddant Garrosh doit régner sur la Horde. Ses idées concordent avec celles de votre bienfaiteur !
-Crétin de pandaren ! C'est moi qui parle ! tonna Zabrek en bousculant Yu Seng. Considérez que pour des raisons compliquées, l'homme que nous représentons ne pourrait se présenter lui-même en Durotar. Mais je le jure sur ma vie, il n'y a pas de piège.
-J'accepte de te croire Zabrek, et nous prendrons ce que ton maître donne. Tu peux décharger les autres caisses. Les armes me paraissent de bonne qualité, dit un des grunts en inspectant une hache.
-Ce sera fait cette nuit dans ce cas. Nous vous amenons également du matériel de soin, des longues-vues et d'autres accessoires de ce genre."

Sans parler davantage, le petit groupe se concentra sur le déchargement des caisses tandis que Zabrek envoyait un signal lumineux dans la baie, provoquant quelques minutes plus tard l'apparition d'une pointe de lumière. Une autre barque approchait du rivage.

A n'importe qui en Lordaeron, de Quel'Thalas à Stromgarde :

Nous, dirigeants de l'Enclave, résistants de Lordaeron et de l'Alliance, sommes la cible d'une attaque extrêmement bien organisée de la part de ce qui semble être une bande expérimentée du Syndicat et d'anciens collaborateurs de notre guilde.
Le commandant Edrick ne donne pas de nouvelles et nous sommes sans renfort immédiat, mais nous voulons le faire savoir : nos anciens chefs sont de retour en Alterac.

*Signature griffonnée au nom de Von Wallenstein*

Il était passé minuit lorsque la naine vit le message en sortant de la taverne. Passablement murgée, elle mit un temps avant de réagir lorsque les mots clefs s'assemblaient dans sa tête tel un jeu de brique rondes. "Lordaeron" "Alliance"... "Alterac"...

- "Hm..." Se dit elle "Je devrais en parler au sénéchal, par ici garçon !"

Et elle s'en retourna, traînant par le bras un gamin imberbe qui semblait assez confus.

De la pluie, ou de la neige fondue, dur à dire, frappait avec violence les élégants, quoique décatis, vitraux des plus hauts appartements du vieux château Llorente.
Bien à l'abri à l'intérieur de la tour, Esteban, en tenue de cérémonie rouge, faisait les cent pas, attendant la venue de son assistant, Melgram Wrough-Havoc, et du sénateur Pôelefer. Entre anxiété et excitation, il souriait en pensant à la tête que ferait le nain bientôt. Il consulta une dernière fois un antique grimoire écrit dans un mélange de kalimag et de troll, posé sur une liseuse en bois noirci, juste à côté de l'épaisse tenture rouge sombre qui fermait l'arcade donnant l'accès à l'autre salle de son cabinet de travail.

Le Clairvoyant fut interrompu dans son ultime révision par l'ouverture de la porte de ses appartements. Un des hommes du baron Llorente, un certain Abraham Ramirez, faisait entrer Pôelefer et Melgram.

-"Heureux de vous revoir, sénateur ! salua Llorente en effectuant une douloureuse courbette. Je tenais à ce que vous soyez présent ce soir.
-Je connais votre magie, Llorente, ça ne m'impressionne plus", se contenta de répondre le nain en réajustant son monocle en verre rouge, probablement hors de prix.

Le vieillard ne releva pas et porta son regard sur Melgram, un des conjurateurs que le Syndicat employait à Stromgarde pour maintenir l'ordre. Il ne manquait pas de talent et s'il l'avait désiré, il aurait probablement pu avoir une carrière honnête au Kirin Tor. Mais les esprits tordus présents dans la pièce avaient depuis longtemps mis au placard ces vieilles idées, ces principes absolus, comme l'honnêteté des sentiments, pour les remplacer par le pragmatisme le plus extrême dans la plupart des circonstances.

-"Ah, Wrough-Havoc, vous me serez très utile dans quelques instants... Il se tourna vers Pôelefer, en espérant que celui-ci ne ré-aborde pas pour la énième fois la mort d'Adella. Tuée par la bombe-mana ou dévorée par les crocilisques d'Âprefange, quelle importance ? Il avait tenté de la prévenir.

-Je suis à vos ordres, sire, se contenta de répondre le conjurateur en effaçant les plis de sa robe noire.
-Je vous annonce à tous, et dans la plus grande solennité, que j'ai pris une grande décision ce soir. Je suis vieux, fatigué, et je vais faire ce que tout homme âgé de 90 ans devrait faire"... Pôelefer fronça les sourcils, probablement car il redoutait un départ à la retraite particulièrement mal placé. Llorente toussota légèrement, puis reprit.

-"C'est à dire... Il tira la tenture qui masquait l'autre partie de son cabinet. Sacrifier une jeune trolle vierge, boire son sang et dévorer son coeur !"

Moment de stupeur. Le Clairvoyant avait annoncé cela sur un ton qu'il avait probablement travaillé, cherchant à marquer la petite assemblée et surtout le sénateur. Il pénétra dans l'autre pièce circulaire de ses appartements, qui faisait probablement office de bibliothèque et de cabinet de travail et de curiosité. De vieux volumes rares remplissaient les rayons, et les tables de bois et de marbre étaient recouvertes de cierges et d'objets étranges. Au centre de la pièce, bien en évidence, se trouvait une vasque décorée de pâte de verre orange et dans laquelle se trouvait, bâillonnée, attachée, et nue, une jeune trolle, sans doute capturée en Arathie.
Llorente donna un ordre au conjurateur et celui-ci alluma chaque cierge et chaque candélabre, dont les flammes prirent bientôt une lueur tantôt bleue, tantôt violette. Inexplicablement, la lumière semblait diminuer, peu à peu.
Le vieillard déposa avec respect son impressionnant bâton sur une sorte d'autel plaqué contre le mur de la salle, et prit en main une dague d'aspect fort lugubre.

-"Wrough-Havoc, enlevez ses liens et son bâillon.
-Selon vos désirs, Clairvoyant. Il s'exécuta, et la jeune trolle, bien que la bouche libre, ne trouva pas le courage d'exprimer le moindre son.
-Quelle belle jeune fille que voilà... Esteban passa lentement une main gantée dans les longs cheveux bleus de la trolle, puis sur ses joues et ses épaules. Belle jeune fille, et pure. Ce sera très bien".

La malheureuse captive ne comprenait qu'une chose : qu'elle n'en avait probablement plus pour longtemps. Les larmes aux yeux mais tétanisée par ce petit vieillard et son sourire, elle repensa à ce que les sages Fanécorces de son village lui répétaient depuis son enfance : "Les humains méritent notre défiance car ils sont aussi dangereux que tous nos autres ennemis". Elle ne savait pas si les sorciers-docteurs pensaient à ce genre de situation quand ils parlaient de danger, mais elle saisissait à présent la signification crue de l'avertissement. Elle avait déjà assistée à des rituels, mais le fait que ce soit deux humains qui dirigent la cérémonie la rendait encore plus effrayée. Soudain, elle sentit comme une froide douleur à l'intérieur de ses cuisses puis à ses poignets. Le vieillard, d'un geste expert, un rictus mauvais sur le visage, lui avait ouvert les artères à des points précis. Alors qu'elle se vidait de son sang, elle se demandait comment aurait réagi le nain, déjà assez dégoûté visiblement, s'il avait vu l'horrible sourire de son ami alors qu'il recevait une giclée de sang en travers du visage.

-"Shhh... Le Clairvoyant lui caressa la tête alors qu'elle se laissait partir, vaincue par des hommes dont elle ne savait rien. C'est fini, ne lutte plus... C'est fini, tu n'as plus mal..."

Le conjurateur Wrough-Havoc tenait fermement la trolle, qui se vidait de son sang abondamment. Ramirez, qui surveillait la porte, n'osait pas se retourner.
La vasque se remplissait et Llorente, pataugeant dans le sang, commença son incantation en prononçant d'étranges formules, à la croisée de dialectes trolls, de kalimag et d'une langue plus obscure encore. Alors que le tonnerre frappait les environs, il arracha le cœur de la victime d'un habile coup de dague, et le brandit en le tenant de la main gauche. Continuant ses incantations, agenouillé et en regardant le sang dans la vasque, il pressa l'organe dans sa main. Il semblait encore battre mais à chaque mots, il se flétrissait, tandis qu'une sombre énergie pénétrait en Llorente. La lumière de la salle diminuait jusqu'à ce qu'on ne puisse plus que discerner la lueur surnaturelle des cierges et du cœur. Il laissa tomber sa dague, qui coula au fond de la vasque, se perdant entre les jambes de la trolle, qui, bien que morte, était toujours dans les bras de Melgram.
Bientôt, les incantations cessèrent, et le cœur n'était guère plus qu'un morceau de viande flétri et séché, que Llorente lâcha, plus intéressé par le sang qui remplissait la vasque. Fébrile, il mit ses mains en coupe et les remplit de sang, le portant à sa bouche. Peu à peu, la lumière revint à la normale, quoique toujours tamisée.

-"Wrough-Havoc ! Remplissez autant de bouteilles que vous pouvez avec ce sang béni ! Je... Je me sens rajeunir, je me sens en forme ! lança t-il à ses compagnons en se levant, trempé de sang.
-Bien sûr, Clairvoyant, répondit servilement le conjurateur, lâchant le cadavre et allant chercher sur une étagère des flacons libres.
-Ramirez. Emportez le corps de la trolle et immolez-le. Je dis bien immolez-le. Ne le jetez pas dans la forge. Faîtes un bûcher puis dispersez ses cendres depuis le haut du château".

Ramirez, tremblant et livide, exécuta l'ordre du Clairvoyant et emporta l'innocente sacrifiée hors des appartements. Llorente sortit de la vasque, le visage couvert de sang et les bottillons imbibés. Chacun de ses pas laissait une trace rouge derrière lui.

-"Lavez-vous au moins le visage, Llorente, lança Pôelefer, un peu choqué mais pas si déstabilisé. Il soupira. Je suppose que c'est le prix à payer pour votre santé. On ne peut pas se permettre de vous découvrir mort dans votre lit. Pas un homme qui défend une telle cause.
-En effet sénateur, et j'assume l'entière responsabilité de mes actes... Il lécha ses doigts ensanglantés avec une gloutonnerie qui l'étonna lui-même. Je connaissais ce rituel depuis bien longtemps, mais cette nuit, c'est moi qui y a eu recours. J'ai raffiné le sang d'une trolle pure, maximisant ses effets curatifs. Il y aura d'autres trolles, et d'autres flacons rouges.
-C'est... Dégoûtant.
-Vous me preniez pour un bouffon, je voulais vous montrer que je vais au bout des choses. Je suis capable de faire ce qu'il faut pour atteindre nos objectifs.
-Je le sais bien. C'est pour ça que c'est l'Enclave que j'ai financé à l'époque et pas d'autres. Je sais de quoi vous êtes capable".

Wrough-Havoc puisait autant que possible dans la vasque et remplissait quantité de flacons de l’Élixir de sang.
Quelques minutes plus tard, Ramirez revint, toujours aussi pâlot. Llorente s'approcha de lui et posa deux doigts sur son front, sondant son esprit.

-"Vous devriez l'éliminer, il ne faudrait pas que ça s'ébruite, proposa le sénateur en utilisant le langage sombrefer.
-Il est sûr. Il ne racontera rien... N'est-ce pas, Ramirez ? Vous avez une famille... Il serait dommage que des gens s'en prennent à vos proches car vous avez été mon complice, hm ?"

Le brigand se contenta de hocher la tête, épuisé et effrayé. Il prit congé sans tarder.
Quelques minutes plus tard, une dizaine de flacons rouges étaient remplis et prêt à la consommation, posés sur une des tables du cabinet de travail. On se sépara et le Clairvoyant attrapa un des élixirs et le fourra dans la poche intérieure de sa robe.

Dehors, la pluie continuait à tomber.

Si le baron doit composer avec son pire ennemi sur ordre des grands chefs du Syndicat, le Clairvoyant continue d'impliquer les hommes de son neveu dans des recherches magiques, notamment en ayant repris à son compte la quête de Vul'Nok, dont il a récupéré les dossiers auprès de la Bombe, lors de sa capture par ses sbires.

Nul Draenor pour le cartel. Le baron Llorente mène toujours ses affaires entre Arathi et Alterac, tandis que son vieil oncle voyage de par le monde avec ses hommes. Rejoignez-les, que ce soit pour l'or, l'adrénaline ou des motivations plus sombres encore.