Revanche.
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Revanche.
Quel’thalas, Ghostlands ; dans les alentours de vingt-deux heures, un certain quinzième jour de Septembre.
Le groupuscule était en marche. En tête, deux sentinelles arcaniques fracassaient le chemin de leurs lourds pas, pierre heurtant pierre. Suivis bien vite de quatre mages de guerre vêtant d’anciennes tenues d’agents du Kirin Tor, remaniées telles que le Capitaine Arcanebreath en avait décidé. Au diable les Sunreavers, au diable Dalaran, leurs intérêts personnels étaient à présents dynamisés par un pragmatisme sans faille. Unethien justement, se tenait derrière eux, avançant à la même allure. Dans son dos se profilait Faeronor d’une part, admirable ; et la Matriarche de l’autre, radieuse. À leur droite se trouvait un elfe vêtant une armure des plus robustes, des plus imposantes, elle aussi assortie aux couleurs du Soleil-volé. L’on devinait là l’unique champion de la Prêtresse, Vadrelan. Et derrière, quatre autres mages et un second duo de sentinelles arcaniques venaient fermer la marche. Hormis le Gardien, tous chevauchaient un destrier thalassien. Fait plutôt rare, mais nécessaire étant donné la distance à parcourir. À allure soutenue, le groupuscule continuait sa progression dans les Terres Fantômes, en direction de Doredhel. Le silence était de mise, quand bien même quelques échanges se faisaient ici ou là. La plupart du temps le Capitaine, chambrant Vadrelan, qui ne lui répondait guère. Mais qu’importe, elle continuait ses assauts sans jamais se lasser jusqu’à ce que la Prêtresse lui demande aimablement de se calmer, en résultant un grognement de frustration.
La faune alentour se faisait rare, et pourtant pouvait-on ouïr parfois quelques Prestes-Pattes ici ou là, dissimulés dans les fourrés. Le groupe n’avait fait face à aucune attaque de ces derniers, suffisamment malins pour ne pas affronter plus fort que soi. Ainsi la route se déroulait confortablement, la Matriarche venant même parfois coller son destrier à celui du diplomate hors-pair pour poser sa tempe contre son épaule, jusqu’à ce qu’un aléa du terrain face légèrement dévier sa monture. En dehors ce léger plaisir, l’Immaculée passait le plus clair de son temps à observer l’horizon qui leur était donné de voir. Un long chemin pavé entouré d’arbres, et malgré l’obscurité ambiante, elle parvenait à le distinguer relativement loin. Une lueur orangée vint au fur et à mesure s’initier au loin. Ignorant ce dont il s’agissait, elle se contenta de la contempler. Un peu de réconfort dans ce paysage morose, elle n’avait mieux à faire qu’en profiter. La lueur gagnait en intensité au fur et à mesure qu’ils s’approchaient, puis vira en un jaune aveuglant le temps d’un battement de cils. Jusqu’à ce qu’elle grossisse rapidement. Finalement, c’est une détonation qui vint lui faire serrer la mâchoire, tympans au vif. Les chevaux paniquèrent, si bien qu’elle manqua de tomber du sien si Faeronor n’avait pas pris la peine d’attraper la bride de l’équidé, stabilisant le sien et celui de Nathel. Secouant la tête pour reprendre ses esprits, elle put entendre à travers le vrombissement assourdissant qui assaillait son audition le Capitaine hurler un ordre. Elle dévia le regard, et constata que la première sentinelle à sa droite venait de subir un lourd choc, cristaux arcaniques fendus, menaçant d’exploser et d’emporter avec elle plusieurs hommes. Le temps de réaction tout juste nécessaire, elle murmura quelques courts mots, et un bouclier divin vint protéger le groupe de vivants. La seconde d’après, le cristal central céda pour qu’un vive relent de flammes bleuâtres vienne lécher le rempart de Lumière.
Certains tombèrent de leurs destriers, les autres descendant d’eux-même dès qu’ils parvinrent à les calmer. Nathel jeta à nouveau un œil vers la lueur, et un phénomène identique se produisit. Écarquillant les yeux, elle constata une boule de flammes ardentes percuter la seconde sentinelle, qui implosa sur le coup. Et à peine le bouclier dut-il encaisser les secousses que les deux sœurs refermant la marche subirent le même destin. Nathel fut forcée de tendre les deux bras, de généreuses effluves blanchâtres venant se mêler au rempart de la Très Sainte, le renforçant autant que nécessaire, serrant les dents au fur et à mesure que les détonations sonores venaient tous les malmener. Une brève constatation, aucun mort ou blessé à signaler. Durant cette panique, la vive lueur s’était amplement approchée. L’on distinguait désormais une silhouette à travers la couche de Lumière. Une petite femme d’un mètre soixante-quinze tout au mieux, vêtue des flammes les plus redoutables et de quatre orbes verdâtres flottant à ses côtés. Nathel fronça les sourcils, tandis que le Capitaine et Vadrelan s’apprêtaient à lui fondre dessus, n’attendant qu’un ordre de sa part. Voyant la jeune femme dont on apercevait à présent les traits doux voire enfantins approcher à pas régulier et calme, elle demeura muette, patiente.
L’inconnue avait d’ailleurs les bras derrière le dos, mains certainement jointes. Soit un signe de trêve, soit une mauvaise surprise. Nul détail ne leur échappait, pas même les flammes léchant sa robe ou celles jaillissant de son sceptre. Une véritable furie dévorante qui étonnamment ne semblait leur vouloir aucun mal, ayant pu saisir l’opportunité de les submerger lors de leur panique.
« Matriarche, le bonsoir. »
Cette voix. Elle ne la connaissait pas, mais elle la surprenait par son intonation. Un ton mielleux aux contours malsains, haineux ; alors que la voix en elle-même aurait pu être celle d’une adolescente. La jeune femme poursuivit, désignant d'un simple doigt dépassant de sa hanche les vestiges d'une sentinelle.
« J’ai horreur de ces saletés. Elles auraient pu m’attaquer sans raison aucune. »
Décontractée, celle-ci poursuivit son chemin jusqu’à s’arrêter devant le bouclier de Lumière. D’un ton poli, elle reprit tout en penchant légèrement le haut de son corps vers la surface divine, la désignant de fait.
« Vous pourriez ?...
- Que voulez-vous ?
- Converser.
- Et qui êtes-vous ?
- Appelez-moi Lenaa.
- Si vous tentez quoi que ce soit, vous le regretterez amèrement.
- Si j’avais voulu tenter quoi que ce soit, tous vos hommes ne seraient plus encore en vie, à me fixer tels des animaux guettant leur repas. »
La Prêtresse soupira puis abaissa ses défenses, prenant le risque de révoquer leur unique défense, faisant confiance aux mages de guerre pour conjurer toute incantation mal venue. La femme approchait encore et toujours, proche d’eux à présent. Bien plus détendue que le reste du groupe, La Clairvoyante leur ordonna de sa voix la plus calme de restreindre leur agressivité, s’avançant alors vers la demoiselle.
« Pourquoi nous barrer la route lors d’une simple visite diplomatique ?
- Car j’en ai décidé ainsi. Le Soleil-volé doit répondre de ses actes.
- Je ne suis pas certaine de bien saisir, Lenaa.
- En l’an Quatre, la famille Al’thien fut accusée par le Soleil-volé de trahison envers la nation, fait confirmé par de fausses preuves dont votre famille a l’art de les faire passer comme incontestables. Avec l’accord de Lune d’Argent, vous êtes venus réduire Quel’Dinoriel et sa population en cendres.
- Je n’ignore pas ces faits, quand bien même je n'y ai participé.
- Cela ne fait aucune différence. Votre maison, et par extension vous, êtes redevables envers le peuple de Quel’Dinoriel. »
Son ton gagnait en hargne. Elle avait visiblement attendu longtemps pour énoncer ces faits, et la haine emmagasinée pouvait s’entendre à chaque syllabe. Elle observait Nathel dans les yeux, sourcils froncés et forcée de lever la tête, près de vingt centimètres les séparant toutes deux. Mais qu’importe, cela n’ébranlait en rien ses convictions, chacun de ses mots résonnait comme une accusation. L’un des mages Sunstolen, agacé tout autant que stressé, prit la parole.
« Mais qu’est-ce qu’elle raconte ?! Personne ne décide pour le Soleil-volé ! »
La mage de sang pencha légèrement la tête sur la droite pour apercevoir ledit mage. Tout doucement, elle vint lever un poing mou à hauteur de son épaule droite, pour finalement l’ouvrir vivement. Une sphère arcanique de petite taille apparut devant le plastron de l’individu, pour délivrer une onde de choc à son encontre. Il fut projeté plusieurs mètres en arrière, se relevant par la suite avec difficulté, de puissantes courbatures altérant ses mouvements. Quand bien même les effectifs Sunstolen n’avaient rien de néophytes, cette incantation était passée inaperçue, pour ainsi dire instantanée.
« C’est une discussion privée. »
Après ces quelques mots secs, Lenaa se redressa pour observer Nathel encore une fois. Elle se mit sur la pointe des pieds pour venir susurrer à la Clairvoyante quelques syllabes à peine audibles. Nathel ne put s’empêcher de voir que les flammes recouvrant les épaulières tout comme la robe de son interlocutrice s’étaient alors déviées pour ne pas la toucher. Une maîtrise absolue de ses pouvoirs, à l’évidence.
« Je vous en prie, ne me forcez pas à faire couler le sang pour vous faire entendre raison. Employer vos exécrables méthodes me ferait de la peine. »
Elle lui sourit, puis Nathel tourna brièvement la tête vers les siens tout en abaissant sa main. Il était clair qu’elle ne souhaitait aucune confrontation. Peut-être était-ce par peur de perdre des hommes à cause d’un de ses semblables, chose qui s’était trop répétée ces derniers temps, ou peut-être était-ce simplement parce qu’au fond d’elle, elle savait que malgré le ton et les méthodes employées, l’inconnue ne demandait que réparation.
« Vous n’ignorez pas que le Soleil-volé a changé. Sa politique, ses desseins, ses effectifs.
- J’en ai entendu parler. Mais je ne vous le cache pas, je m’en moque comme de l’an Six cent vingt-sept. Car quand bien même vous ne pourrez jamais réparer le mal que vous avez fait, les miens ont plus que jamais besoin d’aide. J’exige votre aide. »
Un léger silence se fit. Lenaa crachait chacun de ses mots avec dégoût et rage. Son poing droit était fermement contracté, quelques flammèches parcourant ses phalanges. Finalement, elle se calma, malaxant calmement ses doigts. Fixant toujours la Matriarche sans même prendre la peine de cligner des yeux, elle laissa apparaître un rictus au coin de ses lèvres, teinté de perfidie.
« Mais vous êtes en visite diplomatique, n’est-ce pas ? Je vous fais perdre un précieux temps en vous barrant ainsi la route. Je ne souhaite pas vous affronter, mais bel et bien me servir de vous comme vous vous êtes servi de nous il y a quelques décennies. Continuons la route ensemble. »
L’insolence de la jeune femme ne dérangeait nullement Nathel, qui avait une juste idée de ce que Lenaa pouvait ressentir. Et quand bien même elle n’aurait jamais employé des méthodes aussi radicales à sa place, elle n’en aurait pas pensé moins. Alors après un léger temps de réflexion opina-t-elle. La Prêtresse fit signe au groupe de reprendre sa formation, laissant son propre destrier à l’un des mages ayant perdu sa monture pour, en compagnie de la nouvelle connaissance, reprendre sa marche ; Lumière et Feu ouvrant désormais la route vers Doredhel.
Le groupuscule était en marche. En tête, deux sentinelles arcaniques fracassaient le chemin de leurs lourds pas, pierre heurtant pierre. Suivis bien vite de quatre mages de guerre vêtant d’anciennes tenues d’agents du Kirin Tor, remaniées telles que le Capitaine Arcanebreath en avait décidé. Au diable les Sunreavers, au diable Dalaran, leurs intérêts personnels étaient à présents dynamisés par un pragmatisme sans faille. Unethien justement, se tenait derrière eux, avançant à la même allure. Dans son dos se profilait Faeronor d’une part, admirable ; et la Matriarche de l’autre, radieuse. À leur droite se trouvait un elfe vêtant une armure des plus robustes, des plus imposantes, elle aussi assortie aux couleurs du Soleil-volé. L’on devinait là l’unique champion de la Prêtresse, Vadrelan. Et derrière, quatre autres mages et un second duo de sentinelles arcaniques venaient fermer la marche. Hormis le Gardien, tous chevauchaient un destrier thalassien. Fait plutôt rare, mais nécessaire étant donné la distance à parcourir. À allure soutenue, le groupuscule continuait sa progression dans les Terres Fantômes, en direction de Doredhel. Le silence était de mise, quand bien même quelques échanges se faisaient ici ou là. La plupart du temps le Capitaine, chambrant Vadrelan, qui ne lui répondait guère. Mais qu’importe, elle continuait ses assauts sans jamais se lasser jusqu’à ce que la Prêtresse lui demande aimablement de se calmer, en résultant un grognement de frustration.
La faune alentour se faisait rare, et pourtant pouvait-on ouïr parfois quelques Prestes-Pattes ici ou là, dissimulés dans les fourrés. Le groupe n’avait fait face à aucune attaque de ces derniers, suffisamment malins pour ne pas affronter plus fort que soi. Ainsi la route se déroulait confortablement, la Matriarche venant même parfois coller son destrier à celui du diplomate hors-pair pour poser sa tempe contre son épaule, jusqu’à ce qu’un aléa du terrain face légèrement dévier sa monture. En dehors ce léger plaisir, l’Immaculée passait le plus clair de son temps à observer l’horizon qui leur était donné de voir. Un long chemin pavé entouré d’arbres, et malgré l’obscurité ambiante, elle parvenait à le distinguer relativement loin. Une lueur orangée vint au fur et à mesure s’initier au loin. Ignorant ce dont il s’agissait, elle se contenta de la contempler. Un peu de réconfort dans ce paysage morose, elle n’avait mieux à faire qu’en profiter. La lueur gagnait en intensité au fur et à mesure qu’ils s’approchaient, puis vira en un jaune aveuglant le temps d’un battement de cils. Jusqu’à ce qu’elle grossisse rapidement. Finalement, c’est une détonation qui vint lui faire serrer la mâchoire, tympans au vif. Les chevaux paniquèrent, si bien qu’elle manqua de tomber du sien si Faeronor n’avait pas pris la peine d’attraper la bride de l’équidé, stabilisant le sien et celui de Nathel. Secouant la tête pour reprendre ses esprits, elle put entendre à travers le vrombissement assourdissant qui assaillait son audition le Capitaine hurler un ordre. Elle dévia le regard, et constata que la première sentinelle à sa droite venait de subir un lourd choc, cristaux arcaniques fendus, menaçant d’exploser et d’emporter avec elle plusieurs hommes. Le temps de réaction tout juste nécessaire, elle murmura quelques courts mots, et un bouclier divin vint protéger le groupe de vivants. La seconde d’après, le cristal central céda pour qu’un vive relent de flammes bleuâtres vienne lécher le rempart de Lumière.
Certains tombèrent de leurs destriers, les autres descendant d’eux-même dès qu’ils parvinrent à les calmer. Nathel jeta à nouveau un œil vers la lueur, et un phénomène identique se produisit. Écarquillant les yeux, elle constata une boule de flammes ardentes percuter la seconde sentinelle, qui implosa sur le coup. Et à peine le bouclier dut-il encaisser les secousses que les deux sœurs refermant la marche subirent le même destin. Nathel fut forcée de tendre les deux bras, de généreuses effluves blanchâtres venant se mêler au rempart de la Très Sainte, le renforçant autant que nécessaire, serrant les dents au fur et à mesure que les détonations sonores venaient tous les malmener. Une brève constatation, aucun mort ou blessé à signaler. Durant cette panique, la vive lueur s’était amplement approchée. L’on distinguait désormais une silhouette à travers la couche de Lumière. Une petite femme d’un mètre soixante-quinze tout au mieux, vêtue des flammes les plus redoutables et de quatre orbes verdâtres flottant à ses côtés. Nathel fronça les sourcils, tandis que le Capitaine et Vadrelan s’apprêtaient à lui fondre dessus, n’attendant qu’un ordre de sa part. Voyant la jeune femme dont on apercevait à présent les traits doux voire enfantins approcher à pas régulier et calme, elle demeura muette, patiente.
L’inconnue avait d’ailleurs les bras derrière le dos, mains certainement jointes. Soit un signe de trêve, soit une mauvaise surprise. Nul détail ne leur échappait, pas même les flammes léchant sa robe ou celles jaillissant de son sceptre. Une véritable furie dévorante qui étonnamment ne semblait leur vouloir aucun mal, ayant pu saisir l’opportunité de les submerger lors de leur panique.
« Matriarche, le bonsoir. »
Cette voix. Elle ne la connaissait pas, mais elle la surprenait par son intonation. Un ton mielleux aux contours malsains, haineux ; alors que la voix en elle-même aurait pu être celle d’une adolescente. La jeune femme poursuivit, désignant d'un simple doigt dépassant de sa hanche les vestiges d'une sentinelle.
« J’ai horreur de ces saletés. Elles auraient pu m’attaquer sans raison aucune. »
Décontractée, celle-ci poursuivit son chemin jusqu’à s’arrêter devant le bouclier de Lumière. D’un ton poli, elle reprit tout en penchant légèrement le haut de son corps vers la surface divine, la désignant de fait.
« Vous pourriez ?...
- Que voulez-vous ?
- Converser.
- Et qui êtes-vous ?
- Appelez-moi Lenaa.
- Si vous tentez quoi que ce soit, vous le regretterez amèrement.
- Si j’avais voulu tenter quoi que ce soit, tous vos hommes ne seraient plus encore en vie, à me fixer tels des animaux guettant leur repas. »
La Prêtresse soupira puis abaissa ses défenses, prenant le risque de révoquer leur unique défense, faisant confiance aux mages de guerre pour conjurer toute incantation mal venue. La femme approchait encore et toujours, proche d’eux à présent. Bien plus détendue que le reste du groupe, La Clairvoyante leur ordonna de sa voix la plus calme de restreindre leur agressivité, s’avançant alors vers la demoiselle.
« Pourquoi nous barrer la route lors d’une simple visite diplomatique ?
- Car j’en ai décidé ainsi. Le Soleil-volé doit répondre de ses actes.
- Je ne suis pas certaine de bien saisir, Lenaa.
- En l’an Quatre, la famille Al’thien fut accusée par le Soleil-volé de trahison envers la nation, fait confirmé par de fausses preuves dont votre famille a l’art de les faire passer comme incontestables. Avec l’accord de Lune d’Argent, vous êtes venus réduire Quel’Dinoriel et sa population en cendres.
- Je n’ignore pas ces faits, quand bien même je n'y ai participé.
- Cela ne fait aucune différence. Votre maison, et par extension vous, êtes redevables envers le peuple de Quel’Dinoriel. »
Son ton gagnait en hargne. Elle avait visiblement attendu longtemps pour énoncer ces faits, et la haine emmagasinée pouvait s’entendre à chaque syllabe. Elle observait Nathel dans les yeux, sourcils froncés et forcée de lever la tête, près de vingt centimètres les séparant toutes deux. Mais qu’importe, cela n’ébranlait en rien ses convictions, chacun de ses mots résonnait comme une accusation. L’un des mages Sunstolen, agacé tout autant que stressé, prit la parole.
« Mais qu’est-ce qu’elle raconte ?! Personne ne décide pour le Soleil-volé ! »
La mage de sang pencha légèrement la tête sur la droite pour apercevoir ledit mage. Tout doucement, elle vint lever un poing mou à hauteur de son épaule droite, pour finalement l’ouvrir vivement. Une sphère arcanique de petite taille apparut devant le plastron de l’individu, pour délivrer une onde de choc à son encontre. Il fut projeté plusieurs mètres en arrière, se relevant par la suite avec difficulté, de puissantes courbatures altérant ses mouvements. Quand bien même les effectifs Sunstolen n’avaient rien de néophytes, cette incantation était passée inaperçue, pour ainsi dire instantanée.
« C’est une discussion privée. »
Après ces quelques mots secs, Lenaa se redressa pour observer Nathel encore une fois. Elle se mit sur la pointe des pieds pour venir susurrer à la Clairvoyante quelques syllabes à peine audibles. Nathel ne put s’empêcher de voir que les flammes recouvrant les épaulières tout comme la robe de son interlocutrice s’étaient alors déviées pour ne pas la toucher. Une maîtrise absolue de ses pouvoirs, à l’évidence.
« Je vous en prie, ne me forcez pas à faire couler le sang pour vous faire entendre raison. Employer vos exécrables méthodes me ferait de la peine. »
Elle lui sourit, puis Nathel tourna brièvement la tête vers les siens tout en abaissant sa main. Il était clair qu’elle ne souhaitait aucune confrontation. Peut-être était-ce par peur de perdre des hommes à cause d’un de ses semblables, chose qui s’était trop répétée ces derniers temps, ou peut-être était-ce simplement parce qu’au fond d’elle, elle savait que malgré le ton et les méthodes employées, l’inconnue ne demandait que réparation.
« Vous n’ignorez pas que le Soleil-volé a changé. Sa politique, ses desseins, ses effectifs.
- J’en ai entendu parler. Mais je ne vous le cache pas, je m’en moque comme de l’an Six cent vingt-sept. Car quand bien même vous ne pourrez jamais réparer le mal que vous avez fait, les miens ont plus que jamais besoin d’aide. J’exige votre aide. »
Un léger silence se fit. Lenaa crachait chacun de ses mots avec dégoût et rage. Son poing droit était fermement contracté, quelques flammèches parcourant ses phalanges. Finalement, elle se calma, malaxant calmement ses doigts. Fixant toujours la Matriarche sans même prendre la peine de cligner des yeux, elle laissa apparaître un rictus au coin de ses lèvres, teinté de perfidie.
« Mais vous êtes en visite diplomatique, n’est-ce pas ? Je vous fais perdre un précieux temps en vous barrant ainsi la route. Je ne souhaite pas vous affronter, mais bel et bien me servir de vous comme vous vous êtes servi de nous il y a quelques décennies. Continuons la route ensemble. »
L’insolence de la jeune femme ne dérangeait nullement Nathel, qui avait une juste idée de ce que Lenaa pouvait ressentir. Et quand bien même elle n’aurait jamais employé des méthodes aussi radicales à sa place, elle n’en aurait pas pensé moins. Alors après un léger temps de réflexion opina-t-elle. La Prêtresse fit signe au groupe de reprendre sa formation, laissant son propre destrier à l’un des mages ayant perdu sa monture pour, en compagnie de la nouvelle connaissance, reprendre sa marche ; Lumière et Feu ouvrant désormais la route vers Doredhel.
Srem
Re: Revanche.
Le groupe s’approchait désormais des Maleterres, prêt à troquer un paysage désolé pour un autre. Un environnement passablement stressant, n’étant des plus agréables. Souvenirs douloureux pour certains, morose contemplation pour d’autres, l’ensemble parvenait néanmoins à s’accorder sur un point. Vivement qu’ils en aient fini, et que Tinambor se profile. Après plusieurs échanges à voix basse avec la Matriarche, et quelques répliques houleuses avec le diplomate Siana, la Mage de Sang avait finalement fait le choix de poursuivre sa route en devançant légèrement le reste, guidant de fait le convoi. Certainement était-elle animée d’un plaisir factice, celui de diriger par le nez le Soleil-volé, et accidentellement mais sans lui déplaire, ses alliés. Finalement, la Prêtresse vint rattraper la solitaire, reprenant la conversation laissée de côté quelques temps plus tôt.
« Combien sont-ils ?
- Je vous l’ai déjà dit. Trop pour pouvoir tous les compter.
- Je l’ai bien compris. Mais disons qu’une aide externe serait la bienvenue.
- Précisez.
- Faeronor a sous-entendu une possible assistance de la part des Siana, qui se trouvent dans les alentours de Quel’Dinoriel actuellement, côté Maleterres.
- Vous prenez votre rôle de rédemptrice à cœur, il semblerait. Mais pensez-vous réellement qu’ils accepteront ? Votre mâle a pour le moins été clair quant à leur appréciation des individus de mon espèce.
- Tout est affaire de négociation, m’a-t-il par la suite expliqué. Et la Résistance pourrait s’y joindre, bien que cela serait plutôt malvenu.
- La Résistance ? Ce ne sont pas ces espèces de fourmis tentant envers et contre tout de conserver leurs bouts de terre face aux décharnés ?
- Au risque de vous froisser, vous êtes dans la même situation, à présent. »
La jeune prodige pesta. Elle ne s’attendait pas à ce que la réalité vienne aussi aisément la gifler, qui plus est à travers les paroles d’une Prêtresse, ce qui ne faisait qu’empirer le sentiment de frustration. Les flammes la vêtant se manifestèrent plus qu’à l’accoutumée, suivant le tempérament de leur propriétaire. Puis elles se firent à nouveau discrètes, l’elfe répliquant d’un ton plus doux.
« Vous n’avez pas tort. Mais j’aime mieux vous dire que l’Alliance et ses humains ne sont pas ma tasse de thé.
- Vous ferez bien un effort, pour votre peuple.
- Je ne suis plus à ça près.
- Parfait. N’oubliez pas que de votre sagesse à Doredhel dépend l’avenir des vôtres.
- Vous semblez bien sûre de vous.
- Une idée qui me parcourt l’esprit, disons. »
Une idée bien précise, et redoutablement efficace ; qu’elle s’efforçait de conserver comme atout pour le délivrer au moment le plus opportun. Cela pourrait convenir à chacun, et offrir un dénouement idéal. Elle jubila intérieurement, tout en tachant de conserver les pieds sur terre, n’oubliant que tout était encore à faire. Elle revint à Lenaa, un autre sujet derrière la tête.
« Nous nous questionnons sur la façon dont vont réagir les vôtres si nous honorons notre parole.
- Bien que je n’ai aucune autorité sur eux, je présume qu’ils suivront mon avis.
- Qui est ?
- Que je vous hais, et que si tout cela ne tenait qu’à moi je ferais tout pour vous immoler entre mes mains. Néanmoins, Quel’Dinoriel est prioritaire. Eux comme moi tâcherons de ne pas semer d’embuches sur votre route, tant que celle-ci s’oriente vers nos intérêts.
- J’espère que si nous venons vous aider, vous n’imaginez pas vous retourner contre nous après coup pour satisfaire vos sadiques pulsions.
- Alors que vos effectifs et peut-être ceux de vos alliés seront sur place, prêts à me dévorer au moindre faux pas ? Pour qui me prenez-vous, une folle ?
- Je n’irais pas jusque là. Néanmoins, je perçois votre haine, et je ne souhaite qu’atténuer celle-ci tout autant que de porter secours à Quel’Dinoriel.
- Je ne puis rien vous promettre concernant mes affinités avec ceux qui ont ruiné mon existence lors de leur passage.
- Je comprends. Nous verrons bien en temps voulu.
- Mh. »
La Clairvoyante se retira poliment pour revenir au groupe, laissant à nouveau la Mage de Sang seule. Nathel jeta un œil au Capitaine, dont elle put déceler à travers son regard une certaine admiration. La Matriarche qui supportait d’être traitée comme une moins que rien par une furie entêtée. Cela était pour le moins contraire à l’attitude de l’Aînée, qui aurait déjà résolu le dilemme par la violence. Mais effectivement, l’Immaculée n’avait que faire de son titre et de sa position. Elle était la coupable, et Lenaa l’accusatrice. Il était amplement préférable de le prendre du bon côté plutôt que de se voiler derrière mille et un prétextes, chose qu’elle n’aurait su faire de toute façon. La végétation meurtrie de Lordaeron était à présent à portée de vue, et le silence reprit place, chacun marchant d’un pas assuré, malgré les secousses qui d’ores-et-déjà se profilaient à Doredhel.
« Combien sont-ils ?
- Je vous l’ai déjà dit. Trop pour pouvoir tous les compter.
- Je l’ai bien compris. Mais disons qu’une aide externe serait la bienvenue.
- Précisez.
- Faeronor a sous-entendu une possible assistance de la part des Siana, qui se trouvent dans les alentours de Quel’Dinoriel actuellement, côté Maleterres.
- Vous prenez votre rôle de rédemptrice à cœur, il semblerait. Mais pensez-vous réellement qu’ils accepteront ? Votre mâle a pour le moins été clair quant à leur appréciation des individus de mon espèce.
- Tout est affaire de négociation, m’a-t-il par la suite expliqué. Et la Résistance pourrait s’y joindre, bien que cela serait plutôt malvenu.
- La Résistance ? Ce ne sont pas ces espèces de fourmis tentant envers et contre tout de conserver leurs bouts de terre face aux décharnés ?
- Au risque de vous froisser, vous êtes dans la même situation, à présent. »
La jeune prodige pesta. Elle ne s’attendait pas à ce que la réalité vienne aussi aisément la gifler, qui plus est à travers les paroles d’une Prêtresse, ce qui ne faisait qu’empirer le sentiment de frustration. Les flammes la vêtant se manifestèrent plus qu’à l’accoutumée, suivant le tempérament de leur propriétaire. Puis elles se firent à nouveau discrètes, l’elfe répliquant d’un ton plus doux.
« Vous n’avez pas tort. Mais j’aime mieux vous dire que l’Alliance et ses humains ne sont pas ma tasse de thé.
- Vous ferez bien un effort, pour votre peuple.
- Je ne suis plus à ça près.
- Parfait. N’oubliez pas que de votre sagesse à Doredhel dépend l’avenir des vôtres.
- Vous semblez bien sûre de vous.
- Une idée qui me parcourt l’esprit, disons. »
Une idée bien précise, et redoutablement efficace ; qu’elle s’efforçait de conserver comme atout pour le délivrer au moment le plus opportun. Cela pourrait convenir à chacun, et offrir un dénouement idéal. Elle jubila intérieurement, tout en tachant de conserver les pieds sur terre, n’oubliant que tout était encore à faire. Elle revint à Lenaa, un autre sujet derrière la tête.
« Nous nous questionnons sur la façon dont vont réagir les vôtres si nous honorons notre parole.
- Bien que je n’ai aucune autorité sur eux, je présume qu’ils suivront mon avis.
- Qui est ?
- Que je vous hais, et que si tout cela ne tenait qu’à moi je ferais tout pour vous immoler entre mes mains. Néanmoins, Quel’Dinoriel est prioritaire. Eux comme moi tâcherons de ne pas semer d’embuches sur votre route, tant que celle-ci s’oriente vers nos intérêts.
- J’espère que si nous venons vous aider, vous n’imaginez pas vous retourner contre nous après coup pour satisfaire vos sadiques pulsions.
- Alors que vos effectifs et peut-être ceux de vos alliés seront sur place, prêts à me dévorer au moindre faux pas ? Pour qui me prenez-vous, une folle ?
- Je n’irais pas jusque là. Néanmoins, je perçois votre haine, et je ne souhaite qu’atténuer celle-ci tout autant que de porter secours à Quel’Dinoriel.
- Je ne puis rien vous promettre concernant mes affinités avec ceux qui ont ruiné mon existence lors de leur passage.
- Je comprends. Nous verrons bien en temps voulu.
- Mh. »
La Clairvoyante se retira poliment pour revenir au groupe, laissant à nouveau la Mage de Sang seule. Nathel jeta un œil au Capitaine, dont elle put déceler à travers son regard une certaine admiration. La Matriarche qui supportait d’être traitée comme une moins que rien par une furie entêtée. Cela était pour le moins contraire à l’attitude de l’Aînée, qui aurait déjà résolu le dilemme par la violence. Mais effectivement, l’Immaculée n’avait que faire de son titre et de sa position. Elle était la coupable, et Lenaa l’accusatrice. Il était amplement préférable de le prendre du bon côté plutôt que de se voiler derrière mille et un prétextes, chose qu’elle n’aurait su faire de toute façon. La végétation meurtrie de Lordaeron était à présent à portée de vue, et le silence reprit place, chacun marchant d’un pas assuré, malgré les secousses qui d’ores-et-déjà se profilaient à Doredhel.
Dernière édition par Aselm le Jeu 31 Oct 2013, 17:49, édité 2 fois
Srem
Re: Revanche.
Quel’thalas, Plaine de Tinambor, Doredhel.
Faeronor quitta le balcon, puis la chambre ; laissant la Matriarche seule face au panorama contrasté. Une nature somptueusement préservée et malgré tout perturbée par quelques rebelles se pensant dans leur juste droit. Se retenant de pester, ses mains affirmèrent leur étreinte sur la rambarde contre laquelle elle se penchait. Une cause vaine, perdue d’avance. Quelle folie, quelle idiotie. Sa main gantée libéra la pierre pour venir généreusement s’initier dans sa chevelure. Peut-être était-elle dans la même situation qu’eux. Ce ne serait ni la première fois ni la dernière qu’elle viendrait à défendre une cause perdue d’avance, ce qui en aucun cas n’allégeait sa conscience ou l’aidait d’une quelconque façon. Elle prit une interminable inspiration, expulsant l’air via ses lèvres entrouvertes l’instant suivant. Le doute était de bien loin le sentiment qu’elle méprisait le plus, ainsi lui interdit-elle de la malmener plus longtemps. Ses pieds pivotèrent pour se diriger vers l’intérieur. Le lit était spacieux, non pour lui déplaire. Elle hésita à s’asseoir sur le rebord, et fit finalement le choix de s’y laisser tomber sur le dos, s’étalant ainsi tout du long sur les draps dans divers cliquetis liés à sa tenue de Prêtresse de guerre. Quelques secondes sans rien penser, sans rien faire, puis elle rouvrit les yeux. Tournant légèrement le regard vers la porte, elle fit appel à Vadrelan.
Silence absolu le temps de quelques battements de cils, puis la poignée tourna doucement, porte s’ouvrant de fait. La devenue légendaire silhouette du Gardien se dévoila le temps d’un lourd pas, l’elfe jetant un œil à sa protégée dans un haussement de sourcil curieux. Elle prit le temps de le détailler. Ses yeux, ses traits, mais surtout ses balafres se croisant diagonalement sur son visage. Demeurant neutre à souhait, elle lui répondit simplement d’un ton amical, tandis que le plafond était de nouveau dans son collimateur.
« À force de sans cesse porter ce heaume, je finis par être surprise de te voir sans.
Je veillerai à le vêtir moins souvent, dans ce cas.
À ta guise. Viens donc, nous devons parler. »
Il opina du chef, venant avec une délicatesse extrême se déplacer jusqu’au lit, pour s’asseoir sur un coin de celui-ci, veillant à ne pas l’endommager par son poids. Son heaume, qu’il tenait jusqu’à présent entre ses mains, se vit posé à côté. Nathel en profita pour s’en saisir, le plaçant au dessus d’elle, bras tendus. La visière peu réconfortante lui faisait face, celle-ci se contentant d’esquisser un sourire en guise d’unique réaction. Sans s’en libérer, elle poursuivit.
« Que penses-tu de tout cela. J’attendais que nous soyons seuls pour en parler.
- Nous jouons avec le feu.
- C’est le moins que l’on puisse dire.
- Que comptes-tu faire.
- Je l’ignore, mon cher. Je l’ignore. »
Soupirant, elle vint tendre le casque à son propriétaire, qui s’en saisit pour le placer sur sa cuisse droite. Il se tourna un peu plus vers elle, une main fermement appuyée contre le matelas le maintenant. Détaillant Nathel sous toutes ses coutures, celle-ci finit par se redresser quelque peu, fronçant les sourcils. Avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit, il intervint.
« La dernière fois que je t’ai vue si hésitante, cela s’est très mal terminé.
- Le moment est particulièrement bien choisi pour me faire culpabiliser à propos de Nera, je te remer---
- Nera ne me manque pas pour le moins du monde. Je faisais référence à Draenor. »
Ni une ni deux, le regard que portait Nathel à son plus fidèle allié vira du simple questionnement au foudroiement. Une expression foncièrement mauvaise, qui n’était pas apparue depuis bien longtemps et qu’au fond, il aurait souhaité ne revoir. Il lui fit les gros yeux, sachant plus ou moins de quelle façon effacer cette hargne du minois habituellement si angélique. Ce qui ne manqua pas, la Prêtresse penchant la tête de côté le temps de réaliser, pour ensuite, avec vivacité, observer le ciel se distinguant par la fenêtre. Yeux clos, elle reprit d’un ton plus pragmatique.
« Cela ne se reproduira sous aucun prétexte. Je pensais te l’avoir bien assez précisé pour m’épargner ton insolence.
- Et comment puis-je en être absolument certain. Qu’est-ce qui te fait penser cela.
- J’ignorais jusqu’à l’existence même des Naarus.
- Certes. Néanmoins nous ne som---
- Silence. »
Le ton était sec, relevant plus de l’ordre que du conseil. Il tressaillit, puis demeura immobile un instant, impassible. La Clairvoyante se releva d’un coup, venant s’asseoir juste à sa droite. Elle fixait le tableau thalassien trônant sur le mur face à elle, enchaînant d’un ton quelque peu plus agréable que le précédent, sans pour autant être dénué d’une infime agressivité.
« Je comprends tes doutes et tes craintes. Mais cela n’est ni l’endroit ni le moment pour me les cracher au visage. J’ignore concrètement sur quel terrain nous avançons, mais une chose est certaine, tu vas devoir prendre sur toi tout autant que je le fais d’ores-et-déjà pour Lenaa. Même si elle se joue de nous, cela n’a rien d’un jeu. Reste vigilant, et comme j’ai déjà du te le répéter plus d’un millier de fois depuis que nous nous connaissons, maintient la clarté de ton esprit. Je ne puis me permettre d’être entourée d’indécis alors que je vais déjà en être submergée dans les temps à venir. Ai-je été assez claire, Vadrelan. »
Il hocha lentement la tête, récupérant son heaume pour le glisser sous son bras gauche. Relevé, il vint saluer la Matriarche de tout le sérieux qui l’animait. N’ignorant pas le geste respectueux, mais froid et impersonnel ; il agrémenta le tout d’un clin d’œil, symbole de la complicité que le duo partageait depuis plusieurs décennies à présent. Elle lui répondit d’un sincère sourire, le Gardien pivotant alors vers la porte, pour s’y diriger. L’atteignant, il plaça son imposant gantelet sur la poignée, poursuivant son avancée pour progressivement la refermer au fil de ses pas. Et alors qu’il passa le seuil, il glissa quelques audibles mots.
« Si tu as besoin de quoi que ce soit, je serai dans le couloir. »
Faeronor quitta le balcon, puis la chambre ; laissant la Matriarche seule face au panorama contrasté. Une nature somptueusement préservée et malgré tout perturbée par quelques rebelles se pensant dans leur juste droit. Se retenant de pester, ses mains affirmèrent leur étreinte sur la rambarde contre laquelle elle se penchait. Une cause vaine, perdue d’avance. Quelle folie, quelle idiotie. Sa main gantée libéra la pierre pour venir généreusement s’initier dans sa chevelure. Peut-être était-elle dans la même situation qu’eux. Ce ne serait ni la première fois ni la dernière qu’elle viendrait à défendre une cause perdue d’avance, ce qui en aucun cas n’allégeait sa conscience ou l’aidait d’une quelconque façon. Elle prit une interminable inspiration, expulsant l’air via ses lèvres entrouvertes l’instant suivant. Le doute était de bien loin le sentiment qu’elle méprisait le plus, ainsi lui interdit-elle de la malmener plus longtemps. Ses pieds pivotèrent pour se diriger vers l’intérieur. Le lit était spacieux, non pour lui déplaire. Elle hésita à s’asseoir sur le rebord, et fit finalement le choix de s’y laisser tomber sur le dos, s’étalant ainsi tout du long sur les draps dans divers cliquetis liés à sa tenue de Prêtresse de guerre. Quelques secondes sans rien penser, sans rien faire, puis elle rouvrit les yeux. Tournant légèrement le regard vers la porte, elle fit appel à Vadrelan.
Silence absolu le temps de quelques battements de cils, puis la poignée tourna doucement, porte s’ouvrant de fait. La devenue légendaire silhouette du Gardien se dévoila le temps d’un lourd pas, l’elfe jetant un œil à sa protégée dans un haussement de sourcil curieux. Elle prit le temps de le détailler. Ses yeux, ses traits, mais surtout ses balafres se croisant diagonalement sur son visage. Demeurant neutre à souhait, elle lui répondit simplement d’un ton amical, tandis que le plafond était de nouveau dans son collimateur.
« À force de sans cesse porter ce heaume, je finis par être surprise de te voir sans.
Je veillerai à le vêtir moins souvent, dans ce cas.
À ta guise. Viens donc, nous devons parler. »
Il opina du chef, venant avec une délicatesse extrême se déplacer jusqu’au lit, pour s’asseoir sur un coin de celui-ci, veillant à ne pas l’endommager par son poids. Son heaume, qu’il tenait jusqu’à présent entre ses mains, se vit posé à côté. Nathel en profita pour s’en saisir, le plaçant au dessus d’elle, bras tendus. La visière peu réconfortante lui faisait face, celle-ci se contentant d’esquisser un sourire en guise d’unique réaction. Sans s’en libérer, elle poursuivit.
« Que penses-tu de tout cela. J’attendais que nous soyons seuls pour en parler.
- Nous jouons avec le feu.
- C’est le moins que l’on puisse dire.
- Que comptes-tu faire.
- Je l’ignore, mon cher. Je l’ignore. »
Soupirant, elle vint tendre le casque à son propriétaire, qui s’en saisit pour le placer sur sa cuisse droite. Il se tourna un peu plus vers elle, une main fermement appuyée contre le matelas le maintenant. Détaillant Nathel sous toutes ses coutures, celle-ci finit par se redresser quelque peu, fronçant les sourcils. Avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit, il intervint.
« La dernière fois que je t’ai vue si hésitante, cela s’est très mal terminé.
- Le moment est particulièrement bien choisi pour me faire culpabiliser à propos de Nera, je te remer---
- Nera ne me manque pas pour le moins du monde. Je faisais référence à Draenor. »
Ni une ni deux, le regard que portait Nathel à son plus fidèle allié vira du simple questionnement au foudroiement. Une expression foncièrement mauvaise, qui n’était pas apparue depuis bien longtemps et qu’au fond, il aurait souhaité ne revoir. Il lui fit les gros yeux, sachant plus ou moins de quelle façon effacer cette hargne du minois habituellement si angélique. Ce qui ne manqua pas, la Prêtresse penchant la tête de côté le temps de réaliser, pour ensuite, avec vivacité, observer le ciel se distinguant par la fenêtre. Yeux clos, elle reprit d’un ton plus pragmatique.
« Cela ne se reproduira sous aucun prétexte. Je pensais te l’avoir bien assez précisé pour m’épargner ton insolence.
- Et comment puis-je en être absolument certain. Qu’est-ce qui te fait penser cela.
- J’ignorais jusqu’à l’existence même des Naarus.
- Certes. Néanmoins nous ne som---
- Silence. »
Le ton était sec, relevant plus de l’ordre que du conseil. Il tressaillit, puis demeura immobile un instant, impassible. La Clairvoyante se releva d’un coup, venant s’asseoir juste à sa droite. Elle fixait le tableau thalassien trônant sur le mur face à elle, enchaînant d’un ton quelque peu plus agréable que le précédent, sans pour autant être dénué d’une infime agressivité.
« Je comprends tes doutes et tes craintes. Mais cela n’est ni l’endroit ni le moment pour me les cracher au visage. J’ignore concrètement sur quel terrain nous avançons, mais une chose est certaine, tu vas devoir prendre sur toi tout autant que je le fais d’ores-et-déjà pour Lenaa. Même si elle se joue de nous, cela n’a rien d’un jeu. Reste vigilant, et comme j’ai déjà du te le répéter plus d’un millier de fois depuis que nous nous connaissons, maintient la clarté de ton esprit. Je ne puis me permettre d’être entourée d’indécis alors que je vais déjà en être submergée dans les temps à venir. Ai-je été assez claire, Vadrelan. »
Il hocha lentement la tête, récupérant son heaume pour le glisser sous son bras gauche. Relevé, il vint saluer la Matriarche de tout le sérieux qui l’animait. N’ignorant pas le geste respectueux, mais froid et impersonnel ; il agrémenta le tout d’un clin d’œil, symbole de la complicité que le duo partageait depuis plusieurs décennies à présent. Elle lui répondit d’un sincère sourire, le Gardien pivotant alors vers la porte, pour s’y diriger. L’atteignant, il plaça son imposant gantelet sur la poignée, poursuivant son avancée pour progressivement la refermer au fil de ses pas. Et alors qu’il passa le seuil, il glissa quelques audibles mots.
« Si tu as besoin de quoi que ce soit, je serai dans le couloir. »
Srem
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