Accalmie
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Accalmie
« Notre tâche est ingrate, mais nécessaire. »
Elle sursauta, rouvrit les yeux brutalement, et fit preuve d’un silence parfait pendant quatre secondes, pas une de plus, pas une de moins. Personne, bonne nouvelle. Prenant une longue mais inaudible inspiration, elle observa devant elle.
De l’eau. L’eau. Pure, souterraine, potable ; sa préférée. Ce minois si raidi se détendit alors doucement, l’air frustré laissant place à la plus passionnée des contemplations. Malgré l’obscurité de la caverne lugubre de Forgefer, l’eau se reflétait contre les parois du renfoncement, comme si le liquide lui-même dégageait une douce luminescence. Réalité ou simple fruit de l’imagination, elle l’ignorait et n’en avait pour ainsi dire que faire. C’est ainsi qu’elle demeura immobile durant quelques minutes à observer la surface de l’eau. Plate, lisse, tel un drapé de soie dont on aurait pris soin d’écarter tout plis.
Probablement s’était-elle assoupie ici par mégarde, les heures de sommeil qu’elle fuyait finissant par rattraper la fautive et lui accabler leur plus délicate étreinte. À présent, elle devait se relever, retourner vers la Garde Mystique de la cité et s’assurer que tout le monde serait prêt pour le lendemain. Son sceptre en main gauche, qui n’avait pas quitté son poste pendant son sommeil, reprit bien vite son rôle d’appui. Une, deux, et la voilà pousser sur sa jambe pour la tendre. Une crispation, une agonie, et elle reprit sa position agenouillée en retenant un hurlement, seul un gémissement étouffé parvenant à quitter ses lèvres.
Une minute plus tard, la tension à peu près redescendue, nouvelle tentative. Crispation, agonie, tant pis. Elle força, et la riposte fut si brutale qu’elle manqua de perdre connaissance. Coûte que coûte, la mage parvint à se relever, se crispant aussitôt sur son sceptre de ses deux mains pour adoucir d’une façon ou d’une autre son propre poids. Une nouvelle minute défila sans qu’elle ne bouge d’un pouce, trop occupée à reprendre un rythme respiratoire décent. Après quelques essais sur sa jambe, elle jugea que le retour serait périlleux, mais faisable. Quelques dizaines de mètres la séparaient de sa destination seulement, et c’était pourtant un parcours du combattant. Pathétique pensa-t-elle, avant de prendre la route en boitillant telle une octogénaire.
Un pas devint une râle, un autre un soupir. Le visage noyé dans la souffrance, elle progressa tant bien que mal, évadant son esprit de ce corps si faiblard. Elle pensa au lendemain. Demain serait épuisant. Dès le matin, se lever. Le soir, quitter le continent. S’assurer que rien ne manquerait une fois là-bas, que chacun possède assez de viande sèche le temps du trajet, ainsi de suite. Tant de tracas barbants qu’elle dut trouver un échappatoire, vite, très vite. De l’eau. L’eau. Salée, mais en abondance, apte à lui tenir compagnie sur le navire. Malgré les pas qui s’enchaînaient, elle décrocha un maigre sourire.
Et l’arrivée, alors ? Dodelinant sèchement de la tête, elle convint qu’elle serait probablement rapide, trop rapide, ne laissant même pas au groupe le plaisir de toucher la terre-ferme qu'il y aurait déjà fort à faire. Le climat, peut-être ? Froid par ici, polaire par là. Plus d’un s’en plaindra, tant pis tant qu’ils n’en meurent pas. Les rations ? D’ores-et-déjà insuffisantes, prions que la chasse soit bonne. En somme, un constat dont l’ensemble la satisfaisait, quand bien même quelques détails restaient encore à régler. Mais laissons le temps au temps.
Revenant à la réalité, à sa douleur tout comme à son allure de vieille mégère, elle fit face à la porte d’entrée. Ce ne fut pas si difficile qu’elle l’avait escompté, alors pourquoi en serait-il autrement avec l’expédition ? Elle poussa d’une main fébrile ladite porte, dévorant la pièce du regard en quête d’une chaise, d’un lit, d’un meuble, qu’importe tant qu’elle pouvait s’affaler dessus.
Elle sursauta, rouvrit les yeux brutalement, et fit preuve d’un silence parfait pendant quatre secondes, pas une de plus, pas une de moins. Personne, bonne nouvelle. Prenant une longue mais inaudible inspiration, elle observa devant elle.
De l’eau. L’eau. Pure, souterraine, potable ; sa préférée. Ce minois si raidi se détendit alors doucement, l’air frustré laissant place à la plus passionnée des contemplations. Malgré l’obscurité de la caverne lugubre de Forgefer, l’eau se reflétait contre les parois du renfoncement, comme si le liquide lui-même dégageait une douce luminescence. Réalité ou simple fruit de l’imagination, elle l’ignorait et n’en avait pour ainsi dire que faire. C’est ainsi qu’elle demeura immobile durant quelques minutes à observer la surface de l’eau. Plate, lisse, tel un drapé de soie dont on aurait pris soin d’écarter tout plis.
Probablement s’était-elle assoupie ici par mégarde, les heures de sommeil qu’elle fuyait finissant par rattraper la fautive et lui accabler leur plus délicate étreinte. À présent, elle devait se relever, retourner vers la Garde Mystique de la cité et s’assurer que tout le monde serait prêt pour le lendemain. Son sceptre en main gauche, qui n’avait pas quitté son poste pendant son sommeil, reprit bien vite son rôle d’appui. Une, deux, et la voilà pousser sur sa jambe pour la tendre. Une crispation, une agonie, et elle reprit sa position agenouillée en retenant un hurlement, seul un gémissement étouffé parvenant à quitter ses lèvres.
Une minute plus tard, la tension à peu près redescendue, nouvelle tentative. Crispation, agonie, tant pis. Elle força, et la riposte fut si brutale qu’elle manqua de perdre connaissance. Coûte que coûte, la mage parvint à se relever, se crispant aussitôt sur son sceptre de ses deux mains pour adoucir d’une façon ou d’une autre son propre poids. Une nouvelle minute défila sans qu’elle ne bouge d’un pouce, trop occupée à reprendre un rythme respiratoire décent. Après quelques essais sur sa jambe, elle jugea que le retour serait périlleux, mais faisable. Quelques dizaines de mètres la séparaient de sa destination seulement, et c’était pourtant un parcours du combattant. Pathétique pensa-t-elle, avant de prendre la route en boitillant telle une octogénaire.
Un pas devint une râle, un autre un soupir. Le visage noyé dans la souffrance, elle progressa tant bien que mal, évadant son esprit de ce corps si faiblard. Elle pensa au lendemain. Demain serait épuisant. Dès le matin, se lever. Le soir, quitter le continent. S’assurer que rien ne manquerait une fois là-bas, que chacun possède assez de viande sèche le temps du trajet, ainsi de suite. Tant de tracas barbants qu’elle dut trouver un échappatoire, vite, très vite. De l’eau. L’eau. Salée, mais en abondance, apte à lui tenir compagnie sur le navire. Malgré les pas qui s’enchaînaient, elle décrocha un maigre sourire.
Et l’arrivée, alors ? Dodelinant sèchement de la tête, elle convint qu’elle serait probablement rapide, trop rapide, ne laissant même pas au groupe le plaisir de toucher la terre-ferme qu'il y aurait déjà fort à faire. Le climat, peut-être ? Froid par ici, polaire par là. Plus d’un s’en plaindra, tant pis tant qu’ils n’en meurent pas. Les rations ? D’ores-et-déjà insuffisantes, prions que la chasse soit bonne. En somme, un constat dont l’ensemble la satisfaisait, quand bien même quelques détails restaient encore à régler. Mais laissons le temps au temps.
Revenant à la réalité, à sa douleur tout comme à son allure de vieille mégère, elle fit face à la porte d’entrée. Ce ne fut pas si difficile qu’elle l’avait escompté, alors pourquoi en serait-il autrement avec l’expédition ? Elle poussa d’une main fébrile ladite porte, dévorant la pièce du regard en quête d’une chaise, d’un lit, d’un meuble, qu’importe tant qu’elle pouvait s’affaler dessus.
Srem
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