Premiers pas.
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Premiers pas.
An -62, Royaume de Quel’thalas.
Sourcils froncés, regard perçant et expression implacable, il se figea l’espace d’une seconde. La posture fut jugée par une dizaine d’individus l’entourant. Le verdict fut sans appel et qualifié de « Bien. » ce qui pouvait se résumer par « Pas mal, mais à travailler. »
Puis la corde se relâcha. La flèche jusqu’alors plus inerte qu’une statue prit son bref élan pour se diriger sans hésitation aucune jusqu’à sa cible. Elle frappa finalement en son centre. Tous se tournèrent alors vers l’instructeur, à qui l’on aurait volontiers donné un âge respectable mais toujours fougueux. Bardé de cicatrices et le port farouche, il posa ses yeux bleuâtres sur son élève en se massant le menton, qui était dévoré par une barbe mal rasée vieille de quelques jours tandis que quelques balafres apportaient à cette dernière une certaine irrégularité. Il s’apprêtait à parler, ses lèvres manifestant les mouvements caractéristiques, puis se ravisa en tournant la tête d’un geste sec vers la porte Sud de la place des éperviers. Les lieux, jusqu’à présent animés de quelques Rangers en formation, de forgerons et de quelques commerçants, prit bien vite un tout autre aspect à l’arrivée de nouveaux venus. Ce qui ressemblait à un terrain vague aux apparences nobles devint bien vite l’équivalent d’un gigantesque bureau où les ententes feraient bon train.
Quelques silhouettes de distinguèrent. Celle de deux vétérans à la démarche fière, puis trois autres, légèrement moins hautes ; puis une dernière plus grande que toutes les autres, présente sur le flanc droit. Et finalement, derrière, quelques soldats portant de rutilantes bannières. Le groupe s’avança sur l’allée avec prestance pour finalement s’arrêter au croisement joignant les deux entrées. L’instructeur leva la main vers les élèves, impassible.
- Continuez votre entraînement, je reviens.
Ainsi les élèves obéirent-ils, se dispersant en reprenant leurs arcs, venant s’aligner avec leurs cibles respectives. Le vétéran s’approcha du groupe pour finalement s’incliner respectueusement devant eux, se relevant en observant premièrement les adolescents et pour finir les paternels ; ces derniers vêtus tous deux d’une robe aux couleurs variant entre le noir et le bordeaux, tandis que quelques coutures dorées venaient agrémenter les contours.
- Madame, monsieur ; que me vaut l’honneur de cette visite ?
Son ton était neutre, ne permettant de distinguer aucun saut d’humeur. Nul doute en tout cas, il n’était pas avenant. L’hypocrisie ne semblait pas être sa tasse de thé et il n’hésitait pas à le faire comprendre, aussi se contenta-t-il de les fixer en croisant les bras, lançant l’espace d’un bref instant un regard incisif aux deux nobles.
- Bonjour, Ereldan. Nous sommes venus vous voir pour la cadette. Après maintes tentatives, celle-ci ne parvient et se refuse à poursuivre dans l’enseignement arcanique. Aussi lui avons-nous accordé notre compréhension en lui demandant quelle voie elle souhaitait suivre, et ainsi nous voilà ici.
Ereldan tourna légèrement la tête pour observer la concernée. Jeune blonde vêtue d’une somptueuse robe digne des apprentis les plus talentueux, elle lui rendit le regard, bien que le sien put être qualifié de moins avenant. Sourcils naturellement froncés et fond inquisiteur, l’adolescente continuait de le toiser ; celle-ci arborant d’ores-et-déjà près d’un mètre quatre vingt-dix tandis que l’homme se contentait de deux imposants mètres. Malgré ce visage agressif, il parvint à distinguer un souhait. Souhait que lui seul serait capable de concrétiser. Aussi regarda-t-il à nouveau les paternels, acquiesçant à deux reprises.
- Est-ce ce qu’elle souhaite ? Je me refuse à instruire les désinvoltes.
- Absolument. Athial ne cesse de nous le demander depuis quelques mois maintenant. Il ne lui manque plus qu’à faire ses preuves pour justifier un tel engouement.
- Bien, bien. Commençons dès maintenant, alors.
Le paternel fit signe à sa descendance de quitter les siens pour le rejoindre, ce qu’elle fit sans expression aucune, se rangeant au flanc droit de l’individu. Ce dernier observa alors les autres. Nera et Adenn siégeaient dans de splendides armures thalassiennes, animées de coutures plus minutieuses les unes que les autres ; tandis que Nathel se contentait d’une tenue simple et sobre ; presque invisible en comparaison aux deux divas. Il dodelina de la tête, gardant ses pensées pour lui, pour finalement incliner la tête.
- Ainsi soit-il. Je veillerai à vous communiquer mensuellement ses progrès.
Ils acquiescèrent, puis se détournèrent pour retrouver le groupe de fantassins, l’ensemble retournant d’où il venait avec sa prestance innée. Il soutint le regard jusqu’à les voir disparaître, pour finalement cligner des yeux. Ils ne la verraient plus des mois durant si ce ne sont des années, et ils ne prirent même pas la peine de se dire au revoir. Il reprit derechef son impassibilité suite à ces pensées, observant la demoiselle.
- Athial, donc.
- Oui, sire.
- Appelle-moi Ereldan, plus simplement. Bien, suis-moi.
Il se dirigea vers un bâtiment, y entrant. Une sorte de caverne l’Alibaba, mélangeant armes, tenues, vivres et autres joyeusetés. L’apprentie analysa l’ensemble avec stupéfaction, presque émerveillée par tout ce fouillis. L’instructeur quant à lui observa à gauche, à droite, fronçant les sourcils. Finalement, son visage redevint serein lorsqu’il s’approcha d’une caisse. Il ouvrit le couvercle de cette dernière et y plongea ses mains, pour en ressortir une tenue de forestier verte et simple. Il se retourna et jeta l’ensemble sur la demoiselle, qui récupéra l’ensemble dans ses bras, tirant une expression outragée.
- Bien, change-toi. Je vais te trouver un armement adapté pendant ce temps.
Elle tourna la tête à droite, à gauche. Malgré tout ce bordel, elle ne trouva nulle place où se changer à l’abris des regards indiscrets, ou tout du moins de cet homme qu’elle ne connaissait à peine. Ce dernier nota l’expression qu’elle portait et enchaîna d’une voix placide.
- Mets-toi dans un coin et change-toi. Je ne compte pas regarder.
Elle lui lança un regard accusateur, pour se diriger avec désinvolture jusqu’au lieu nommé, le fixant. Il sourit et se releva, se dirigeant vers l’autre bout de la pièce où étaient disposés les arcs, carquois et lames prévues pour les recrues. Alors se changea-t-elle, relevant régulièrement le regard pour l’observer, s’assurant qu’il tenait parole. Ce qu’il fit, puisqu’il semblait plongé dans sa recherche, décrochant parfois une arme du mur pour la soupeser, en retirant une moue insatisfaite. Il continua ainsi tout du long, pour finalement trouver son bonheur, se retournant vers l’adolescente alors vêtue de la tenue qu’il lui avait au préalable fourni. Il l’observa des pieds à la tête, neutre. Sa robe cachant auparavant ses formes à présent troquée contre une tenue collant la silhouette laissait apparaître quelques formes enviables. Il s’épargna l’impolitesse de lorgner et fixa ses yeux, lui faisant comprendre qu’il serait judicieux qu’elle approche. Athial le fit, détournant le regard une fois face à lui pour observer les armes que le vieux renard tenait entre ses mains.
- Bien, cela devrait te convenir.
Il lui plaqua à nouveau l’ensemble entre les mains, et elle fut bien obligée de les accepter, observant le tout de son regard d’enfant, presque émerveillée. Il laissa le carquois présent à son épaule glisser pour le récupérer d’une main, relevant ensuite les yeux sur la jeune femme.
- Je peux ?
Elle haussa un sourcil en observant ledit carquois, puis acquiesça. L’homme avança alors d’un pas pour se retrouver littéralement face à elle, levant les bras pour faire passer l’objet dans le dos d’Athial, tandis que la sangle passa autour de sa tête pour finalement se loger à son épaule.
- Voilà. Cela te va à ravir.
- Merci.
- En route.
Elle récupéra sa robe entre ses bras croisés puis ils ressortirent, se dirigeant vers le centre de la place ; Ereldan faisant un signe à ses élèves, se plaça devant tandis que l’elfe teigneuse se plaça à nouveau à sa droite. Les forestiers les rejoignirent aussitôt, formant un demi-cercle devant eux.
- Je vais m’absenter quelques heures avec Athial, nouvelle venue parmi nous. Alerna sera prévenue et viendra poursuivre votre enseignement durant mon absence. Soyez sages.
Dit-il, sur un ton plaisantin. Tous acquiescèrent pour ensuite retourner à leurs occupations respectives. Il se tourna alors vers sa protégée, haussant un sourcil.
- Tu n’as rien contre cette initiative, j’espère.
- Non, non.
Ils se dirigèrent vers le Sud, quittant la place pour traverser la Bourse Royale. D’une part, Ereldan avançant d’une démarche déterminée, presque bestiale. De l’autre, la jeune ; qui parvenait avec difficulté à satisfaire sa démarche habituellement noble. Il faut dire que de passer du tissu au cuir la déstabilisait. Ils continuèrent ainsi leur chemin, parvenant aux portes de la cité.
- Sire, nous devrions nous diriger jusqu’aux enclos. Mon destrier s’y trouve.
- Ereldan, pas sire. Je n’ai rien d’un sire. Et non, pas de destrier. Si tu n’aimes pas marcher, fais demi-tour et retourne dans ta bibliothèque.
- Je ne vous permets pas d’employer un tel ton avec moi !
- Mais moi si. Et puis...
Il pencha la tête, la laissant le dépasser de quelques pas. Il observa sa démarche et fronça les sourcils, s’approchant alors pour donner une tape sur la fesse droite de la jouvencelle. La riposte ne se fit pas attendre et elle se retourna d’un geste vif et calculé, sa main se dressant tandis que son bras exécutait au même titre que le reste de son corps un mouvement circulaire pour que la paume de sa main vienne heurter la joue meurtrie de son mentor. Et pourtant, ce dernier leva son avant-bras d’un geste plus éclair encore. À tel point que la demoiselle ne le réalisa que quelques secondes après l’impact, constatant avec perplexité que son avant-bras était simplement bloqué par la main du vétéran. Elle constata un bref instant l’état de cette dernière. Abîmée de toute part, elle n’en demeurait pas moins fine et élancée. Les doigts étaient longs, harmonieux. Elle éleva son regard jusqu’aux yeux de l’homme, lui jetant un mépris sans borne.
- Comment osez-vous ?!
- Décomplexe-toi. On dirait que tu as un bâton entre les fesses. Tu souhaites devenir Ranger, mh. Dans ce cas, oublie tous ces codes futiles que l’on t’a enseigné.
Il relâcha le bras de la jeune femme pour venir caresser son bras un court instant avec délicatesse, laissant au final son propre bras retomber pour revenir à sa place initiale, à savoir le long de son corps. Ils s’observèrent ainsi une dizaine de secondes, se fixant avec profondeur, avant que la demoiselle ne vienne briser cette harmonie.
- Cela ne vous autorise pas à me toucher, vieux pervers !
- Tout de suite les grands mots. Je ne fais qu’être direct pour accélérer tes progrès.
- Hmpf.
Ils continuèrent ainsi leur route, quittant peu à peu la civilisation pour laisser place aux resplendissantes forêts thalassiennes, plongées dans un éternel printemps. À présent à plusieurs heures de marche du premier contact possible, Ereldan leva la main sans se retourner, menant le duo. Il observa à gauche, à droite et même en haut, dans les feuillages ; pour finalement acquiescer, satisfait.
- Bien, arrêtons-nous ici.
- Qu’allons-nous faire ?
- Tu verras.
Il s'assit en tailleur sans prévenir, ses bras venant reposer sur ses cuisses. Il tourna la tête vers elle, l’incitant à venir s’asseoir face à lui en tapotant l’herbe de la main. Elle haussa le sourcil pour finalement se laisser convaincre, venant s’asseoir si ce n’est s’allonger, ses coudes en retrait supportant son buste tandis qu’elle croisa les jambes, ces dernières à moitié courbées. Une posture décontractée que le vétéran ne put s’empêcher d’admirer, détaillant la moindre parcelle de chair de la jeune femme qui le remarqua, se contentant de sourire sans prononcer mot.
- Et bien. Je constate un net progrès.
- J’ai toujours été ainsi. Simplement que j’ai l’habitude de me plier aux dogmes de la noblesse. Et je ne pense pas qu’elle soit présente ici même.
- Effectivement. Je suis issu d’un forgeron et d’une couturière d’un village dont le nom n’est connu que par les couches populaires.
- Mes paternels pourraient vous offrir une demeure dans le domaine, si vous faites de moi un fin archer.
- Sans façon, merci. Je n’ai d’autre foyer que ces bois et je n’en souhaite pas d’autre.
Elle fit une brève moue, comprenant ensuite que d’ici quelques décennies, elle en viendrait peut-être à dire la même chose. Toute cette entreprise n’était pour elle qu’un rêve de gamine qui se réalisait, et par conséquence ne parvenait-elle pas à s’imaginer son futur quotidien ; uniquement quelques instants clés et idéalisés. Alors se contenta-t-elle d’opiner, plus ou moins compréhensive.
- Comment se fait-il que Père vous connaisse ?
- C’est une longue histoire. J’ai travaillé pour lui, fut un temps. Nous étions bons amis.
- Vous employez l’imparfait. Relation révolue ?
- Je ne veux pas en parler.
Elle dodelina de la tête d’un air insatisfait, détachant ses yeux de son interlocuteur pour observer le paysage. La forêt, à perte de vue. Pure et parfaite, elle était parsemée de couleurs chatoyantes. Un preste-patte au loin, un faucon-dragon ailleurs ; les espèces locales s’accordaient à la perfection avec ce cadre.
- Que vois-tu.
- De belles choses.
- Mais encore. Tu devras ne faire plus qu’un avec la nature pour être un Ranger digne de ce nom.
Elle haussa vaguement les épaules. Alors il se leva lentement pour faire quelques pas et ainsi se retrouver juste derrière elle. Il s’assit de nouveau et posa ses mains sur les épaules de la demoiselle, approchant sa tête près de la sienne, lui détaillant le paysage d’une voix calme.
- Bientôt, tu verras ce que nul autre ne voit. La nature est timide, mais loquace lorsqu’on tend l’oreille. Là où tu ne vois qu’un paysage grandiose, il y a toute la vie qui s’y déroule. Regarde, là-bas.
Il leva un bras mou, pointant de l’index un point pour dessiner un chemin d’un geste horizontal. Elle suivit le doigt des yeux pour observer les lieux désignés.
- Il y a quelques heures environ, trois prestes-pattes sont passés par ici. Une famille.
- Vraiment. Qu’est-ce qui vous fait dire cela.
- Oui. L’herbe est légèrement affaissée là où leurs pattes se sont appuyées. Dans quelques décennies, cela te sautera aux yeux.
- Hm.
Et ils continuèrent ainsi des heures durant, le vétéran désignant successivement des branches, des troncs, des recoins ; et commençait à instruire la néophyte. L’expédition qui devait s’achever dans la soirée se poursuivit sans que les protagonistes ne s’en rendent compte. Ils étaient bien et laissaient filer le temps. Tous les soucis d’Azeroth leur passaient à présent au-dessus de la tête ; et alors que la nuit s’apprêtait à couvrir le ciel, Ereldan posa sa tempe contre celle d’Athial ; tous deux observant le lointain. Elle se dégagea un peu, tournant la tête pour le détailler une bonne quinzaine de secondes, souriant finalement en coin pour reprendre sa position précédente.
Srem
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