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Souvenirs d'un bordel hurleventois

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Message  Madame Alma P.J. Jeu 12 Mai 2016, 18:31


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Le Salon de Madame Marsh



C'était le grand soir. C'était l'apogée d'une nouvelle vie pour la maison ainsi que la chance d'un nouveau souffle. C'était le soir de la réouverture et de nombreux clients défilaient déjà dans la grande salle au rez-de-chaussée. Les filles s'étaient longuement toiletté, leurs visages étaient poudrés à souhait et elles avaient pris soin d'être charmantes sans être trop provocantes suite aux directives de la mère maquerelle. Celle-ci, dailleurs, déambulait dans tout l'établissement et surveillait tout ce qu'il se passait en ses moindres recoins, agitant son coquet accoutrement et riant aux éclats dès que l'occasion s'en présentait. Parfois, entre deux coupes, on pouvait entendre son rire de crécelle résonner jusque dans le boudoir adjacent à la salle de présentation qui, comme tout le bâtiment, avait été rénové pour l'occasion.

Les tapisseries, neuves et teintées de nuances verdâtres rappelant l’arôme de l'olive, étaient parcimonieusement recouvertes de tableaux bon marché qui représentaient divers scènes de genre mais aussi des bustes de femmes. Les fauteuils de velours cramoisis, eux, étaient parsemés ci et là dans la grande pièce où les clients pouvaient se détendre et papoter avec les filles qui, se joignant à eux ou préférant rester dans un carré leur étant réservé, cherchaient chacune à être la plus divertissante et la plus aguicheuse possible. De temps en temps, on en voyait une monter à l'étage avec un homme. Parfois, même, il n'en suffisait pas d'une pour qu'un amoureux du vis gagne les chambres en compagnie de deux femmes. Dans ce cas, Madame Alma qui n'était jamais très loin, veillant à la qualité de travail de ses employées et au respect de ses visiteurs, esquissait un fin sourire et reprenait sa vadrouille de plus belle.


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Aussi, quelques apéritifs étaient disposés près des canapés et divans pour que tous puissent pleinement profiter de l'inauguration et de la renaissance du lieu qui avait connu une fin déplorable il y à quelques années. En effet, l'endroit avait fermé il y à deux ans à cause d'un trafic de feuillerêve qui avait été orchestré par l'ancienne gérante. Sous la direction de celle qui avait racheté le salon et qui en était désormais à sa tête, cela ne risquait pas de se reproduire. Elle serait intransigeante et dirigerait son commerce d'une main de fer. Dailleurs, pour mettre toutes les chances de son côté, elle avait copieusement investis dans le réaménagement de la maison. Elle avait fait refaire toute l'isolation qui, autrefois, faisait du tord à la température des chambres. La décoration avait également été revue et de somptueuses plantes exotiques venaient maintenant caresser la douce couche laineuse des murs de la bâtisse, certaines filles vêtue d'affriolants costumes étaient couronnées de coiffe de plumes aux couleurs chatoyantes, de superbes vases étaient remplies de beaux bouquets et un boudoir avait été spécialement aménagé. Pour sublimer le tout, des reproductions de statuettes trolls en bois étaient exposées sur des tables basses.

L'extérieur, lui, en contraste avec le séduisant intérieur, était d'un style bien plus austère et plus fermé. Des barreaux étaient aux fenêtres, celles-ci constituées d'une épaisse couche de verre dépoli, et l'ancien immeuble avait plutôt des airs de prison que de temple de la luxure. Cependant, les citadins et autres citoyens de passage ayant l’habitude de fréquenter ce genre de lieux savaient à quoi s'attendre dès qu'ils auraient franchis le seuil de l'entrée. C'était un lieu où il faisait bon vivre, en particulier en cette soirée.

A peine les douze coups de minuit furent déclarés que quatre des filles entamèrent une danse lascive au milieu de la grande salle, se donnant en spectacle au plus grand plaisir de ces messieurs qui étaient encore installés dans les fauteuils. Leur cancan ne manqua pas d'en faire tressaillir plus d'un et même la vieille mère maquerelle, réjouit par le satisfaisant chiffre d'affaire qu'ils avaient déjà fait ce soir, toléra cette décision improvisée et applaudit de bon cœur, se surprenant elle-même à s'autoriser de tels épanchements. Les réjouissances étaient tel que les jeunes hommes à l'arrière de la boutique purent également pointer le bout de leur nez pour apprécier le spectacle.



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Cependant, après quelques représentations des gotons échauffées qui désormais se succédaient dans un éclat de rires et de bavardages, un homme à qui l’allégresse du moment monta un peu trop à la tête perdit son sang-froid et se jeta sur Sarah, l'une des filles, dans le couloir à l'étage, et tenta d'abuser des services de la pauvre donzelle qui essayait vainement de se débattre pour échapper au bougre qui n'avait pas payé. "Laisse toi faire, tu n'es qu'une catin après tout", lui disait-il. La pauvre gémissait mais le coquin n'eut pas le temps de tourner sa langue deux fois dans sa bouche que la matrone était là, le menaçant de lui plumer le cul et lui aboyant de quitter les lieux. La seconde était derrière, la main posée sur un pistolet dissimulé sous ses effets bouffants, prête à dégainer et à intervenir si le besoin s'en faisait sentir.

Pourtant, l'imbécile s'exécuta et quitta les lieux sans faire d'histoires au grand étonnant de la tenancière qui, une fois de plus, sut faire imposer le respect. Il ne devait pas être un mauvais garçon, l'alcool lui était tout simplement monté à la tête, rien de plus. En entendant les braillements dans le couloir quelques clients sortirent de leurs chambres; dont un nain qui déboula malheureusement bien trop tard pour prêter main forte après s'être rhabillé en toute hâte. Le danger n'était pas à craindre cependant Madame Alma devait rester vigilante, ce genre d’événements était une éventualité largement envisageable dans un établissement comme le sien. C'est pour cette raison qu'elle conservait toujours un œil averti sur ses clients et qu'elle gardait Rufus enfermé dans les appartements du dernier étage, prêt à bondir sur les marauds qui oseraient bafouer les règles du salon.

Une fois l'incident résolu, la soirée put reprendre son cours qui touchait enfaite presque à sa fin. L'établissement allait fermer dans moins d'une demi-heure. Il était bientôt une heure du matin et le lieu commençait à sérieusement se vider tandis que les premières filles pouvaient déjà regagner leur chambre au second étage. La directrice agitait son trousseau de clefs tout en raccompagnant au seuil ces derniers messieurs qui ne souhaitaient pas retrouver les pieds gelés de leur bonne femme. Alors, on remit en place les fauteuils qui avaient été déplacés puis on débarrassa les différents verres et coupelles qui traînaient sur les tables. Aussi, l'on rit et l'on discuta longuement dans les chambres imbibées de la vapeur des cigarettes qui fusaient. La maison était fermée.

Le lendemain, on se réveilla tardivement. Le soleil était déjà à son zénith quand les plus matinales reprirent pied. Madame Alma, elle, était déjà levée depuis deux bonnes heures et se dorlotait dans sa chambre, trop satisfaite du succès de la veille. Elle ne manqua pas de féliciter ses employées après leur avoir longuement et nouvellement répété les directives à suivre pour optimiser la qualité de leurs services. Ensuite, on prit un digeste repas puis on commença à se préparer pour recommencer au soir ce qu'on avait déjà accompli le soir dernier.


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Message  Edmond De Cerfvilliers Lun 13 Juin 2016, 14:13

C'est au bras d'une jolie demoiselle qu'il sortit de la chambre, le coeur apaisé, l'esprit allégé et les joues encore légèrement empourprées. La poulette n'était pas des plus laides, son sourire était mignon et elle se mouvait avec douceur dans l'espace. L'on pouvait aisément considérer qu'elle ne venait pas du gratin de la haute société, mais elle n'était pas plus vulgaire que certaines des donzelles avec qui elle cohabitait. Tous deux, ils descendirent au rez-de-chaussée. Dans les escaliers, ils croisèrent la maquerelle qui laissait trainer ses yeux de vipère sur le salon du haut des marches, faisant tinter son trousseau de clés qui étincelait entre les plis sombres de sa robe. En les voyant, elle afficha un sublime et grand sourire, faisant  ressortir toute l'abjection de son visage défectueux. En bas, il y avait encore du monde, les femmes riaient, les monsieurs souriaient et le vin coulait à flots. En considérant l'intempérance qui y sévissait, l'homme se decida finalement à rester un peu plus longtemps.

Alors, il enleva son manteau, s'asseya confortablement dans un des sièges, un cigare dans l'âtre de la main, devorant l'espace d'un regard plein de concupiscence. Une jeune femme au ton suave vint doucement l'aborder. Sa longue chevelure brune se mouvait avec extase, la délicatesse de sa carnation evoquait les rivages chauds de terres lointaines, et son savoureux parfum alléchaient délicatement les narines béates d'Edmond. Elle lui déversait de belles paroles enjôleuses et l'invita même à se déhancher, mais lui n'en avait pas encore fini avec les joies de l'ivresse. Ils rejoignit d'autres hommes et se fixa à leur table. Il ne les connaissait pas mais il n'y avait ni rejet, ni jugement, seulement des faces rieuses, allègres, pleines d'euphorie. Certains étaient là pour oublier, d'autres pour terminer la semaine en beauté. Il s'en dégageait que pour Edmond les deux étaient de paire.

Des femmes les entouraient. Ensorceleuses, elles les envoûtaient de leurs danses affrioleuses. Le spectacle était hypnotique. De temps en temps, un homme se levait, quittait la table, et invitait l'une des sirène à regagner les chambres pour explorer les abîmes du plaisir humain. Quelques fois, on voyait un nain passer, le crane encore plus étincelant que d'habithude, huilé de sueur. Après une bonne demi-heure, une fois son corps assez imbibé du divin breuvage qu'il chérissait, il decida de s'adonner une dernières fois aux joies de la nature avant de partir. Alors, il les scruta toutes d'un oeil attentif, voulant se consommer avec la plus exquise pour bien terminer la soirée. Cependant, durant ses méditations, un beau jouvenceau lui fit signe depuis l'arrière-boutique. De fait, Edmond se détourna de ses intentions premières. Il ressortit de la réserve vingt minutes plus tard, le front luisant, la crinière ébouriffée, et la face écarlate. Il paya l'addition et s'en retourna chez lui, marchant  à travers les rues endormies, plongées dans la plus profonde et plus froide pénombre. Il ressassa la soirée sur son chemin, satisfait de s'être une nouvelle fois adonné à la débauche et à l'ivresse, lesquelles lui étaient précieuses et auxquelles il pourrait désormais s'employer fréquemment puisqu'il était de retour dans la capitale.

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Edmond De Cerfvilliers
Edmond De Cerfvilliers


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Message  Madame Alma P.J. Dim 03 Juil 2016, 15:05

C'était aux alentours de midi. La plupart étaient attablés et buvaient leur soupe. Il n'y avait pas un bruit. On pouvait entendre le bruit des cuillères effleurer les bols en faïences et une chaise grincer de temps à autre sur le vieux plancher en bois. Plus d'un habitué des festivités du soir se serait étonné de ce calme plat. Aussi, la seconde, harnachée dans sa tenue de cantinière, était là, touillant le potage dans une énorme marmite sur le feu. Seuls ceux qui avaient fait le meilleur chiffre d'affaire la veille pourraient venir se resservir. C'était la règle. Une sorte de rituel quotidien établi par la vieille maquerelle pour motiver ses troupes. L'un des garçons tenta d'ailleurs de feindre sa place dans le fameux classement pour pouvoir reprendre un bol. Il ne fallut pas sermonner Mme. Barisson bien longtemps avant que celle-ci le chasse de la cuisine à coup de louche. Elle n'était pas dupe. Grognant, elle s'en revint ensuite à ses fourneaux et le calme put réapparaître. Les autres n'avaient pas bronché. Seul Alek avait laissé échapper un léger rire cristallin. Cependant, ils n'allaient pas tarder à être troublés de nouveau dans leur paisible repas. 

Bientôt, on entendit des hurlements à l'étage. C'était Madame Alma et, en soit, cela n'avait rien d'étonnant puisque la vieille maquerelle, autoritaire comme elle était, passait le quart de son temps à faire des remontrances à tous. Cependant, ses rugissements perduraient avec toujours plus d'ampleur et de rage. Dans la cuisine, on se concertait à voix basse pour savoir qui était en train de se faire rappeler à l'ordre et, bientôt, on se rendit compte que l'une des filles avait manqué à l'appel quant au repas de ce midi. C'était Violette. D'abord, on ne s'était pas vraiment inquiété de son absence puisque, parfois, il arrivait que certains et surtout certaines sautent un repas pour diverses raisons. Maintenant, on comprenait mieux pourquoi elle n'était pas venue. Du moins, si c'était sur elle que Mme. Alma était en train de piailler. - Tu n'as pas honte petit sotte !, beuglât elle. -Je vais t'apprendre la vie moi, je t'ai laissé une chance et tu as osé me devancer ! Tu vas comprendre que l'on ne me trompe pas moi ! Mme.Barisson qui n'avait pas encore décroché un regard des premières assiettes qu'elle était déjà en train de laver dans l'évier soupira un instant. -Encore une qui lui a désobéit, en voila une qui va passer un sale quart d'heure, répétait-elle. Bientôt, garçons et filles s'amassaient au bas des escaliers pour mieux entendre ce qui se passait à l'étage. Personne n'avait encore la certitude que c'était Violette, du moins, on le savait mais on n'en avait pas la preuve. Malgré les hurlements de la méjaire et les coups contre les murs qui résonnaient dans tout l'établissement, on pouvait entendre une fille pleurnicher. Bientôt, ses valises se retrouvèrent au bas des escaliers. La vieille pie les balançait du haut des marches, frénétique, la figure rougeâtre et les yeux enragés. Elle était vêtue de son châle noir en dentelle, de son jupon en taffetas et de ses mitaines, faisant de grands gestes pour jeter les affaires de l'insurgé et, malgré tout cela, elle n'en était pas moins crédible, du haut de sa fière stature. Violette était derrière, la tête dans les mains, en larmes. Tu vas t'en retourner à la misère d'où tu viens vilaine ! Mme Alma, la prenant par la crinière, sans ménagements, lui fit sauvagement descendre les escaliers et la tira jusqu'à la porte d'entrée avant de la jeter, elle et ses deux pauvres valises, à la rue. - Et que je ne te revois plus ici, puis elle claqua la porte.

 Ensuite, d'une démarche cinglante lui étant propre, elle regagna ses appartements, ne manquant pas d'orchestrer un véritable tapage dans les escaliers en bois à l'aide de ses talons. Elle continua à piailler quelques minutes dans sa chambre, seule, puis le calme réapparu progressivement. Mme. Barisson, qui elle seule aurait pu se permettre de la visiter à cet instant, monta la voir un instant puis, en redescendant, une fois de retour aux cuisines où tous mourraient de savoir ce qu'il se passait, elle déclara d'un ton morne, - la jeune Violette a osé se faire trois pièces d'argent de profit sur l'un de ses clients, en douce, sans prévenir la patronne.
Madame Alma P.J.
Madame Alma P.J.


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