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Plus dure sera la chute.

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Message  Meldiriel Dim 02 Nov 2008, 07:10

[Hier, avant le coucher du soleil.]


Tout s'en va, tout se dissipe déjà. Ne restent que les impressions, des arrêts sur image brefs et violents, qu'il est difficile d'exprimer avec des mots.

Berceau de l'Hiver. Le sang frais sur la neige, de l'exacte couleur d'une fleur éclose. Le bruit de la lutte, de la colère, des cris, du drapeau qui flotte au vent à deux pas du vide. L'air vif et sec, plus tranchant qu'une lame de couteau, typique des hauteurs montagneuses. Puis une détonation - comme un bruit blanc - et la chute, enfin. Interminable.

En dévalant les hauteurs vertigineuses, il ne poussa pas un cri. Tout s'était passé si vite qu'il n'avait pas eu le temps de réaliser qu'il tombait, de toute façon : alors même qu'il s'était élancé sur son adversaire, persuadé de le tenir enfin, l'explosion l'avait soufflé en arrière. Ses talons s'étaient arrachés à la poudreuse et le gouffre l'avait avalé sans attendre.

Au premier choc contre les rochers, plusieurs de ses os se brisèrent. Douleur, inconscience. Mais la chute ne faisait que commencer, et la route était longue avant le sol. Trois, cinq, dix fois son corps embrassa les flancs acérés de la montagne, avant de tomber comme une pierre dans les eaux glacées qui bordaient la frontière nord d'Azshara. Aussi déchiqueté que le récif qui se dressait hors de l'eau, tout près, il coula à pic, et l'océan silencieux l'engloutit tout entier.

---

" Le reflux est venu vers moi comme une mer ;
la vieillesse m'a terni
et bien que je m'en afflige
elle s'approche joyeusement de sa proie.

La vague du flot
et la seconde, celle du reflux ;
elles viennent toutes à moi
de sorte que je les reconnaisse.

Le flot de la vague,
que le silence de ma cellule ne l'atteigne pas !
Bien que mon escorte soit grande dans l'obscurité
une main s'est posée sur eux tous.

Ceci est beau pour une île de la grande mer :
le flot vient après son reflux ;
mais moi, je ne m'attends pas
à ce que le flot vienne après que le reflux m'a touché.

C'est tout juste s'il y a aujourd'hui un endroit
que je reconnaîtrais.
Tout ce qui était dans le flot
est dans le reflux.
" *

---

- Relève un peu les yeux, grand frère, ou ce livre va finir par te rendre aveugle. "

La voix est amicale et enjouée, peut-être un peu moqueuse - familière quoi qu'il en soit. Avec un sourire, il obtempère. Tout autour se dresse l'architecture glorieuse et impressionnante d'Eldarath, et le dôme du temple de Zin'Malor resplendit au soleil. L'air est saturé d'Arcane. Non-naturel, mais aussi agréable qu'une drogue. L'Elfe qui lui fait face est tout autant élancé et élégant que lui-même (nous étions si orgueilleux, si pleins de notre propre importance, je me rappelle), mais ses cheveux sont d'ébène quand les siens sont d'argent. Il ne distingue pas son visage (ai-je déjà oublié à quoi tu ressemblais ?), mais sans doute est-ce à cause du soleil, qui de sa lumière écrase tout. Il parvient cependant à deviner le pli du sourire, l'arc caractéristique, presque sensuel, des lèvres : le sourire hautain de son peuple.

- Aucun livre ne saurait me priver de mes yeux, répond-il avec lenteur en se redressant, abandonnant son ouvrage. J'espère que tu ne me déranges pas pour rien ?
- Jamais pour rien, grand frère, réplique l'autre. Jamais pour rien. Viens avec moi, et écoute. J'ai avec moi quelques rumeurs à te faire partager, je suis sûr que tu les trouveras à ta convenance.
- Allons bon. Je te connais assez pour savoir que tu ne te montres généreux qu'avec ce qui est inutile, et avare pour toutes les choses qui ont vraiment de l'importance.
- Pas cette fois-ci, grand frère. Tu verras bien, la Bien-Aimée elle-même devrait l'annoncer prochainement. Elle choisira les meilleurs d'entre nous -les meilleurs, grand frère !- et nous enverra nous installer plus loin au sud-ouest, dans l'une des régions limitrophes. Nous aurons notre cité à nous.
- Quelle drôle d'idée... Pourquoi ?
- La Bien-Aimée pense à raison que certains secrets doivent rester hors du portée du peuple. Décision judicieuse, n'est-ce pas, et si logique ! Seule l'élite peut légitimement prétendre l'accès au vrai Savoir. Je sais déjà le nom de celui qu'elle placera à notre tête, là-bas.
- Et quel est-il ?
- Tortheldrin.
"

---

L'eau tout autour, froide, noire, opaque. Les écailles rêches des vandales-des-flots frôlaient parfois ses flancs. Tout son corps était brisé, et son sang montait vers la surface - loin, loin au-dessus, inaccessible - comme des volutes pourpres, paresseuses. Il n'était plus sûr de respirer encore. Il n'était même plus sûr d'être vivant.

(Pardon, Ayame, pardon, Nean, et les autres, tous les autres. J'ai fait ce que j'ai pu - c'est vrai. Mais maintenant, il n'est plus temps de lutter. C'est trop tard. )

La douleur, fracassante, comme un écho de la chute.

( Trop tard. )

---

Et puis, là, le silence.

---

( "Ouvre les yeux, grand frère, ou tu finiras aveugle." )
( ... Toi ? Je suis mort, n'est-ce pas ? )
( Allons, tu es mort tellement de fois. Ne dis pas de bêtises, et souviens-toi plutôt de ce qui t'a toujours rappelé à la vie. Souviens-toi de tes propres mots. "Il n'y a pas de crainte à avoir aux portes de la mort, car la mort reste rarement chez elle". )
( Je me souviens. Mais cette fois, c'est différent. Je m'entends penser, et je t'entends, toi ; mais j'ai beau ouvrir les yeux, je ne vois rien. Suis-je devenu aveugle, petit frère ? )
( Non... Non. Il n'est pas temps, encore. Appelle les souvenirs qui te restent, réinvente la vision. Tu te rappelles du visage de la Bien-Aimée, n'est-ce pas ? )
( Oh, oui. Je me souviens d'Azshara, de la beauté d'Azshara, et de sa voix, et de ses yeux, et de ses mains. Je me souviens comme son charisme nous enveloppait tous et nous mettait tous à genoux, comme pris d'ivresse. Je me souviens des colonnes étincelantes de Zin'Azshari, des jardins et des fontaines, et des cours pavées. Je me souviens des parfums du Puits. )
( C'est bien. Tu te souviens de l'essentiel. Tu te souviens du Puits. Et le Puits se souvient de toi, aussi. )

---

Il sentit, dans la torpeur lourde qui l'engloutissait lentement, que quelque chose l'avait saisi. Et ce n'était pas les crocs acérés d'un vandale-des-flots venu se repaître d'une proie agonisante. Ce n'était même pas les pinces cliquetantes d'un chasseur Makrura en maraude. C'était froid et écailleux, certes, mais beaucoup plus calme, beaucoup plus doux.

Il se laissa emporter sans avoir le choix, entrouvrit les paupières malgré la pénombre glauque, sous-marine, qui brûlait ses yeux. Autour de lui nageaient des corps souples et scintillants comme des armures de nageoires, de palmes et de griffes, de noeuds de serpents. Mais ce qu'il vit surtout, avant que l'inconscience ne l'étreigne tout à fait, ce fut le visage attentif et déformé penché sur lui, ce fut le sourire sur des lèvres autrefois pleines et vivantes, désormais bleutées, squameuses, craquelées.

Et c'était le sourire hautain, caractéristique, presque sensuel, de petit frère.


* "La vieille de Beathag", Complainte irlandaise


Dernière édition par Meldiriel le Mar 10 Mar 2009, 16:42, édité 3 fois
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Message  Ayame/Lòssë Dim 02 Nov 2008, 23:36

Sur les rives d'Azshara...
C'était là qu'elle avait trouvé refuge.
C'était là qu'elle se trouvait, malgré sa haine et sa répulsion.
La crainte et l'attrait.
L'aversion et l'adoration.
Le dégout et l'extase.
Le double et le tout.



La nuit s'installe, nonchalamment elle étire sa nappe constellée de myriades d'étoiles sur l'étendu du ciel.
Quelques cris, ici et là, accompagnent son ascension.
Des gémissement plaintifs, des reproches face à l'avancée des Ténèbres.
Ou des acclamations des êtres nocturnes, accueillants la pénombre comme il se doit.

Les yeux mi-clos, les bras entourant mes jambes ramassées contre ma poitrine pour me recroqueviller sur moi-même, je contemple mon misérable brasero, presque éteint, car voilà un moment que je ne l'entretiens plus.
Je m'amuse en silence du ballet des flammes, parfois, d'un mouvement inconscient, je recule légèrement, comme pour chasser la lumière du feu qui réussit à atteindre l'ourlet de ma robe.
Fuyant l'étincelle pour me replier dans les ombres, mes Ombres.

Le froid me saisit, ou peut-être est-ce autre chose...
Je ferme alors totalement les yeux, m'abandonnant à la brise vicieuse qui caresse et mord la peau nue de mes jambes.
C'est ainsi, que pour tromper le silence je me mets à chanter, une mélopée ancienne qu'il me semblait avoir oublier.

"Sombrer, les yeux clos, se délecter d'une trêve
Croire enfin au repos, a l'abri d'un rêve

Utopique liberté, s'enfuir de ce monde
Devenir éthérée, s'enchaîner dans les songes
Si demain n'est pas né, le passé se meurt
Si le présent est nié, le destin vous pleure

Vous pensez trouver l'issue, là, dans la nuit
Une porte inconnue, vous est ouverte à minuit
Grâce à la clef du sommeil, on y pénètre, on s'assoupit
Pensant découvrir monts et merveilles, mais déjà on frémis

Elle est là, tout près, et vous sonde !
Tapie, a l'affût, derrière vos chimères
Les Landes oniriques ont leur Cerbère
Elle est là, prostrée, et vous gronde !

Elle approche, la charogne
Vous l'entendez, elle grogne !
Elle bondit, agile prédatrice
Vous criez, elle vous griffe !

Milles tourments vous enserrent, telles des ligatures invisibles
Milles maux vous blessent, Tel un couperet malhabile
Vous débattre est inutile, courir est interdit
Votre inconscient maladif, ne trouve aucun répit

Dans ce monde ou dans l'autre, tout n'est qu'illusions
On peut perdre le contrôle, par simple déraison
Promesses d'agréables pensées, de nymphes accueillantes
Mais ici nul Morphée, nulles compagnes avenantes

Elle est là, la bête d'Ombres
Démon du malin, amant forcé de votre vie à trépas
Votre corps n'est qu'un pantin, c'est de votre âme qu'elle veut faire son repas
Elle est là, Maudit songe...

Elle vous mord, elle vous broie
Vous reculez, elle se déploie !
Elle vous gifle, elle vous brûle
Vous vous débattez, elle hurle !

Se réveiller, le regard perdu, elle s'est couchée, elle n'est plus
Votre souffle est court, haletant et rauque
Vous êtes encore effrayé, de cet insidieux hôte

Est-ce là un hasard ?
Ou bien, est-ce que ce soir
Vous n'avez pas été, la proie, d'une créature nommée Cauchemar ?"



Je me fais surprendre par l'avènement d'Hélios et son cortège.
Ma voix s'est tue, mon brasier à prit fin, et la lune n'est plus.
Je me lève d'un geste brusque, trop soudainement, mes jambes vacillent et je tangue.
Mes membres engourdis par mon inactivité hurlent leur mécontentement, et je suis saisie par une sensation désagréable.
Un frisson de fatigue me parcourt l'échine, mon ventre se noue, et ma nuque se courbe..
Peu à peu, je recouvre l'équilibre, mes courbatures disparaissent et mon épuisement s'amenuise.
Pourtant, là en mon ventre, cette sensation désagréable persiste...

Le froid me saisit..ou peut-être est-ce autre chose...
Ayame/Lòssë
Ayame/Lòssë


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Message  Fanélia/Nean Lun 03 Nov 2008, 14:29

Cours, cours! Dépêche-toi bon sang...
Le tigre de Neaniel galopait déjà depuis une bonne heure dans les ruines de l'ancien palais. Sa cavalière grommelait ne trouvant aucun indice sur la terre ferme, alors elle alla vers le récif au Nord. Elle grimpait, puis chutait, jusqu'à arriver à la mer. Cette même mer qui d'après les amis de Meldiriel devrait le recouvrir de toute son eau.
L'elfe sauta de son tigre, enleva quelques pièces d'armure et ses armes, elle sentit le sable gelé sur ses pieds et se dit que la mer devait être bien froide.

- Tsss...Ca me saoule.

Neaniel caressa son tigre une dernière fois avant de plonger. Elle ne savait où chercher, elle était mal organisée, mais toujours courageuse. Elle arriva sur une côte verte, légèrement de l'herbe poussait un peu partout par ici. Neaniel sortit la tête de l'eau en secouant ses cheveux, elle avait déjà froid, elle grelotait.

- Là bas peut-être...

Elle leva la tête et vit une crevasse qui n'en finissait pas. Aussi haute que les nuages. Elle connaissait, en haut c'était le Berceau de l'Hiver, sa terre natale. Elle reposa son regard sur la terre ferme et nagea jusqu'à la rive. Une fois dehors elle marcha quelques minutes dans l'espoir d'avoir ne serait-ce qu'un indice sur la disparition du Bien-né. Elle s'arrêta net, quand elle aperçut une elfe au sol, avec une longue trainée de sang. Elle s'approcha, elle la connaissait.

- Tiens, tiens, comme on se retrouve...Terale. T'as l'air bien mal en point dis moi.

Neaniel éclata d'un rire mesquin, puis elle soupira, dépassée par les évènements. Elle leva la tête, regarda autour, rien pour la porter. Elle vérifia si son coeur battait encore et oui.

- Je devrai te laisser là ...baigner dans ton sang...Tss...

Neaniel reprit le trajet inverse, laissant Terale contre l'herbe. Elle avait du chuter de haut elle aussi. Neaniel retourna au point où elle avait laisser ses affaires et son tigre. Elle se rhabilla et décida de retourner à Cabestan voir les autres pour les prévenir. Elle chevaucha son tigre qui râlait d'avoir faim. Puis elle se mit en route. Mais...elle retourna la tête quelques instants, une drôle d'impression d'être suivie. Elle chassa cette idée et promit à son tire un sanglier entier si il se dépêchait.

-Dépêche, je crois qu'on est suivi...

Elle arriva où elle avait laissée les autres, Idrid, Cheena, tsadkiel, Moroana, Guiche, et le gros chauve Coeur Ardent. Elle prévint alors qu'elle avait retrouvé la soeur d'Irhondril morte. En disant morte elle savait que les gens allaient vite rappliquer de toute façon.

Tsadkiel et Cheena ont alors accompagné Neaniel au point de chute. Terale fut sauvée et emmenée à l'hôpital de Hurlevent. Ils sont repartis aussi vite qu'arrivés. Mais Neaniel, elle, n'avait pas fini de chercher Meldiriel.

Elle plongea alors, nageant de longues heures. Elle ne trouvait rien sous l'eau, à part des fois des murlocs orphelins ou des tortues de mer. Bien maigre butin. Elle retournait à la surface prendre l'air qui lui était nécessaire. Elle chercha toute la nuit, mais toujours rien. Epuisée, à bout de souffle, elle échoua sur le rivage et se laissa choir sur le sable. A peine sortie de l'eau elle sentait son corps se refroidir. Elle était fatiguée de tout ça, et ne pensait bientôt plus à rien...peut-être le sommeil venait à elle. Mais non, un bruit sourd retentissait encore. Le même que les dernières fois, elle savait ce que cela voulait dire. Elle se boucha les oreilles et se mit en boule sur le sable qui lui collait à la peau.

-Non pas maintenant..pas ça...pas maintenant....NON!


Elle se mit à hurler que ça s'arrête que le bruit cesse, mais il n'en était rien. Soudain elle vit l'eau bouger dans un remou, au loin, la terre tremblait, et elle était toujours au sol suppliante. Elle écarquilla les yeux, laissa ses oreilles libre de l'emprisonnement de ses mains, et l'elfe commença à marcher à quatre pattes comme elle pouvait en direction du continent, voulant fuir la mer.
Elle était apeurée, voulant parfois se remettre debout sur ses pieds, rien elle retombait aussitôt dans la panique. Elle le savait si elle se retournait pour voir la mer elle y verrait cette chose.
Fuir était son seul instinct de survie, mais ses muscles étaient ankylosés d'avoir autant nagé. Elle se laissa retomber sur le sable de tout son long, la bête derrière elle faisait déjà de l'ombre sur la plage. L'elfe ferma les yeux, elle aurait voulu être plus petite que jamais...mais quand elle les rouvrit, elle vit une botte et le pendant d'une robe rouge juste devant son nez.

-Alors Snowhisper, on rampe déjà à nos pieds ? La voix avait un accent étrange, peu commun.

Neaniel releva la tête, elle entendait très mal à cause du bruit qui résonnait toujours dans sa tête. Comme un grondement sourd prêt à tout écraser. Le bruit, la bête, et maintenant quelqu'un. Qui était-ce? Elle n'eut le temps de poser la question, qu'elle ferma les yeux, assommée d'un grand coup sur la tête.
Ils étaient deux, des elfes de sang tout vêtus de rouge et d'or, en robe. Ils repartirent très vite, ne laissant que le tigre de Neaniel, emportant avec soin toutes ses affaires qu'elle avait laissé pour aller nager.
Le petit cortège disparut dans la nuit qui promettait encore d'être longue.
Fanélia/Nean
Fanélia/Nean

Personnages Joués : Fanélia, Nean, Laclef

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Message  Meldiriel Lun 03 Nov 2008, 15:19

" J'ai rêvé d'un pays noir, où tout était noir.
Noir, non seulement au dehors ;
Noir, noir jusqu'à l'os, jusqu'à la moelle.

Noire l'étoffe, et noir l'esprit,
Noir le visage, et noir le soucis,
Noire la veine, et noir le sang et
Noire la moelle, et noir l'os.

D'une autre couleur est le vernis fugace de la lumière solaire.
Le soleil est le peintre des couleurs.
Noire est la vase interne de la terre.
Ce n'est pas la lumière qui peint le noir de son fin pinceau rayonnant, non :
Noire est l'âme cachée de la matière.
" *


---


La nuit, dehors. Alors que les bougies teintent de pourpre et d'or les lourdes tentures de l'alcôve, lui, assis en tailleur, un verre d'un breuvage presque noir entre les doigts, lève les yeux vers son interlocutrice. Tous deux parlent à voix basse et s'échangent des regards complices, dans lesquels il serait pourtant inutile de chercher de l'amour, ou même de l'affection.

- Je sais que je peux avoir confiance en toi, lui dit-elle, parce que notre petit marché sert tes propres intérêts. Et tu n'es fidèle qu'à ceux-ci, Meldiriel.
- C'est vrai, répond-il en souriant. Au point de trahir jusqu'à mon propre sang si cela peut m'être utile. "

Elle se renverse dans les coussins et le jauge par en-dessous, d'un regard pointu et fin. S'il tient sa coupe, avec négligence, il se garde pourtant d'en boire la moindre gorgée.

- Ton frère ne se doute de rien, tu es sûr ? reprend-elle.
- Ni lui, ni personne. D'autant moins que tu devais être la cible de notre arrangement, à lui et moi. C'est là toute la beauté de la chose, tu vois ? La plupart des gens s'attendent à tout, sauf à ce que je le laisse tomber, lui.
- Jouer sur la surprise donne toujours un coup d'avance.
Elle hoche la tête. A notre victoire prochaine, alors.
- Et à Eldre'thalas.
"

---

( J'étais si sûr et si impatient de partir à Eldre'thalas, grand frère. Moi aussi, je voulais protéger les secrets de la Bien-Aimée, je voulais ma place auprès des autres Gardiens du Savoir. Mais voilà, la Reine ne désignait que les meilleurs, et nous étions nombreux, si nombreux... Te souviens-tu de tous les complots que nous avons ourdis ensemble ? De Suiel qui a perdu l'usage de sa main gauche ? D'Aytrala qui s'est égarée dans le Néant Distordu ? Et de tous les autres qu'il a fallu écarter du choix de la Bien-Aimée ? )
( Je me souviens. )
( Mais tu était un manipulateur talentueux, grand frère. Tu as su te défaire de moi quand tu t'es aperçu que je risquais de mettre en péril tes ambitions. J'ai même cru que c'était de ma faute, tu sais, lorsque je me suis retrouvé aveugle à la suite d'un rituel magique que je pensais mal contrôlé. Tu étais désolé pour moi. Tu avais l'air sincère. J'ai mis du temps avant de comprendre. )
( M'en veux-tu encore ? )
( Non, grand frère. Non, je ne t'en veux pas. Car si toi tu as pu parcourir les grandes allées d'Eldre'thalas, moi, j'ai été auprès de la Bien-Aimée quand nous avons ouvert les Portails à la Légion. Je suis tombé avec elle, et quand les flots se sont refermés sur Zin'Azshari, ils se sont refermés sur moi aussi. La saveur du Puits est différente aujourd'hui, grand frère, au fond de l'eau : mais cela reste le Puits. Et la Bien-Aimée... Est toujours la Bien-Aimée. Tu verras, grand frère, tu verras.)

---

Dans le ventre noir de l'océan, le temps s'écoulait d'une manière étrange, allongée, comme une nuit qui n'en finirait pas. Il lui semblait être resté inconscient pendant plusieurs éternités - et même maintenant, il n'était pas sûr d'être tout à fait dans le réel.

Autour, tout était noir et froid, dans la caresse indifférente de l'eau. Sa vision brouillée lui laissait deviner de grands monceaux de ruines, des colonnes brisées, des fontaines fracassées et des statues mortes, vestige d'une ville dont il n'avait peut-être jamais connu le nom. Il y avait des coraux éclatants en guise de végétation, et des bancs de poissons aux flancs argentés passaient parfois comme des éclairs, loin au-dessus, tel un rapide vol d'oiseaux. Mais tout ceci, comme le visage de petit frère qu'il voyait de temps en temps se pencher sur lui, et comme les voix sifflantes, étrangement mélodieuses, qui conversaient parfois autour de lui, n'était peut-être que la vision hallucinée d'un esprit à la dérive.

La seule vraie chose réelle, d'une éclatante précision, était la douleur. La douleur, partout, tout le temps, vive et blanche comme la plus intense des extases. La douleur dans le moindre de ses os, sourde et lancinante, à mesure qu'une lente régénération restaurait tout ce que la chute lui avait brisé.

---

( Tout ira bientôt mieux, grand frère. Nous nous occupons de toi. Il y a du temps, cependant, avant que tu ne reviennes totalement à toi, et avant que nous ne te laissions aller. )
( Tu vas me laisser partir ? )
( Oui. Elle n'est pas venue, l'heure où je t'emmènerai rejoindre les nôtres. Tu verras Nazjatar, et la Bien-Aimée, je te le promets - mais pas encore, pas maintenant. Parle-moi, grand frère, de ton histoire à la surface. Parle-moi d'Eldre'thalas, que je n'ai jamais vue. Et du reste, de tout le reste. )
( Cela risque de durer un certain temps. )
( Mais nous avons le temps, grand frère. Nous avons le temps. )

---



* "White men in black", Jack the Ripper
Meldiriel
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Message  Razgarath/Razus/Welton Mar 04 Nov 2008, 16:03

C'est assis seul dans l'auberge de Cabestan, que Coeur Ardent essayait de se souvenir de ce qu'il avait fait la veille, en haut des montagnes du Berceau-de-l'hiver...

-Ainsi j'ai tué Meldiriel... Mmh... Les Rédempteurs courent surement partout dans les rues de Hurlevent dans le but de me trouver, mais ce n'est pas d'eux dont je dois me soucier. Meldiriel avait quelques amis, plutôt étranges, si ils apprenent ce qu'il s'est passé, mes jours sont comptés. Je pense que je devrais aller me cacher quelques temps. Je dois partir d'ici vite en tout cas !

Coeur Ardent prît vite ses affaires et s'est mit à partir prendre son cheval, qui l'attendait près du port. Il apperçut quelqu'un qu'il connaissait bien, et qui se dirigeait vers lui à tout allure, Moroana. Coeur Ardent eu beau essayer de fuir, il s'est fait très vite encercler par deux autres personnes, Tidasus et Guiche. Moroana prît son double-coup, et se mît à viser Coeur Ardent avec.

-Moroana ? Hem... Pourquoi braquez vous cette arme contre moi ?
-Silence Coeur Ardent, Vous êtes en état d'arrestation.
-Quoi ? Moi ? Mais vous rendez-vous compte de ce que vous dites ? J'ai passé mon temps à servir la Rédemption, j'ai toujours eu beaucoup d'affection pour Meldiriel, j'ai...
-Silence !
-Puis-je au moins savoir de quoi je suis accusé ?
-Traîtrise, tortures sur plusieurs membres de l'ordre, mais surtout, pour le meurtre de Meldiriel.
-Je...
-Le Sénéchal Idrid décidera de l'heure de votre jugement, en attendant, j'ai un cadeau pour vous...


Moroana sortît une fiole de sa poche, pendant que Guiche et Tidasus ricannaient.


---


Plusieurs heures plus tard, à l'hopital de Hurlevent...

-Mmh... Où suis-je ?
-Tu l'as tué !
-Hein, que racontez vous Lalita ?
-Meldiriel est mort par ta faute, tu vas payer !


Lalita sortît une seringue, et la rempli d'un liquide noir qui était dans une amoire de l'hopital. Elle planta la seringe dans le corps de Coeur Ardent. Le poison prît très vite effet, Coeur Ardent commença directement à avoir un mal de tête insoutenable, avant que le liquide ne l'empèche de parler, il s'approcha de Lalita...

-En faisant cela tu ruine ton futur et celui de tes proches...

Pendant plusieurs longues minutes, le poison faisait souffrir terriblement Coeur Ardent, et cela aurait pû continuer longtemps si un Rédempteur n'était pas venu le chercher, et n'avait pas obligé Lalita de donner l'antidot au prétendu tueur.

-C'est enfin terminé ? Ouf... Je n'y croyais plus...
-Le Sénéchal a pour le moment décidé de vous enfermer à Austrivage, nous partons sur l'heure.




---


-Ca n'est pas moi qui l'ai tué !
-Alors c'est qui ?
-Lui.
-Vous mentez, vous êtiez au Berceau-de-l'Hiver ce soir là.
-Faux.
-Tout le monde raconte que c'est Coeur Ardent qui a tué Meldiriel, inutile de nier l'évidence.
-Oui, c'est vrai.
-Alors vous avouez l'avoir tué.
-Non, pas moi.
-Coeur Ardent deviendrait-il fou ?
-Plus dangereux que fou...
-Vous vous foutez de moi Coeur Ardent ?
-Non !
Razgarath/Razus/Welton
Razgarath/Razus/Welton


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Message  Meldiriel Mar 10 Mar 2009, 16:42

Perdre conscience de soi.

Lorsque tout ce que l'on a aimé disparaît, lorsque tout ce à quoi l'on a pu tenir vous est arraché, la voie de la perdition est le chemin le plus facile.

Sous ses yeux. Elle était morte sous ses yeux. L'abhorrée. L'adorée. Ayame. Celle qu'il avait aimée au point de renoncer à tout ce qu'il était. Tuée devant lui par l'homme qu'il considérait autrefois comme un ami. Tuée sans que lui n'y puisse rien puisque, par amour, il avait rejeté tout ce qui faisait jadis sa force.

A cet instant, son esprit s'était brisé en une centaine de morceaux.

Il ne sut plus tout à fait ce qu'il se passa ensuite. Il se souvint vaguement d'avoir fui comme une bête et d'avoir erré, désorienté, cédant à tous les travers que sa volonté avait jusque là aisément repoussés. La Soif, notamment, cette Soif terrible qui le poussait à étreindre tout ce qui lui rappelait - de près ou de loin - les chants arcaniques du Vieux Puits.

Il se souvint avoir trébuché dans les sables de Silithus pour se blottir avec amour contre des cristaux de plusieurs tonnes, lévitant à moitié au-dessus du désert. Leurs chants étaient si beaux, si nourrissants, un véritable élixir d'oubli. Et les Murmures qui accompagnaient la manne qu'il en avait tiré sans retenue s'étaient dès lors installés en lui, pour ne plus le quitter.

Après ? Après, tout était vague. De bête, il devint assassin. D'animal, il devint monstre. Le peu de conscience qui lui restait, accablé sous la folie et le désespoir, nourrissait une haine viscérale pour tout ce qui touchait à la magie - paradoxal, puisqu'il ne pouvait pas résister à la Soif. Magie, plaie de l'univers, source de tous les maux. Ainsi parlait Ayame. Suivre sa voie à l'extrême était peut-être, pour la créature violente que Meldiriel était devenu, une ultime manière de rendre hommage à son amour.

Il se souvint avoir accepté et accompli toutes les basses besognes qu'on voulait bien lui confier, contre de quoi survivre. Il se fit appeler Mâche-Néant. Fut pris sous l'aile du Vol Bleu en tant que chasseur de mages zélé et serviteur manipulable. Erra. Oublia. Tua peut-être. S'enfonça de plus en plus dans la déchéance.

Misérable. Incapable.

Et puis...

Au coeur de la capitale humaine, des visages anciens, des amis d'autrefois. Des regards chargés d'autre chose que de la pitié, du mépris et du dégoût. Et l'improbable.

- Ayame est vivante. "

Non.

- Irhondril et Terale ont réussi à la ramener. "

Non.

Les morts restent morts. Ceux que l'on perd ne reviennent pas. Qu'ils n'essaient pas de le faire espérer : il était là, il a tout vu.

Ayame
est
morte.


Au début, ses yeux refusèrent de voir. Son esprit refusa de comprendre. De réaliser. D'accepter le retour de celle pour qui il avait tant sacrifié, et dont la mort avait signé l'abandon total de sa dignité. Et lorsqu'il vit, lorsqu'il sut, le choc fut peut-être aussi terrible que lors du meurtre d'Ayame. Car dans un sursaut de volonté, sa conscience, son ancienne lucidité commencèrent à émerger de nouveau, à se reconstituer. Et quoi de pire, lorsqu'on a déchu, que de sentir le regard de l'être aimé se poser sur soi ?

Quoi de pire... Que la honte ?

Un peu plus tard, le sourire et les mots d'Ysathys lui redonnèrent de l'espoir. Rien n'était perdu : il fallait patiemment se reconstruire, désormais. Réapprendre le monde. Abandonner les songes fantasques de la feuillerêve, la Soif, retrouver son nom, marcher la tête haute. Ce serait difficile, il le savait.

Avec effort, il s'intéressa de nouveau à ce qui l'entourait, tenta de mimer les attitudes d'une vie sociale oubliée, et apprit. Se souvint de qui il avait été, côtoya les vieux amis, mêla même ses paroles aux leurs... et sut, alors, que le Pélerin - le haïssable, le meurtrier d'Ayame - était encore en vie, lui, identifié, repéré. Pire : il se cachait au Nexus, ce que le Vol Bleu savait parfaitement. Le Vol Bleu que Meldiriel avait servi comme pour expier toute son ancienne existence de mage.

L'ironie était fort belle, mais ne fit pas sourire Meldiriel. Trois personnes avaient été autorisées à venir par le Vol Bleu pour déloger le Pélerin, mais ce n'était pas à elles de le tuer, non, c'était à lui, à lui seul ! Détruire sa Némésis était la condition indispensable pour qu'il puisse recouvrer sa dignité, laver la honte, assouvir sa vengeance. Mais...

- Non. Tu n'iras pas. Le Vol Bleu a dit trois personnes, pas plus. Et tu n'en fais pas partie. "

Soit. Il irait au Nexus. Seul.

- D'autres ont déjà été désignés pour s'en charger, Chasseur de Mages. "


Il discuta, argumenta. Il connaissait le Pélerin mieux que personne, il saurait le déloger du Nexus et soulager le Vol Bleu de cette présence inopportune, au contraire des trois délégués ignorants qui ne sauraient distinguer une vérité d'un piège.

- Ne remettez pas en cause les décisions du Tisseur de Sorts. "

Face au refus ferme et implacable, il n'eut d'autre choix que de partir. Son esprit tout neuf, terriblement fragilisé encore par la folie et par le doute, se ferma sur lui-même.

Le Pélerin allait être détruit, mais pas par lui. Un échec de plus. Un ultime échec. Non seulement il n'avait pas pu empêcher le meurtre d'Ayame, mais en plus la vengeance même de sa mort lui était retirée.

Alors... Il ne resta plus qu'une seule solution. Une issue qui plut fortement aux Murmures tournoyant à la frontière de sa conscience.

En vérité, Meldiriel connaissait le Pélerin mieux que personne. Il savait ce qu'il cherchait. Ce qui le tourmentait. Et quels ennemis redoutables couraient après sa trace.

Il fallait se mettre en route dès à présent.

Pour Silithus.
Meldiriel
Meldiriel


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