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Sources d'inquiétude

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Message  Heliven Lun 30 Mai 2011, 13:39

Si quelqu'un que vous connaissiez de son vivant, vous revient sous forme de mort vivant... que feriez-vous ?


Mes errances me conduisent à un bois sombre, humide et froid. Les quelques cyprès se détachant des chênes noirs rendent l'atmosphère encore plus lugubre. Mon instinct me tire vers le haut d'une butte, mélange d'attrait et de frayeur, mélange d'espoir et d'appréhension. Quelque chose d'impossible m'attend là haut.
Pattes fléchies, j'avance, couverte par les herbes hautes.
Cailan.
La magie l'accompagne toujours comme un parfum piquant, astringent. L'odeur plus métallique du sang accompagne ces effluves, celui des bêtes, ou d'autres créatures... rien d'aussi cuivré que celui des hommes. J'en suis rassurée, au moins mon ami n'est pas devenu un meurtrier.
Plus inquiétant est le froid qui l'entoure tel un linceul... Sachant qu'il était mort, je n'en suis pas autrement surprise, cette constatation hérisse néanmoins mon échine.
Pendant mon observation, Cailan reste immobile, l’œil rivé à sa longue vue.

Une fois certaine que je ne tirerai rien de plus de mes sens affûtés de chat, je force mon corps à changer, se tendre vers ma forme humaine.
Il est bien Cailan puisqu'il me reconnait. Sauf qu'il n'est plus le Cailan que je connaissais.
La colère vibre sous chacun de ses mots.
Sans que je n'en comprenne tous les termes, je sens bien qu'il ne m'adresse pas de compliments.
Le rejet est un sentiment étrange, blessant. Une partie de moi me dicte de fuir, l'autre me rappelle une ancienne promesse, celle d'être son amie, faute de pouvoir lui offrir plus.
Peut être s'en rappelle-t-il aussi, puisque son pouce glacé caresse ma joue. Une attention que je sais prolonger en inclinant le visage.


- Tu es bien Cailan...
Probablement n'aurais-je pas du prononcer ces mots car il se mit en devoir de me rappeler le contraire. Sa main me heurte en une gifle cuisante, décuplée par une force inhumaine. Je boule au sol et la terre détrempée amortit la majeure partie du choc. Groguie, je sens son pied me pousser au bas de la colline, me courbant juste assez pour éviter qu'il ne fêle une côte dans un autre accès de violence.

Je n'ai jamais considéré le contact avec la terre comme une humiliation, j'apprécie l'odeur de l'herbe humide juste après la pluie, celle des fougères, des trèfles et des petites fleurs sauvages qui poussent en cette saison. J'aurais pu rester là un moment, à attendre de retrouver assez d'équilibre pour revenir sur mes pas. Cailan lui en décide autrement, sifflant sa monture pour qu'il me ramène à la cité des hommes.




Si quelqu'un pour qui vous vous inquiétez refusait de vous parler... que feriez-vous ?


Mes pas me ramènent vers la caserne sans que je n'aie besoin d'y réfléchir. Ils sont ma meute, même si je suis la seule à les considérer comme tels.
Aenethia pense que les félins ne forment pas de meute mais le livre que Tobias m'a prêté racontait l'histoire de lions qui vivaient en communauté. Il est cocasse qu'elle n'y ait pas pensé alors que l'emblème frappe son tabard de son fil doré. Sauf que je ne suis pas un lion...
L'épuisement me place dans un état de léthargie propice aux introspections, je promets que le sommeil ne me terrassera pas.

J'aurais dû être soulagée que le masque de courtoisie d'Angron se fissure enfin. Cette distance le rendait un peu... inhumain.
Hors c'est l'angoisse qui m'étreint, insidieuse, repassant sans relâche les anomalies d'une soirée à l'Alambic.
Je me laisse glisser au pied du mur d'enceinte du bâtiment, les genoux contre mon buste, les bras ballants, les doigts chevauchant les brins d'une pelouse d'un vert tendre.

Que voyait-il dans le fond de ce verre ? Quelque chose qui l'a troublé au point d'en perdre la notion du présent.
Bruit de verre brisé, le parfum volatil du spiritueux qui emplit les narines, un juron. Entendre Angron jurer a quelque chose de stupéfiant, c'est un peu comme recevoir la grêle sur la tête en plein été. Je n'aurais pas pu m'empêcher de le taquiner s'il n'avait eu cet air si perturbé.

Évidemment il n'a pas voulu m'en parler. Rien d'étonnant à cela, nous nous connaissons à peine.
Naturellement je l'ai menacé de faire part de mes craintes à Miya, Fendrel, et même Ceralynde et la petite gnomette écureuil si je la croisais.
Je réalise que j'ai assez peu de scrupules lorsque je soupçonne un danger. Ai-je toujours été ainsi... ?
Ce qui me gène vraiment, c'est qu'il ait évoqué le fait de démissionner si jamais les questions devenaient trop pressantes, même de la part de ses collègues de la garde.
Il avait l'air vraiment sérieux en prononçant ces mots là, trop pour que je me risque à le couper de tout soutient.

Je tourne les faits dans tous les sens, comme s'ils pouvaient me fournir la ou les raisons de son trouble. Lorsque le sommeil tente de me rattraper, je me relève pour errer à travers la ville. Souvent je surprends des fragments de phrase sans en saisir la cohérence.
Peut être devrais-je faire comme Angron l'a suggéré et me morfondre...
Heliven
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Message  Heliven Mer 01 Juin 2011, 12:27

Plonger la tête dans l'eau courante de la rivière...
Rester en apnée jusqu'à sentir les battements sourds du cœur cognant contre la poitrine...
Provoquer un stress suffisant pour une décharge d'adrénaline qui me tiendra éveillée encore quelques temps.

Je me redresse en inspirant brusquement, l'air me brûlant les poumons, pailletant mon champs de vision dans un étrange accès d'ivresse. Mes cheveux me collent au visage, sillonnant mes joues blêmes de leur ondoiement sombre.
Veldrin a raison, mais je ne veux pas m'avouer vaincue pour autant.

J'enserre mes tempes dans l'étau de mes paumes, mes souvenirs se mélangent désagréablement. Lisa n'est pas que le nom d'une flamberge, la main glacée de Cailan m'étreint la gorge, Dayane... j'aurais voulu avoir le temps de discuter plus longtemps avec lui. Qu'a t-il dit déjà ? ha oui... pathétique.
Un bruissement d'aile me fait relever le visage. Dans la nuit noire, une chouette fond sur un campagnol, ou peut être un mulot. Mes sens sont trop émoussés pour que je puisse discerner la nature de la proie.

Proie... depuis quand n'ai-je pas chassé ? Je frissonne, engourdie par la fraîcheur nocturne. Je réalise aussi que je ne suis pas sous la bonne forme.

~ Je suis désolée... je ne voulais pas aviver ces souvenirs là. Est-ce son visage que tu vois dans le fond de ton verre, est-ce son chapelet que je porte à mon poignet ? ~
J'avance au hasard, mains tendues devant moi, vacillant et trébuchant comme un homme ivre mort. A cette idée je ris doucement, au moins cette comparaison me convient-elle.

~ La mort n'ôte pas la malédiction ~
Je ne sais plus à qui s'adresse cette réflexion, ni à quoi elle se reporte, les pièces du puzzle ne s'emboîtent pas. Cette incohérence m'effraie un peu, jusqu'à ce que ce sentiment ne s'efface au profit d'une hébétude proche de l'état second.

Mes doigts accrochent l'écorce d'un sycomore.

~ A la fin de l'été, lorsque les cosses sont assez sèches, on peut les casser en deux, puis les lancer en l'air pour les regarder tourbillonner dans un mouvement d'hélice. ~
Des mains habiles guident mes doigts d'enfants, une voix chaude de baryton m'explique patiemment que les phalènes sont blancs pour se fondre à l'écorce des bouleaux, que l'écorce de saule lui peut être infusé pour faire baisser la fièvre, que les fleurs blanches de pyrèthre vont éloigner les insectes des jardins. Mais cette voix appartient au même monde que Lisa maintenant.

Je réponds à un rapace dont le plumage tire vers les tons prunes, même si ce dernier est parti depuis longtemps.

~ Si Fen était un arbre, il serait un cyprès ~
L'oiseau passe sa tête sous son aile, me houspille en tapotant mon épaule du bec. Je continue pourtant mon monologue, ignorant ses conseils.
~ Il pourrait être l'aubépine aussi, l'arbre qui protège de la foudre. Sauf qu'il me semble qu'il préfère appeler la mort lorsqu'il ne s'occupe pas des autres. ~

Mes jambes cèdent sous moi, j'aimerai en rester là mais ~ ce ne serait pas bienséant ~.
"On ne va pas laisser les choses en arriver là"
Veldrin a raison, mais j'ai peur quand même...
Heliven
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Message  Heliven Mer 08 Juin 2011, 13:13

Je marche sans savoir où je vais, la respiration courte, rendue saccadée par l'angoisse.
J'aimerai pouvoir dire que je m'inquiète pour Fen, pour son addiction, pour le peu de sommeil qu'il s'inflige, mais ce ne serait pas honnête. J'ai veillé sur lui... du mieux que j'ai pu, pas grand chose en somme.
J'évite de justesse un passant, ne l'ayant ni vu ni entendu venir, je ne m'arrête que parce que le sol trop meuble me déséquilibre, parce que l'eau clapote contre mes bottines. L'étang.
Je recule précipitamment. L'étang. Le médaillon. Le sang bat dans mes tempes comme un tambour de guerre.

Mon esprit reconstitue la scène, le froissement des plumes d'Eonath, le léger tintement métallique que je n'avais su interpréter alors. Le médaillon n'a pas échoué là par hasard et tout ce que je peux espérer maintenant, c'est qu'il sombre au milieu des objets trouvés.
J'inspire lentement, du moins j'essaie. Ce hoquet rauque étouffé, je réalise que c'est le miens.

Mes doigts crochètent les pierres qui serpentent autour de mon poignet droit. Non que ces pierres aient une signification particulière pour moi, hormis peut être le souvenir de l'être qui me les a confiées. Elles me raccrochent au présent, m'empêchent de céder au gouffre qui s'ouvre sous mes pieds.
Je récite ma propre litanie, Kyorlin, Coros, Ssusun, Phenicien, Terryn, Sinople, et même vilain poney, j'enchaîne sur les suivants, Denalan, Kholodnÿi, Sköll, Spore, puis sur d'autres encore, Beryl, Lychnis, Adhara, Boréale, Léanore, Ilyn. Je vacille, la dernière série de noms n'existe pas.

Assise dans l'herbe grasse, je contemple les stèles qui s'alignent au loin. Il ya de nombreux blessés parmis les gardes, Fendrel est lui même au bord de l'épuisement, Nath ne doit pas aller beaucoup mieux. Je dois trouver MacDorf...

Je me trouve debout devant la cathédrale, sans me rappeler du trajet. Il faudrait que je songe à remercier Aeredril...
Mes pensées se heurtent, vacillent en staccato maladroits, incohérents.

~ Ettiala sera très déçue de ne pas voir mon affreux sourire en se réveillant... ~
~ Le dernier arrivé à la barrière aura un gage ! ~
~ Mais qu'est-ce t'as à m'r'garder comme ça ~
~ Et pourquoi on n'a pas de parents nous... ? ~
~ donc, par syllogisme, vous êtes un fantôme... ~

Je me roule sur le côté, mes griffes se rétractant dans ma patte de chat. Je reste un instant comme abasourdie, le maelström de mes hallucinations s'apaisant au profit d'informations plus exploitables. L'odeur de l'herbe humide sous ma truffe, les effluves des hommes et des bêtes que je détaille, dissèque pendant un bon moment. La cathédrale est dans mon dos, avec elle les parfums de paraffine, de vélin, de vieille pierre. Je frotte mon museau contre un monticule de terre.

~ Ce n'est pas un mouchoir ~ la pensée reste vagabonde, mais je sais à présent à qui et quand la situer.
Je m'étire, me redresse, reprend forme humaine calmement.

~ Tout ira bien... ~ Il suffit de s'en persuader avec conviction...
Heliven
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Message  Heliven Ven 10 Juin 2011, 12:27

Il existe un moment où l'exténuation est telle que les sens lâchent petit à petit. C'est ce qui est entrain de m'arriver. La vue, le goût, l'ouïe est affaiblie à tel point que les sons ne me parviennent qu'à retard, étouffés. Je crois percevoir que je suis assise mais l'information reste là, en suspens, je ne saurais dire si je me trouve par terre ou sur un lit. Reste l'odorat.

En premier lieu je sens la terreur. Elle empuantit mon environnement comme un cocon gangréné. Deux facteurs m'empêchent d'y sombrer : mes sens émoussés et l'absence de domination qu'émet la jeune femme. Kryss, car c'est ainsi qu'elle m'a été présentée, est située quelque part à ma droite. Il y a avec elle une odeur de mâle... mais bien qu'elle se cache derrière ou contre lui, les signaux de détresse couvrent totalement la présence de l'homme.
J'aimerai pouvoir l'aider, au moins pour assourdir l'effroi qui émane d'elle, mais enfermée comme je le suis dans mon propre corps, je doute de pouvoir lui fournir quelques apaisements que ce soit.

Lentement, j'essaie de m'extraire de son aura traumatisée pour tenter de me situer. Ténues, les effluves de la pièce me sont néanmoins familières : draps propres, parquet couvert d'une fine couche de cire et de térébenthine, l'odeur aseptisée, piquante, des désinfectants et autres antiseptiques, et un peu partout la prégnance si spécifique, mélange de lessive et de notes plus ambrées, rangées, presque maniaques. Je me trouve à l'étage de la caserne, dans l'infirmerie.

L'homme qui m'y a mené doit être une nouvelle recrue, il cherchait encore ses marques et me menait à l'étage sans avoir prévenu celui que j'étais venue chercher. Impressionné par le Chevalier sans doute. A cette allusion, je ferme soudain mon esprit au tourbillon de questions qui s'y projettent, d'images qui reviennent me hanter. J'ai promis de n'en parler à personne, ce qui ne m'empêche pas de m'inquiéter. Je n'ose pas aborder le sujet, de crainte qu'il ne fuit à nouveau... comme à chaque fois.

Je voulais les prévenir, prévenir les gardes que j'avais retrouvé Nath...
Un mauvais pressentiment peut relever du hasard, deux, c'est trop pour être ignoré.
Je me souviens m'être appuyé sur Kyorlin, profitant de la douceur de son plumage pour régénérer quelques forces, recevant par la même occasion les avertissements de Veldrin. Je n'avais pas intérêt à ce qu'il me trouve à nouveau dans cet état de fatigue avancée où il allait mettre à exécution ses manoeuvres dont il avait le secret.

Mes pas me portent vers l'îlot des portails, le dernier endroit où Sinople a laissé ses plumes. Nath a mentionné Hyjal, c'est donc naturellement vers cette région que je me dirige. A Nordrassil, nombreux sont ceux qui connaissent Nath. Beara, entre autres, qui continue à l'attendre. L'angoisse resserre son étreinte d'un cran. Nath n'est pas du genre à faire attendre les gens, pas sans raison valable du moins.
L'Ancienne essaie de m'expliquer quelque chose à propos du Rêve puis à propos du cauchemar, c'est là où serait parti Nath. Le griffon de Beara nous transporte jusqu'aux terres foudroyées, désertiques, étrangement morcelées, craquelées. Les arbres y paraissent crochus et au pied de l'un d'eux Nath est debout, parfaitement immobile... et blessé. Une aura verte l'entoure, s'étend entre lui et l'arbre aux racines apparentes, faisant fluctuer l'accroissement de la végétation entre les deux protagonistes.

Je m'approche. Les racines grises argentées forment une prison, entravent quelque chose d'indéniablement humanoïde, quelque chose de mauvais.

"- Nath..."
J'appelle le druide, la voix rongée par l'anxiété. Nath ne réagit pas, mais l'arbre si... la créature semble tourner son regard sur moi. Je gronde sourdement, courbe le dos pour paraître plus volumineuse, plus menaçante. Le cauchemar en semble... amusé, je suppose que ce n'est pas ainsi qu'on lutte contre ce genre de créature. Au moins a t-elle desserré son emprise sur Nath car ce dernier s'effondre lourdement.
Beara nous ramène tous trois à Hyjal, soigne les blessures physiques de Nath... sans réussir à le réveiller.
Et puisqu'elle refuse d'aller le chercher sur le chemin du Rêve d'Emeraude, je le ramène à Hurlevent où ses amis se trouvent. Plus précisément Sinople nous ramène à Hurlevent, à l'étage de la grange où se trouve ma chambre. Je dépose Nath sur mon lit, faute de savoir où il loge habituellement.

Je crois savoir que Nath n'y ait plus, qu'il a été déplacé, sans plus savoir vraiment pourquoi. J'ai l'intime conviction de devoir rester éveillée, sans plus me souvenir de ce que j'en attends, chaque parcelle de ma volonté défaillante s'y raccroche, me maintient dans un état léthargique déplorable. Je dois attendre quelque chose, quelqu'un peut être, je ne peux me permettre de sombrer.
Demain je devrais pouvoir voir Nath, mais je ne différencie plus le demain du présent...

Le présent se compose d'un rapace blessé, d'un vieux cyprès mourant, d'un chat qui ne sait plus s'il est mort ou vivant, et d'un dragon scellé. Il se compose d'une jeune femme terrorisée, d'une garde aux mains bandées, d'hommes qui seront pendus bientôt... parce que j'ai commis l'erreur de désigner un puits. Ce n'est pas ce que je voulais... si j'avais su, jamais je n'aurais guidé le garde Crowley...
Heliven
Heliven


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Message  Heliven Jeu 23 Juin 2011, 17:31

Je dévale les escaliers qui séparent l'infirmerie du rez de chaussé de la caserne, sors après un bref salut à l'attention d'Adelie, la garde de faction.
Les informations de Nath s'imbriquent parfaitement, m'offrent un éclairage nouveau. Ce que Nath appelle l'Essence, c'est la Bête.
La Lumière, l'Arcane, l'Essence. Je place Aeredril et Lisa dans le domaine de la Lumière, Ceralynde dans celui de l'Arcane, Nath avec l'Essence. Dayane se trouverait entre la lumière et l'arcane, Veldrin entre l'arcane et l'essence. J'appréhende ces nouveaux concepts dans l'indifférence la plus totale de la principale intéressée.
Pour Elle, les choses sont. Vouloir les nommer, les classer est une préoccupation qui caractérise les "deux pattes". Son attention est tournée vers "ailleurs", elle me laisse bouillonner dans mon coin.

De retour dans ma chambre, à l'étage de la grange, je m'installe sur le parquet au pied du lit. Lorgan et ses histoires de dragons me manquent un peu, mais pour ce que j'ai à faire, mieux vaut être seule.
Nath m'a demandé d'apprivoiser la Bête, il ne pouvait pas savoir que nous nous connaissions déjà intimement, il ne pouvait pas savoir que nous avions déjà pactisé. En échange des nuits de pleine lune, mes instincts les plus primaires me laissent relativement tranquille.
Avec douceur, je me fonds dans la conscience animale, m'y loge aussi confortablement que contre le corps de Sköll, le loup alpha qui est aussi le partenaire d'Aodren.


~ Danger ~
La nervosité s'accroit sans explication apparente. L'instinct de la Bête aiguillonnant mes sens.
Je me laisse submerger par l'onde, tente de la canaliser, la rationaliser.

~ D'où vient le danger... ? ~
Un silence oppressant s'installe, se craquèle sur des vibrations paniquées.
Ma respiration s'accélère, instable. La Bête non plus ne le sait pas, cette incertitude nous met de mauvais poil.

~ Reprenons autrement, qui est la cible ? ~
Les marques olfactives et les images se multiplient si rapidement qu'une impression vertige me fait vaciller.
~ Je comprends... inutile de me rendre nauséeuse pour autant hein... ~
Je n'ai aucune chance de maîtriser la Bête, heureusement je n'en ai pas besoin, je dois juste trouver son centre.

J'ai conscience de griller les étapes. Ce n'est pas du tout l'exercice demandé par Nath. Je sais aussi qu'il aurait voulu être là pour me guider.

~ Je ne veux plus le blesser... ~
Jamais plus.
C'est ma dernière pensée avant d'être consumée par l'instinct de la Bête. Ma conscience, mon identité se dissout, la sensation est terrifiante. Si j'avais encore une voix, j'en aurais hurlé, si j'avais pu, j'en aurais tremblé, j'aurais fuit. Sauf que je n'existe plus.

La forêt de chênes noirs est mon domaine, j'en suis l'un des Veilleurs. Ma queue balaie lentement le sol, déplaçant l'humus dans un bruit de papier froissé. Je m'étire, les pattes avant loin devant moi, cambrant l'échine tout en baillant, dévoilant des crocs longs et effilés comme des poignards. Je frotte mon flanc contre les troncs rugueux, marque mon territoire tout en laissant des touffes de poils couleur de suie.
J'entame un trot régulier, guidée par mon instinct, je bifurque entre un saule et peuplier, plonge sur une racine à l'apparence anodine, la réduit proprement en miette avant de creuser frénétiquement pour tenter de remonter vers le point d'origine.
Cette manifestation du cauchemar a aiguisé mon appétit, je tourne en rond près du chêne, cherchant d'autres effluves qui pourraient me mener à ma proie.

Une piste trop facile à suivre ne présage que d'une chose.
Le piège se présente sous la forme d'un grand orme argenté. L'écorce s'est modelée pour prendre la forme d'un visage aux paupières closes. Le coin de ses lèvres s'est retroussé d'une ombre de sourire. Plusieurs racines de la même couleur métallique vallonnent le sol. L'une d'elle se soulève pour tenter de me saisir. Le combat s'engage alors que je me glisse sous la racine, tentant de sectionner l'appendice à coup de griffes et de crocs. Mes pattes glissent sur une substance translucide, huileuse, ma langue reçoit une goutte de la sève corrompue.

Je recule hors de la portée de la racine, arrache l'herbe pour tenter de me débarrasser du goût doucereux qui se répand. L'engourdissement progresse, la racine aussi. Ce n'est qu'une question de volonté... si je peux modeler le Rêve en ma faveur...
Quelque chose s'enroule autour de ma patte arrière, tente de me tirer...
La pression se relâche, je griffe le sol, tâchant de me soustraire. Une liane épineuse remplace la racine, provoquant un feulement de douleur.
Les épines m'empêchent de mordre le lien, les tentatives de griffures se soldent par des coussinets entaillés... pourtant l'être végétal ne m'achève pas, me maintient dans cet état de captivité frustrante. Mon agacement atteint son paroxysme, frôlant une fureur enragée. La terre autour moi est complètement retournée, par endroit humide, sombre, entachée d'un peu de mon sang.
C'est un piège... et j'en suis l'appât.
Heliven
Heliven


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