Nouvelles de la Souris

Scorie Lun 09 Mar 2009, 23:00

Un hurlement déchirant se fit entendre, une fois de plus, du fond de la cale du navire. La Souris, en pleine de crise de délire, repliée sur elle même, tremblante, se débattait avec des caisses et des tonneaux, des fléautiques imaginaires.

Pard essayait de son mieux de la calmer, mais ses nerfs étaient à bout depuis plus d'une semaine maintenant qu'il veillait sur sa compagne...

L'équipage qui, au début, était ravi de retrouver son médecin et son maitre de bord, commencait à se poser de serieuses questions...

Yzène pouvait tout aussi bien rester de longues heures, muette comme une tombe, assise sur le pont, ses grands yeux ambres et vides se balançant au rythme des vagues et puis d'une fraction de seconde a l'autre, sans crier garde, son monde chavirait, la tempête éclatait, elle se mettait à hurler des mots incompréhensibles, dans cette drôle de langue qu'on avait parfois entendu sur ses lèvres, dans d'autres circonstances... Elle devenait folle de rage la plupart du temps, apellait de toute son âme: "Elzéara, Elzéara.." Elle retournait tout le navire en quête de quelque chose, de quelqu'un qui ne s'y trouvait pas puis elle s'écroulait, en pleurs.

Seuls Pard et Strap pouvaient un peu lui parler de temps à autres et tirer d'elle quelques phrases intelligibles.. "j'ai échoué".. "tout est ma faute".. "j'ai trahis"

La nuit aurait pu l'aider, lui faire trouver quelque repos, mais non...
Les nuits étaient encore pires que les jours, Yzène cauchemardait, encore. La liche continuait à la harceler. Yzène disait souvent à qui voulait l'entendre qu'elle vivait, qu'elle la savait encore en vie.

Yzène était une femme brisée. On avait réussit à lui prendre tout ce qui faisait d'elle un être humain, une pirate, une marchombre, une amante, une amie, une...mère. Yzène n'était plus que tourments et souffrance. Ils avaient sa fille, sa vie, son âme, son avenir, sa liberté. Elle n'avait plus rien que ce souffle devenu insipide et desuet qu'on apellait la vie.

Orène avait dit: "tant qu'il y a de la vie il y a de l'espoir." Longtemps les mots avaient tourné dans la tête d'Yzène, sans y trouver échos.. Strap. Son regard se porta sur les inscriptions qu'il avait tracé à la craie sur les murs de l'infirmerie où elle reposait à présent seule, bercée par de lourds sédatifs..Ces mots lui étaient destinés, à elle, et à elle seule.

Strap représentait l'espoir, l'avenir des Marchombres. La mère pensait voir en lui la nouvelle génération des Marchombres, même si lui l'ignorait encore, il serait peut être un jour l'élu et il aurait besoin d'elle. Oui encore deux ans et demi, Strap, je sais que je te les dois...

Yzène s'endormit sur un curieux rêve soufflé par la mère: elle y voyait Strap tenant par la main une petite fille riante aux yeux bleux océan, aux cheveux et à la peau sombres.. Elzéara.. Strap lui ramenait sa fille. Yzène sourit dans son sommeil pour la première fois depuis bien longtemps. Enfin elle pourrait tenir sa fille dans ses bras...